La circulaire relative à la mise en œuvre de la loi du 24 avril 1997 portant diverses dispositions relatives à l'immigration (1) vient d'être diffusée aux préfets.
Signée par le ministre de l'Intérieur, Jean-Louis Debré, ce texte d'une cinquantaine de pages présente de façon détaillée toutes les dispositions nouvelles de la loi, à l'exception de celles relatives au certificat d'hébergement et aux empreintes digitales dont l'entrée en vigueur est soumise à la parution de décrets d'application. Aussi, dans l'attente du décret relatif à la procédure de délivrance des certificats d'hébergement par les préfets (qui devrait vraisemblablement paraître à l'automne prochain), les maires doivent continuer à statuer sur les demandes de visa de certificat d'hébergement, est-il rappelé. Sont, en revanche, d'application immédiate l'ensemble des autres dispositions de la loi.
Il en est ainsi notamment de l'accès de plein droit à la carte de séjour temporaire pour de nouvelles catégories d'étrangers. Un dispositif mis en place par la loi du 24 avril qui a pour but, selon l'administration, « de résoudre les situations complexes et plus particulièrement celles concernant les étrangers qui ne peuvent bénéficier de la carte de résident et sont en même temps protégés contre toute mesure d'éloignement » du fait des liens établis avec la France, soit à titre familial, soit en raison de l'ancienneté du séjour. Aussi, le fait que le requérant fasse l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière ne rend pas irrecevable sa demande de carte de séjour temporaire. Si la demande est fondée, l'octroi de cette carte s'accompagnera de l'abrogation de l'arrêté de reconduite à la frontière.
Cette carte de séjour temporaire peut également être accordée aux jeunes étrangers qui justifient « par tous moyens » (certificats de scolarité, attestations de virement de prestations sociales...) avoir leur résidence habituelle en France depuis qu'ils ont atteint au plus l'âge de 10 ans (au lieu de 6 précédemment). Et, en cas d'arrivée en France après l'âge de 10 ans, la circulaire précise que les préfets « devront toujours procéder à l'examen de la situation familiale des intéressés » et user, si nécessaire, de leur pouvoir de régularisation.
Sont également susceptibles d'obtenir une carte de séjour temporaire, les étrangers mariés depuis au moins un an avec un Français. La condition d'entrée régulière ne s'applique qu'aux étrangers des pays soumis à visa, qui doivent produire un visa, même de court séjour, indique l'administration. Elle rappelle que des dispositions spécifiques s'appliquent aux Algériens et Tunisiens, conjoints de Français.
L'étranger (ne vivant pas en état de polygamie), père ou mère d'un enfant français de moins de 16 ans, résidant en France à condition qu'il subvienne effectivement à ses besoins, pourra également se voir attribuer une carte de séjour temporaire. En revanche, les Algériens, parents d'enfant français, dont le statut est régi par l'accord franco-algérien, doivent continuer à répondre aux conditions posées par la circulaire du 9 juillet 1996 qui prévoit un traitement au cas par cas (2).
Revenant sur la nature du titre, la circulaire indique que « d'une manière générale, dès lors que [les étrangers] manifesteront l'intention d'occuper un emploi, une carte de séjour en qualité de salarié leur sera délivrée et la situation de l'emploi ne leur sera pas opposable ». Aussi, l'autorisation de travail étant délivrée de plein droit, les préfectures n'ont pas à solliciter l'avis du directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, ni à exiger du requérant qu'il présente un contrat de travail. Il suffit à ce dernier de se présenter aux services de la préfecture et de déclarer son intention de travailler ou de rechercher un emploi.
A l'expiration de la validité de ce titre de séjour temporaire, une carte de résident peut être délivrée de plein droit au conjoint de Français, au parent d'enfant français ou au titulaire d'une rente d'accident du travail ou de maladie professionnelle, précise encore l'administration, sous réserve qu'il remplisse les conditions requises (absence de menace à l'ordre public, régularité du séjour et/ou entrée régulière sur le territoire...). Pour les autres catégories d'étrangers, la carte de séjour temporaire pourra être renouvelée si les conditions initiales sont toujours respectées sans considération de conditions de ressources ou d'emploi. Enfin, à l'issue de trois années de résidence ininterrompue en France sous le régime de la carte de séjour temporaire, l'étranger pourra se voir délivrer une carte de résident s'il respecte les conditions prévues. Pour les apatrides, conjoint et enfants d'apatrides, cette carte de résident est attribuée de plein droit après trois ans de résidence régulière.
En matière de protection des étrangers atteints des pathologies graves contre l'éloignement, la circulaire souligne que cette nouvelle disposition n'a pas pour but « de créer un droit au séjour mais d'éviter un éloignement dont les conséquences seraient susceptibles de porter gravement atteinte à l'intégrité physique d'un étranger dans l'hypothèse où il est atteint d'une pathologie grave ». Les décisions que les préfets seront amenés à prendre seront fondées tant sur des éléments d'ordre médical que sur des renseignements d'ordre administratif. Aussi, l'autorité médicale doit-elle se prononcer sur deux points : « existe-t-il une nécessité absolue pour l'étranger atteint d'une pathologie grave de poursuivre le traitement dont il bénéficie sur le territoire français ? un traitement médical peut-il sans risque excessif pour le malade être poursuivi dans le pays d'origine ou dans un pays tiers dans lequel il serait légalement admissible ? » Ce n'est que si le médecin confirme la nécessité pour le malade de poursuivre le traitement prévu en France, à l'exclusion de toute possibilité dans le pays de renvoi, qu'il pourra être autorisé à se maintenir sur le sol français tant que son état de santé le nécessitera, conclut la circulaire.
Enfin, concernant la retenue du passeport d'un étranger en situation irrégulière, il est indiqué qu'un récépissé doit être remis à l'étranger. A titre indicatif, la circulaire fixe sa durée à huit jours, qu'elle juge « compatible aussi bien avec la rétention administrative qu'avec la préparation d'un départ volontaire » (sous réserve des renouvellements éventuellement nécessaires). Des durées plus longues pouvant être prévues en cas de condamnation à une peine de prison.
Enfin, le ministre rappelle que la loi permet désormais au procureur de la République de demander au premier président de la cour d'appel de donner un caractère suspensif au recours formé par lui lorsque l'étranger ne dispose pas de garanties de représentation effectives. L'administration insiste sur le fait que seul le parquet, à l'exclusion du représentant de l'Etat, peut demander l'appel suspensif et ainsi suspendre la mise à exécution immédiate de la décision de remise en liberté ou d'assignation à résidence prise par le juge.
(1) Voir ASH n° 2021 du 2-05-97.
(2) Voir ASH n° 1984 du 19-07-96.