Pour marquer l'importance accordée à la coordination des aides à la dépendance, lesdites dispositions sont inscrites en tête de la loi du 24 janvier 1997. La généralisation de la coordination obligatoire autour de la personne âgée dépendante est le fruit des expériences menées depuis 1995 dans les 12 départements pilotes autorisés dans le cadre de la loi du 25 juillet 1994 (1). Lesquelles ont fait ressortir le caractère indispensable d'une approche coordonnée de l'organisation, au niveau local, des aides aux personnes âgées dépendantes. Ces expérimentations ont confirmé, comme l'écrit la direction de l'action sociale (DAS), qu'une coordination gérontologique, par la passation de conventions entre les différentes institutions concernées, « permet d'optimiser l'affectation des moyens dont disposent les différentes institutions qui interviennent en faveur des personnes âgées dépendantes ».
Outre ces conventions obligatoires, pourront être mises en place des conventions facultatives (art. 4 de la loi du 24 janvier), conclues avec divers autres organismes pour l'instruction et le suivi de la seule prestation spécifique dépendance (PSD).
Des conventions entre le département et les organismes de sécurité sociale sontobligatoirement conclues afin de :
• favoriser la coordination des prestations servies aux personnes âgées dépendantes
• d'accomplir les tâches d'instruction et de suivi de ces prestations
• de préciser les modalités de gestion de cette coordination.
• La prestation spécifique dépendance (PSD) est attribuée aux personnes âgées de 60 ans et plus très dépendantes, sous condition de ressources(6 000 F/mois pour une personne seule et 10 000 F/mois pour un couple, majorés du montant de la prestation accordé). En cas de dépendance lourde (et de ressources peu élevées), le montant de la PSD peut atteindre au maximum 5 596 F (un maximum plus élevé peut être prévu par les conseils généraux).
Le montant de cette prestation est calculé selon le besoin d'aide évalué par une équipe médico-sociale en fonction d'une grille nationale d'évaluation, la grille AGGIR.
• La PSD est une prestation en natureaffectée au paiement des dépenses liées aux aides dont la personne âgée a besoin à son domicile ou en établissement :
- à domicile, elle sert à rémunérer une aide à domicile qui peut être employée directement par l'intéressé ou mise à disposition par un prestataire de services. L'aide à domicile peut être un membre de sa famille (à l'exception du conjoint ou du concubin). Il y a obligation pour la personne âgée de déclarer la personne employée ou le service auquel elle a recours. Un contrôle de l'effectivité de l'aide est réalisé au moins une fois par an.
Les bénéficiaires de la PSD peuvent prétendre à des réductions d'impôt sur le revenu et à une exonération de cotisations patronales de sécurité sociale dues au titre de l'emploi d'aides à domicile
- lorsque la personne réside en établissement, c'est ce dernier qui reçoit la prestation pour financer les surcoûts liés à la dépendance.
• La prestation est financée et gérée par le département. La demande de PSD doit être adressée au président du conseil général du département de résidence de l'intéressé, qui doit rendre sa décision dans un délai de 2 mois à compter du dépôt du dossier de demande.
La PSD n'est pas subordonnée à la mise en œuvre de l'obligation alimentaire mais est récupérable sur succession.
Il est également prévu le maintien des prestations expérimentales dépendance versées dans 12 départements et les modalités de passage de l'allocation compensatrice pour tierce personne à la PSD.
Le champ de cette coordination ne se limite pas à la PSD mais comprend l'ensemble des prestations servies aux personnes âgées dépendantes au sens large, à savoir notamment toutes les autres formes d'aide sociale financées par le département, l'aide-ménagère prise en charge par les régimes d'assurance vieillesse, les services de soins infirmiers à domicile financés par l'assurance maladie ainsi que les services spécialisés du type portage de repas, télésurveillance... dont les modalités de financement sont variables.
Bien que la loi ne le précise pas expressément, a expliqué Dominique Rousseau, lors des travaux parlementaires, la coordination de l'instruction et du suivi entraînera la mise en place d'une procédure d'instruction unique reposant sur l'équipe médico-sociale départementale et la généralisation des plans d'aide (voir ASH n° 2021 du 2-05-97).
