L'hérédité sociale pèse toujours lourdement sur les destinées individuelles. A diplôme donné, nous avons tous une nette tendance à reproduire la situation sociale de nos parents. En outre, l'expansion scolaire actuelle ne s'accompagne pas d'une réduction notable de l'inégalité des chances. Telles sont les principales conclusions de l'étude « Mobilité sociale : la part de l'hérédité et de la formation », publiée par l'INSEE (1).
A l'origine de cette recherche, une question posée par Dominique Goux et Eric Maurin, tous deux chercheurs à l'INSEE : « La France contemporaine s'est-elle rapprochée ou éloignée de l'idéal démocratique d'égalité des chances au cours des 25 dernières années ? » Pour y répondre, il se sont d'abord intéressés à l'impact de l'origine sociale sur les parcours individuels, au-delà du filtre initial que représente la scolarité. Premier constat : chacun a tendance à rester dans son milieu d'origine. Ainsi, à diplôme égal, quels que soient la génération et le moment de la carrière observés, la probabilité que le fils d'ouvrier et l'enfant de non-salarié (patron, artisan ou commerçant) suivent la même voie que leurs parents est pratiquement toujours quatre fois plus importante que la probabilité contraire d'échange des situations. En outre, à l'inverse de ce qui se passe pour le diplôme, l'influence de l'origine sociale a tendance à s'accroître au fil du temps. Il existe ainsi un lien très puissant entre cette origine et le statut socioprofessionnel en fin de carrière. Par ailleurs, il faut remarquer que ces inégalités sont restées extrêmement stables au cours des 25 dernières années. Un diagnostic valable également pour de nombreux pays occidentaux.
Pourtant, s'interrogent les chercheurs, la démocratisation de l'école n'aurait-elle pas dû réduire notablement l'inégalité des chances ? La deuxième partie de leur recherche montre qu'à l'évidence ça n'a pas été le cas. Car, si le niveau scolaire général s'est nettement amélioré, les écarts entre catégories sociales persistent. En outre, constatent Dominique Goux et Eric Maurin, avec le ralentissement de la croissance économique, le diplôme est de plus en plus nécessaire pour trouver un emploi, mais de moins en moins suffisant pour accéder au même statut socio-économique que les générations précédentes. Enfin, il apparaît que les inégalités devant l'école dépendent de plus en plus étroitement du niveau culturel des familles, c'est-à-dire de leur connaissance du système scolaire et de leur capacité à y orienter leurs enfants. Signe de cette tendance : la destinée scolaire des jeunes est, actuellement, davantage liée au diplôme du père qu'à son milieu social.
(1) Economie et statistiques n° 306 - Disponible à la librairie d'INSEE Info service : 195, rue de Bercy - 75012 Paris - Tél. 01 41 17 66 11 - 46 F.