ASH : Quel est l'impact des ordonnances Juppé sur les réseaux ville-hôpital et les réseaux de santé ? P. de La S. : Pour la première fois dans la loi est inscrite la notion de réseaux de soins. Et le décret du 11 septembre 1996 (2) met en place un conseil d'orientation qui propose des expérimentations concernant des filières et des réseaux de soins avec des dérogations tarifaires. Pour nous c'est positif, mais à condition que le cahier des charges proposé par la caisse d'assurance maladie ne soit pas trop loin des expériences associatives que nous avons développées depuis plusieurs années. Ce qu'on craint, c'est que la réforme favorise davantage les réseaux institutionnels à l'initiative par exemple de telle mutuelle ou de tel syndicat que ce qui existe sur le terrain. On estimerait pourtant normal que tous les outils que l'on a créés, depuis des années, puissent s'inscrire dans cette réforme. Et que celle-ci s'appuie sur une dynamique de terrain portée par environ 5 000 professionnels. ASH : Justement, que représente le mouvement associatif des réseaux ? P. de La S. : On compte environ, au niveau associatif, 150 réseaux qui se sont développés depuis les années 90. Au départ, il s'agissait de réseaux ville-hôpital VIH financés par l'Etat. Puis certains réseaux se sont transformés en réseaux de santé en se donnant pour mission de prendre globalement en charge les questions de santé d'une population et de ne pas se limiter à une pathologie comme le sida, la toxicomanie ou l'hépatite C, par exemple. Nées sous l'impulsion de professionnels qui voulaient travailler différemment en établissant des passerelles entre l'hôpital et la ville, le médical et le social, ces structures répondent à un dysfonctionnement de notre système de santé et défendent un certain nombre de principes. Tout d'abord, elles cherchent à proposer une meilleure prise en charge, une meilleure communication entre les professionnels et à développer le travail en équipe. Deuxièmement, elles sont complètement inscrites dans une logique d'accès aux soins en permettant l'accès aux traitements les plus pointus d'une population dont elles ont la charge. Enfin, on note une tendance chez certaines associations à développer des réseaux de proximité proches de la population au niveau des communes et des quartiers et à inclure avec les professionnels de santé, les travailleurs sociaux, les associations ayant en charge l'accueil et l'accompagnement des publics en difficulté... Ces réseaux sont porteurs d'une autre logique de soins. ASH : Vous allez, dans le cadre de votre congrès, créer l'association Coordination nationale des réseaux. Dans quel but ? P. de La S. : Cette coordination existe de façon informelle depuis trois ans. Il s'agit, en créant une association, de fédérer les 85 réseaux déjà inscrits chez nous et de devenir l'interlocuteur des pouvoirs publics et de l'assurance maladie. L'objectif, c'est de fédérer toutes les initiatives en réseaux, qu'elles soient ville-hôpital, de soins, de santé, animées par une charte commune. Et de concerner à terme 150 associations pas seulement préoccupées par le sida ou la toxicomanie mais également, dans le cadre par exemple du maintien à domicile ou des alternatives à l'hospitalisation, par les personnes âgées dépendantes ou les patients atteints de cancer qui pourraient être soignés à domicile.
(1) 16, rue Séverine - Pavillon Maurice Deparis - Porte n° 6 - 94270 Le Kremlin-Bicêtre - Tél. 01 45 21 94 31.
(2) Voir ASH n° 1989 du 20-09-96.