Afin de garantir une certaine homogénéité entre les diverses conventions départementales, ces dernières doivent être conformes à un cahier des charges national, arrêté par le ministre chargé des personnes âgées, après avis des représentants des présidents de conseils généraux et des organismes nationaux de sécurité sociale (non encore paru). Ce cahier des charges fixera des prescriptions et recommandations. Il précisera le champ concerné par la coordination des prestations et ses modalités, ainsi que la liste des dispositions relatives à l'accomplissement des tâches d'instruction et de suivi qui devront être définies par la convention.
Dans notre numéro 2021 du 2 mai 1997, page 11 :
La prestation spécifique dépendance
• Les conditions d'admission à la PSD
• Le montant de la prestation
Dans notre numéro 2022-2023 du 16 mai 1997, page 15 :
La prestation spécifique dépendance (suite)
• La procédure d'attribution de la prestation
• Les modalités d'utilisation de la prestation
• Le suivi du droit à la prestation
Dans notre numéro 2024 du 23 mai 1997, page 11 :
La prestation spécifique dépendance (fin)
• Le contentieux
• Le financement de la prestation
• Les mesures d'accompagnement
• Le dispositif transitoire
• La date d'entrée en vigueur
Dans ce numéro :
La coordination de la prise en charge de la dépendance
• Des conventions obligatoires
- Contenu
- Forme - Suivi
• Des conventions facultatives
- Conventions de suivi
- Dispositifs d'observation
Le suivi des conventions obligatoires est confié à un Comité national de coordination gérontologique dont la composition et les fonctions ont été fixées par décret du 28 avril 1997.
Composition
Le Comité national de coordination gérontologique est présidé par le ministre chargé des personnes âgées ou, en son absence, par son représentant. Il est composé de membres nommés pour une durée de 3 ans, renouvelable, à savoir :
• 6 représentants des départements désignés par l'Assemblée des présidents des conseils généraux de France (APCG) et 2 représentants des communes désignés respectivement par l'Association des maires de France (AMF) et par l'Association des maires des grandes villes de France (AMG)
• 1 représentant désigné par chacun des organismes de sécurité sociale suivants :
- la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS),
- la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS),
- la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA),
- l'Organisation autonome du régime d'assurance vieillesse des professions industrielles et commerciales (ORGANIC),
- la Caisse autonome nationale de compensation de l'assurance vieillesse des artisans (CANCAVA),
- la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales,
- la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL),
- la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM) ;
• 1 représentant désigné par chacune des organisations suivantes :
- la Mutualité fonction publique (MFP),
- l'Union nationale des centres communaux d'action sociale (UNCCAS),
- l'Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (UNIOPSS),
- l'Union nationale des associations de soins et services à domicile (UNASSAD),
- l'Union nationale des associations d'aide à domicile en milieu rural (UNADMR),
- la Fédération hospitalière de France (FHF),
- la Fédération des établissements hospitaliers et d'assistance privés à but non lucratif (FEHAP),
- une organisation d'établissements privés pour personnes âgées
• 2 représentants des médecins généralistes et 2 représentants des infirmiers exerçant à titre libéral
• 3 représentants d'associations et d'organisations de retraités désignés par le Comité national des retraités et personnes âgées (CNRPA) et 1 représentant de l'Union nationale des associations familiales (UNAF)
• 4 membres choisis par le ministre chargé des personnes âgées en raison de leur compétence particulière en matière de gérontologie.
La direction de l'action sociale (DAS) est chargée d'assurer le secrétariat du comité. Le comité se réunit :
• au moins une fois par an sur convocation de son président
• à la demande d'un quart au moins de ses membres.
Cette instance peut également constituer des groupes de travail et y associer des personnes compétentes extérieures.
Le comité est chargé, le cas échéant, d'une fonction de médiation pour la conclusion de ces conventions.
Dans ce cas, le comité se réunit en commission spéciale. Il comprend alors son président ou son représentant ainsi que les représentants de l'APCG, de l'AMF, de l'AMG et les représentants de chacun des organismes de sécurité sociale.
