Préoccupante. Tel est le jugement que porte le Haut Comité de la santé publique sur la santé des jeunes. Dans un rapport destiné à la Conférence nationale de santé publique, qui doit se tenir fin juin à Lille, il dresse un état des lieux alarmant (1). Il note ainsi les taux de mortalité très élevés chez les enfants de moins d'un an (4 604 décès en 1993) et les 15-24 ans (6 027 décès en 1993). Dans la première année de l'existence, un quart des morts est attribuable au syndrome de la mort subite du nourrisson. Autres chiffres inquiétants : 71 % des décès des 15-24 ans sont des morts violentes : accidents (51,3 %) et suicides. Et, pour ces deux causes, la surmortalité masculine est considérable. Le Haut Comité relève, en outre, que la France enregistre là des taux supérieurs à ses voisins européens, malgré une évolution « dans un sens favorable » depuis de nombreuses années. Plus précisément, 7 % des élèves de 11 à 19 ans et 15,4 % des jeunes en insertion âgés de 21 ans ont fait une tentative de suicide. Et un tiers d'entre eux récidivent. D'ailleurs, est-il ajouté, 75 % des adolescents en insertion se plaignent de dépression ou d'anxiété et leur consommation de somnifères est plus élevée que dans la plupart des Etats européens.
Autre donnée : un jeune scolarisé sur sept a fait l'expérience de la drogue, dont le haschich reste le produit le plus consommé. Quant aux problèmes de santé somatiques, ils concernent surtout les troubles bucco-dentaires, les traumatismes et les troubles visuels, constatent les rapporteurs, indiquant que les jeunes sont assez utilisateurs des services de santé. En effet, ils consultent un généraliste ou un dentiste, en moyenne quatre fois par an.
« L'ensemble de ces données témoigne d' un mal-être dont la gravité ne doit pas être sous-estimée », conclut le Haut Comité qui porte également un jugement critique sur le dispositif institutionnel de prise en charge. Outre le manque de services hospitaliers accueillant spécifiquement les adolescents, il déplore la stigmatisation des services de PMI, considérés comme « des lieux réservés aux pauvres ». La PMI n'étant d'ailleurs plus la priorité des conseils généraux, focalisés sur la prise en charge des personnes âgées. Enfin, s'interrogeant sur la pertinence de la multiplication des points « jeunes », le rapport regrette que la politique de santé mentale n'ait pas été « réellement » centrée sur les besoins des enfants et adolescents. »
Aussi, estimant « très sérieuse » la situation, le Haut Comité réclame d'urgence « une politique globale » en matière de santé des jeunes et des très jeunes ainsi qu'une coordination nationale et locale des actions. Et il fixe quatre objectifs : améliorer le processus de développement harmonieux de l'enfant (par des mesures visant l'accueil collectif et l'éducation à la santé), détecter et prendre en charge les enfants et adolescents en difficulté, former les intervenants agissant auprès des jeunes, améliorer les connaissances sur l'état de santé de cette population.
(1) Haut Comité de la santé publique : 8, av. de Ségur - 75350 Paris 07 SP - Tél. 01 40 56 79 80.