Trois années après être passées dans une structure d'insertion par l'activité économique (entreprise d'insertion, association intermédiaire ou régie de quartier), 78 % des 452 personnes interrogées par le Crédoc déclaraient avoir eu, au moins, un contrat de travail durant ce laps de temps. Un résultat plutôt positif puisqu'elles n'étaient que 54 % dans ce cas dans les deux années précédant l'entrée en SIAE. Ainsi, le passage dans ce type de structure permet de renouer, au moins partiellement, avec le travail. Toutefois, dans 40 % des cas, cette insertion professionnelle se fait essentiellement dans des emplois précaires : contrats à durée déterminée, contrats aidés, maintien dans le secteur de l'insertion par l'activité économique...
Afin d'expliquer la difficulté d'arriver à une insertion stable au sortir d'une SIAE, les chercheurs du Crédoc ont repéré plusieurs trajectoires différentes, sachant que la situation sociale et professionnelle des personnes, avant leur entrée en insertion, constitue un facteur souvent déterminant. La première trajectoire, orientée vers la « stabilité professionnelle », concerne les 13 % de personnes qui travaillaient déjà avant le passage dans une structure d'insertion (ou étaient étudiants) et ont décroché un contrat stable à la sortie. La deuxième, dite « d'insertion » (15 % de l'échantillon), est caractéristique des personnes qui ne travaillaient pas mais qui, après leur sortie de SIAE, ont bénéficié d'un emploi (stable ou non). Ces deux premières catégories concernent surtout les plus diplômés, parfois des jeunes sortant de l'école avec un niveau égal ou supérieur au bac. On trouve ensuite les « trajectoires dans la précarité » suivies par les personnes qui travaillaient avant d'entrer en SIAE mais n'ont eu qu'un emploi instable à la sortie (22 %), et par celles restées dans les structures d'insertion par l'activité économique (17 %). Dans ces deux groupes intermédiaires, on trouve beaucoup de femmes, seules ou vivant en couple, et qui, à défaut d'emplois stables, s'installent dans la précarité. Enfin, à l'extrémité du spectre de l'insertion, 25 % des personnes interrogées sont dans un « itinéraire de dégradation professionnelle » ou d'exclusion. En effet, elles se retrouvent sans emploi après leur passage en SIAE (14 %), voire n'ont travaillé ni avant ni après (11 %).
« Ces résultats peuvent paraître peu encourageants, observent les auteurs de l'étude, mais ils doivent être replacés dans un contexte de mutation économique globale avec une évolution générale de l'emploi dans laquelle le contrat à durée indéterminée devient la denrée rare pour ceux qui cherchent du travail. » Ainsi, poursuivent-ils, « pour évaluer vraiment les effets des SIAE sur le parcours professionnel des personnes enquêtées, il faut rompre avec l'illusion d'un retour vers l'emploi stable ». Autrement dit, dans le contexte actuel, une partie des personnes passant par les SIAE ne peuvent guère espérer mieux que de demeurer dans la précarité. Reste que les trois quarts de ceux qui ont été interrogés par le Crédoc se déclarent plutôt satisfaits de leur passage dans ces structures même si, pour un peu plus de la moitié, leur situation n'en a pas été améliorée. Parmi les points positifs les plus souvent évoqués : le fait de renouer avec le monde du travail et la satisfaction d'obtenir un revenu. A l'inverse, la précarité d'emploi et l'absence de débouché sont souvent dénoncées.
(1) Consommation et modes de vie n° 121 d'octobre 1997 - Etude de Patrick Dubéchot, Christine Henriot-Olm et Marie-Odile Simon - Crédoc : 142, rue du Chevaleret - 75013 Paris - Tél. 01 40 77 85 01.