Par ailleurs, le comité est chargé de rendre public, avant l'examen par le Parlement du projet de loi de financement de la sécurité sociale (2), un rapport annuel rendant compte de la mise en œuvre de la loi du 24 janvier 1997 (et notamment des conditions d'attribution, à domicile et en établissement, de la prestation spécifique dépendance dans l'ensemble des départements).
Pour ce faire, le comité détermine, sur proposition du ministre chargé des personnes âgées, la liste des données dont il doit disposer pour établir son rapport annuel. Ces données sont adressées par les signataires des conventions au représentant de l'Etat dans le département, dans des conditions fixées par ledit comité.
Pour l'instruction et le suivi de la PSD seulement, ledépartement peut conclure des conventions avec des institutions et organismes publics sociaux ou médico-sociaux, notamment :
• des centres communaux ou intercommunaux d'action sociale
• des organismes régis par le code de la mutualité ;
• des associations.
Ces conventions facultatives ont pour objet d'arrêterles modalités pratiques de la participation de ces organismes à l'instruction des demandes et au suivi des bénéficiaires. Elles fixeront ainsi les dispositions minimales afin que soient garantis les droits des usagers à bénéficier de modalités d'instruction de leurs demandes et d'un suivi équivalents, quel que soit l'organisme instructeur.
Les conventions doivent être conformes à une convention-cadre fixée par arrêté (non encore paru) pris après avis des représentants des présidents de conseils généraux et des maires.
Ainsi, les conventions facultatives compléteront la convention départementale obligatoire, a indiqué le rapporteur à l'Assemblée nationale ( Rap. A. N. n° 3150, Rousseau ), fixant ou précisant les règles relatives à :
• la composition de l'équipe médico-sociale et à la désignation de ses membres
• l'élaboration du plan d'aide
• le suivi des bénéficiaires
• le contrôle de l'effectivité de l'aide
• la répartition entre les différents cocontractants des dépenses d'instruction et de suivi.
Pour favoriser l'évaluation des prestations servies aux personnes âgées par les collectivités publiques et institutions concernées, des conventions organisant des dispositifs d'observation partagée peuvent être passées entre l'Etat, le département, les organismes de protection sociale et toute commune souhaitant y participer. •
Dossier réalisé par Emmanuelle Couprie
Le Conseil constitutionnel a validé, le 21 janvier, l'ensemble de la loi instituant la prestation spécifique dépendance (PSD). Saisi par un groupe de députés socialistes, le Conseil a ainsi jugé que le législateur n'avait pas, en renvoyant au pouvoir réglementaire le soin de préciser les conditions d'octroi de la PSD (âge, ressources, degré de dépendance), méconnu la compétence qu'il tient de l'article 34 de la Constitution dès lors que « les règles essentielles relatives au régime juridique de cette prestation d'aide sociale avaient été fixées par la loi ».
En outre, il a considéré que l'exigence de solidarité nationale imposée par le Préambule de la Constitution de 1946 ne faisait pas obstacle à l'attribution à une collectivité décentralisée de la mise en œuvre des mécanismes de solidarité. Il a toutefois souligné que « les dispositions réglementaires et les décisions individuelles prévues par la loi [devaient] être prises, sous le contrôle du juge de la légalité, de façon à ne pas aboutir à mettre en cause » l'exigence de solidarité, « compte tenu de la diversité des situations de nature à se présenter ».
Les Sages ont, de plus, rejeté le grief tiré d'une violation du principe d'égalité, le législateur ayant « pris les mesures appropriées pour prévenir des ruptures caractérisées » de ce principe pouvant résulter de l'attribution au département du service et de la gestion de la prestation spécifique dépendance qui répond directement au but d'intérêt général visé.
(Décision n° 96-387 DC du 21 janvier 1997)
(1) Sur l'évaluation de la prestation expérimentale dépendance, voir notamment ASH n° 1996 du 8-11-96 et n° 1994 du 25-10-96.
(2) Rappelons que conformément à la loi organique du 22 juillet 1996 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, un projet de loi de financement de la sécurité sociale doit être déposé devant l'Assemblée nationale, au plus tard le 15 octobre de chaque année - Voir ASH n° 1984 du 19-07-96.