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Associations : place aux jeunes des quartiers difficiles

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Comment les jeunes des quartiers en difficulté sont-ils pris en compte par les associations, « à la fois en tant que bénéficiaires et acteurs »  ?Chargé de réfléchir à cette question par Alain Juppé, Claude Demassieux, député RPR du Pas-de-Calais, a remis, le 18 novembre, son rapport au Premier ministre (1).

« Le monde associatif, qui recouvre des réalités complexes, hétérogènes et parfois contradictoires, est devenu, dans les quartiers difficiles, un instrument privilégié pour l'intégration des jeunes. Vivier essentiel d'expériences et d'innovations nouvelles, il est créateur de lien social et constitue, dans certains cas, le dernier rempart contre le vide éducatif de la rue. » Après avoir visité 80 quartiers en difficulté, c'est un regard globalement positif que porte Claude Demassieux sur l'action que les associations y mènent. Pourtant, au-delà de cette bonne appréciation générale, il brosse un état des lieux plutôt contrasté et même assez critique. Ainsi, il déplore l'existence de la concurrence entre associations, les difficultés du dialogue avec l'administration, les tensions entre bénévoles et professionnels et, surtout, « l'absence de démarche globale et coordonnée » dans les quartiers en raison de la multiplicité des dispositifs et des financeurs. Ses reproches sont particulièrement vifs à l'égard des associations « professionnalisées », au premier rang desquelles il place les grandes fédérations associatives. En effet, estime le député, celles-ci sont « devenues les référents trop systématiques des pouvoirs publics, captant la grande majorité des subventions au détriment des petites associations de quartiers ». En outre, elles sont « souvent absentes des quartiers », ont « du mal à innover » et souffrent d'un « manque de coopération » entre elles.

Les clubs de prévention dans le collimateur

A l'inverse, Claude Demassieux ne tarit pas d'éloges à l'égard des petites associations, créées par des adultes ou directement par des jeunes. «  Elles sont proches des réalités du terrain et réalisent, avec des moyens limités, un travail considérable. » De même, « elles savent mieux s'adapter aux besoins des jeunes ; elles ont compris qu'ils ne veulent pas être de simples consommateurs passifs d'activités mais participer plus activement à leur élaboration ». A condition, précise le député, d'éviter certaines dérives dues au manque de sérieux comptable et administratif et à l'absence d'expérience et de qualification, notamment chez les jeunes. Sans parler des risques de détournement de la structure associative, par exemple au profit de groupes religieux. Evoquant, par ailleurs, les clubs de prévention, le rapporteur les juge «  handicapés » du fait des «  relations qu'ils entretiennent avec les conseils généraux et les municipalités ». Ils « é prouvent d'énormes difficultés à s'insérer dans le dispositif de la politique de la ville ». En outre, «  les principes sur lesquels la prévention spécialisée est fondée ne sont plus en adéquation avec la réalité des quartiers difficiles  ». D'où l'appel lancé aux clubs de prévention pour qu'ils « modifient leurs méthodes de travail » en allant «  au-devant des jeunes », en faisant «  l'effort de prospecter le terrain » et en intervenant «  beaucoup plus en amont ».

Il est vrai, poursuit le député du Pas-de-Calais, que les travailleurs sociaux rencontrent «  des difficultés croissantes » dans ces quartiers où «  ils jouent pourtant un rôle primordial », étant «  bien souvent les seuls adultes présents dans la rue ». Les éducateurs spécialisés, en particulier, auraient « des relations de plus en plus tendues avec les jeunes, souvent marquées par une méfiance réciproque ». Les explications avancées sont diverses : absence de réponses concrètes, effets pervers liés à la décentralisation, méthodes de travail obsolètes, usure professionnelle... Mais c'est surtout la formation des travailleurs sociaux qui, selon le rapporteur, est en cause. «  Trop généralistes, trop théoriques, les formations actuelles ne donnent pas aux travailleurs sociaux les outils dont ils auraient besoin dans les quartiers difficiles. » Quant aux «  nouveaux intervenants », bien souvent issus de ces quartiers et impliqués dans l'animation et la médiation, même si «  leur développement témoigne de la nécessité de leur présence », ils sont insuffisamment formés, leurs motivations manquent parfois de clarté et leur savoir-faire n'est pas forcément exportable. En outre, «  sans accès à une formation qualifiante, leur avenir professionnel est plutôt sombre ».

Enfin, en matière de financement, le rapport met une nouvelle fois l'accent sur «  le manque de cohérence et de rapidité » du système de subventions. Les associations péchant parfois, de leur côté, par une certaine «  opacité de leur budget ». En conclusion, même si «  les associations ont un rôle primordial à jouer [...], on ne peut pas tout leur demander. Elles ont un grand besoin de structures d'appui et doivent être épaulées dans leur développement  », estime Claude Demassieux. Formulant une série de propositions, il préconise ainsi un soutien «  réel mais pas aveugle » à la vie associative afin de répondre aux «  besoins de reconnaissance » des jeunes et des professionnels, d'organiser un « maillage éducatif et associatif efficace », et de garantir l'intérêt général avec le «  retour de l'Etat ».

Jérôme Vachon

Six propositions prioritaires

Le rapport comporte, au total, 19 propositions parmi lesquelles six sont présentées comme prioritaires. Le chèque associatif  : distribué aux jeunes, il leur permettrait de pratiquer des activités « à la carte » au sein d'associations ou de clubs sportifs. L'association « moins de 18 »   :cette structure relais permettrait à des mineurs de monter des projets associatifs, sous la responsabilité d'une association tutrice. L'IUT des métiers de la ville  : il s'agirait d'une filière courte (bac + 2) destinée à compléter le dispositif de formation des jeunes bacheliers et des professionnels appelés à intervenir dans les quartiers difficiles. Le chèque fédératif  :créé grâce à la déconcentration de financements nationaux, il permettrait aux associations « d'alimenter » les fédérations, confédérations et réseaux. Le dossier unique de subvention  : pour toute demande de subvention, un dossier unique serait instauré avec des règles identiques, « quel que soit l'organisme dont il émanerait ». L'ordre du mérite associatif  : cette distinction serait décernée aux militants associatifs ayant fait preuve « d'efforts et de dévouements exemplaires ».

Notes

(1)  Les jeunes et le monde associatif dans les quartiers en difficulté - Claude Demassieux - Une publication est prévue à La Documentation française.

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