Le médiateur de la République, Jacques Pelletier, a rendu public le 24 mars son rapport annuel 1996, remis quelques jours auparavant au président de la République (1). Après avoir enregistré une progression constante depuis 1973, date de création de la médiature, le nombre de réclamations est resté stable en 1996 pour la deuxième année consécutive (43 544 demandes contre 43 805 en 1995). Dans 85 % des cas, les interventions du médiateur sont couronnées de succès.
Pour Jacques Pelletier, deux nécessités apparaissent au travers des recours dont il est saisi :celle de solidarité et celle de proximité. Il faut rendre « les services publics plus attentifs à tous ceux que notre société a laissés sur le bord du chemin » mais aussi « plus simples et plus accessibles, plus proches des citoyens », a-t-il indiqué. Ainsi au chapitre de la solidarité, Jacques Pelletier note que les litiges liés au logement (difficultés d'y accéder et de le conserver) se sont accrus, relevant au passage la « complexité excessive des procédures » ou encore « l'enchevêtrement des compétences administratives ». Il dénonce, entre autres, la parution tardive des barèmes d'aides au logement qui « ne fait qu'aggraver le manque de lisibilité de l'aide pour les bénéficiaires ». Autre « facteur d'exclusion », les lenteurs dans le déroulement des procédures contentieuses à caractère social qui concernent plus particulièrement les personnes âgées, handicapées ou les allocataires du RMI. Compte tenu du nombre des affaires traitées par la commission centrale d'aide sociale (environ 2 500 par an), « seul un renforcement très substantiel des moyens de la CCAS pourrait réduire les délais d'instruction », souligne le médiateur. « Les dysfonctionnements affectant ce service public traduisent le décalage qui existe entre les discours tenus sur la priorité à donner au'social" et la réalité. Si la collectivité porte un réel intérêt aux populations les plus démunies, elle doit se donner les moyens de les traiter dignement », s'indigne-t-il. S'agissant de l'objectif de proximité, Jacques Pelletier fait état de la situation des médiateurs départementaux qui ont, tout à la fois, une mission de règlement des diffé- rends, un rôle d'information, d'écoute et de conseil dans des domaines qui ne relèvent pas nécessairement de leur compétence, mettant en lumière là aussi les dysfonctionnements de l'administration. Les délégués sont parfois « pris comme l'ultime recours ». Ils deviennent ainsi des « assistantes sociales » au sens le plus large du terme.
Dans le prolongement de ses travaux antérieurs relatifs aux droits de l'Homme, le médiateur s'est penché sur le respect des droits des détenus. « Le respect des droits fondamentaux ne saurait en effet s'arrêter à la porte des prisons. » Et de noter que l'accès aux soins reste trop souvent « négligé » malgré les progrès incontestables engendrés par la loi du 18 janvier 1994 (2). A l'individu privé de liberté, il convient en outre d'offrir un certain nombre de garanties comme la possibilité de demander un transfert pour se rapprocher de sa famille, estime Jacques Pelletier.
Enfin, au titre de sa mission d' « incitateur » à la réforme, le médiateur s'est félicité que sa proposition pour le droit de vote des personnes sans domicile fixe ait été inscrite dans le projet de loi relatif au renforcement de la cohésion sociale (3). Des pouvoirs qui se trouveront encore élargis avec l'adoption de la loi relative à l'amélioration des relations entre les administrations et le public (4) en cours de discussion au Parlement. Le médiateur pourra ainsi s'autosaisir pour proposer des réformes, sans plus se fonder exclusivement sur les réclamations qu'il reçoit.
(1) Rapport au président de la République et au Parlement 1996 - Médiature : 53, avenue d'Iéna - 75116 Paris - Tél. 01 45 02 72 72 - 100 F.
(2) Voir ASH n° 1906 du 22-12-94.
(3) Voir ASH n° 2012 du 24-02-97.
(4) Voir ASH n° 1988 du 13-09-96.