« Les politiques d'insertion apparaissent aujourd'hui “déboussolées” à tel point d'ailleurs que l'on ne sait plus très bien les questions qu'elles sont censées résoudre », constate Simon Wuhl, conseiller scientifique au Plan urbain. Partant de l'hypothèse que la compréhension de la crise qu'elles traversent peut nous aider à sortir « par le haut » de la crise économique et sociale actuelle, celui-ci nous propose donc une lecture critique de ces politiques et des conceptions qui les ont présidées. Celles-ci ont « produit et structuré, depuis 15 ans, une interface entre l'économique et le social dans le but de compenser les effets de la dérégulation du marché du travail », observe-t-il, sans toutefois avoir réussi à surmonter les cloisonnements entre le social et l'économique, inhérents à notre système productif. Et même la démarche de développement social qui émerge au début des années 80, particulièrement innovante puisqu'elle bouleverse le mode d'intervention de l'Etat (en tentant d'assouplir, de décloisonner, de décentraliser son action et d'organiser des formes de collaboration active avec les bénéficiaires), va s'épuiser « en l'absence de connexions avec le monde de l'emploi ordinaire ». Le retour en force du libéralisme en 1983 ayant d'ailleurs encore creusé cet écart. Néanmoins, relève l'auteur, ce type de démarche va se diffuser et consacrer « l'irruption du local dans le champ des politiques de l'emploi ». Un acquis non négligeable, concède-t-il tout en observant aussitôt que ce recentrage sur le territoire ne s'accompagne pas d'une remise en cause de notre organisation économique, encore largement marquée par le modèle taylorien. D'où la disjonction entre formation et emploi, social et économique...
Aussi pour Simon Wuhl, est-il nécessaire de promouvoir « un nouveau modèle d'articulation entre insertion et production » (modèle coopératif), tendant à relier insertion qualifiante et qualification des organisations de travail. Et de l'assortir d'une politique générale en faveur d'une réduction du temps de travail. Une solution qui, défend-il, permettrait de se dégager d'une conception de l'insertion « qui relève peu ou prou du traitement social de l'exclusion ».
Insertion : les politiques en crise - Simon Wuhl - Ed. PUF - 138 F.