Alors que l'action publique de solidarité apparaît aujourd'hui « déboussolée » face à la montée de la précarité et que les professionnels sont en mal de repères, Philip Mondolfo, directeur de la formation assistant social de l'université Paris-Nord, formule des pistes pour sortir de l'impasse actuelle. Et, notamment, dans cet ouvrage quelque peu dérangeant, il invite à « refonder le modèle d'intervention sociale généraliste » afin de lui permettre de mieux répondre aux nécessités de l'insertion. Son argumentaire est fondé en grande partie sur l'analyse des effets de « l'onde de choc du RMI » sur le service social, examinés à travers les témoignages d'assistantes sociales polyvalentes, de conseillères techniques, de responsables de service et de cadres pédagogiques. Et le diagnostic est loin d'être entièrement négatif : si le RMI a pu déstabiliser et bousculer l'identité professionnelle, déplaçant l'intervention de l'assistant social sur la chaîne d'insertion, il a ouvert également des perspectives notamment au niveau de l'approche globale des usagers ou de l'action collective qui s'est trouvée légitimée. En ce sens, il offre des potentialités susceptibles de permettre à la polyvalence de trouver un nouveau souffle, défend l'auteur. Lequel y voit l'opportunité de mettre fin à « un modèle d'intervention conçu sur le seul mode de la médiation orale et dépensière entre offres et demandes, pour lui associer le rôle, et donc l'image, d'une action sociale créatrice de projets d'insertion viables au croisement de l'économique et du social ».
C'est ainsi que Philip Mondolfo, déplorant par ailleurs l'éclatement des dispositifs de lutte contre l'exclusion et le gaspillage des moyens, plaide pour un service social d'aménagement local valorisant les ressources du milieu et organisant les acteurs de l'insertion. Ce qui l'amène à s'interroger sur les missions, l'organisation et la formation (insuffisamment ouverte selon lui à l'ingénierie) des professionnels. Nul doute que cette thèse, qui n'hésite pas au passage à épingler certaines représentations de la culture des professionnels, risque de bousculer, voire d'irriter, nombre d'assistants sociaux. Car si elle relance un vrai débat autour des enjeux actuels du service social, peut-être prend-elle insuffisamment en compte certaines évolutions à l'œuvre sur le terrain...
Repenser l'action sociale - Philip Mondolfo -Ed. Dunod - 140 F.