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Les 50 ans du Conseil économique et social

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Créé en 1946 pour favoriser le dialogue entre catégories socioprofessionnelles et conseiller le gouvernement, le Conseil économique et social (CES) fête ses 50 ans. Présidente de sa section des affaires sociales, et représentant la CGT-FO, Paulette Hofman plaide en faveur de cette institution qui constitue, selon elle, un indispensable lieu de dialogue.

Actualités sociales hebdomadaires  : On reproche parfois au CES d'être un peu la vieille dame endormie des institutions, de ne pas avoir de réelle utilité. Est-ce le cas ? Paulette Hofman : Non, je ne le crois pas. Dans son cadre actuel, le CES conserve toute sa pertinence. Pour moi qui ai un long passé syndical, je constate que c'est un endroit où des gens qui n'ont pas beaucoup de raisons d'être d'accord arrivent à se mettre autour d'une table, à discuter de sujets d'actualité et à émettre des avis. C'est un rôle de conseil essentiel, même s'il n'est pas très spectaculaire. Il est vrai que le CES se situe un peu hors des passions dans la mesure où, les uns et les autres, nous ne sommes pas élus mais soumis à désignation. Par conséquent, nous pouvons plus facilement essayer de réfléchir ensemble. ASH  : Bien souvent, les projets soumis au CES sont déjà arrivés à maturité. Est-ce que cela ne nuit pas à l'intérêt des débats ? P.H. : Je vais faire une réponse de Normande : oui et non. Ce qui est intéressant, notamment à la section des affaires sociales, c'est que, ces derniers temps, le gouvernement nous a saisis à plusieurs reprises avant qu'un projet de loi ne soit bouclé. C'est ce qui se passe actuellement avec l'avant-projet de loi d'orientation relatif au renforcement de la cohésion sociale (1). Il faut dire que, sur cette question, le CES a une certaine expérience, notamment avec le rapport Wrésinski et celui de Geneviève de Gaulle-Anthonioz sur les politiques publiques de lutte contre la grande pauvreté (2). Notre ambition est d'essayer de fournir aux parlementaires des éléments de réflexion pour leur permettre de faire évoluer les choses. Après - et c'est la règle du jeu - ils tireront de nos travaux les enseignements qu'ils jugeront utiles. ASH : Outre la loi de cohésion sociale, sur quels dossiers importants la section des affaires sociales a-t-elle travaillé ? P.H. : Depuis ma nomination à sa présidence, en 1994, la section des affaires sociales a été saisie quatre fois par le gouvernement. Nous avons examiné la loi sur l'Education nationale, dite loi Bayrou, le projet relatif à la prestation autonomie, celui sur le service national et, aujourd'hui, l'avant-projet de loi de cohésion sociale. Et nous serons probablement saisis -je ne sais pas encore quand - de la suite de la loi sur le service national. Par ailleurs, nous avons travaillé sur différents textes, comme le rapport Evin sur les droits des malades (3) et, bien entendu, le rapport d'évaluation des politiques de lutte contre la pauvreté. Je crois qu'un certain nombre de nos avis ont été entendus et ont alimenté les réflexions de ceux qui préparent et font les lois. Même si ça n'a pas toujours d'effets immédiats. Par exemple, sur la prestation autonomie, notre avis a eu un certain retentissement au niveau médiatique. Mais il n'a pas eu de réels prolongements, puisque le projet de loi n'est toujours pas passé. ASH : Le CES représente les acteurs de la société civile. Estimez-vous que sa voix est suffisamment audible pour la majorité des citoyens ? P.H. : Si vous me parlez du gouvernement et des parlementaires, on sent une attention plus soutenue, aujourd'hui, à l'égard des avis que nous pouvons émettre. C'est incontestable. Peut-être cela tient-il à la pertinence, ou du moins à la sagesse, des avis rendus par l'une ou l'autre des sections. En revanche, je regrette que beaucoup de Français ne connaissent pas bien le CES. Même si celui-ci n'a pas de poids politique, il est dommage que nos concitoyens ignorent l'existence d'une institution au sein de laquelle des gens différents peuvent réfléchir en commun. ASH  : Faut-il, afin d'améliorer la visibilité du CES, modifier sa composition en l'élargissant à de nouveaux membres ? P.H. : Vous voulez parler de la représentation des chômeurs et des exclus ? Sur ce point, je vais vous donner un avis rigoureusement personnel. Je refuse le chômage et l'exclusion. Je refuse que l'on marginalise les personnes handicapées. Ça signifie que je refuse l'idée de représentations spécifiques des chômeurs, des exclus ou des handicapés au sein du CES. Ce serait encore les marginaliser. Le chômage ou l'exclusion ne sont pas des situations normales. Il n'est donc pas logique de leur donner une expression à part. Il faut écouter les personnes en difficulté et leur donner le moyen d'être entendues. Mais elles doivent s'intégrer aux groupes représentatifs actuels. Il y en a d'ailleurs quelques-uns, même s'ils sont peu nombreux. ASH : En refusant cette représentation spécifique, ne défendez-vous pas le pré carré des syndicats ? P.H.  : Ah non ! Pour la syndicaliste que je suis, et là encore je m'exprime à titre personnel, le pire que l'on puisse connaître, c'est d'être sans travail. Aussi, nous devons tous essayer de lutter contre le chômage. Mais pas pour faire des chômeurs une classe à part. Et qui va-t-on désigner pour représenter les exclus ? Quelle association pourra être choisie sans contestation possible ? En outre, d'autres catégories - les jeunes, les retraités, les femmes... - pourraient, elles aussi, revendiquer une représentation. Jusqu'où va-t-on aller ?D'ailleurs, c'est pour cette raison que, pour moi, il est très important que l'avant-projet de loi de cohésion sociale ne se présente pas comme une loi pour les exclus. La misère ne donne pas de droits particuliers. On a essayé de faire un texte - même s'il reste à mon avis insuffisant - pour que chacun, quelle que soit sa situation, ait la possibilité d'accéder aux droits de tous. Propos recueillis par Jérôme Vachon

231 membres et 9 sections

Le CES, dont le rôle est purement consultatif, tend à représenter l'éventail des forces économiques et sociales du pays. Il est composé de 231 membres dont le mandat est de cinq ans, regroupés au sein de neuf sections (affaires sociales, travail, finances, cadre de vie... ) auxquelles s'ajoute une commission spéciale du Plan. Ceux-ci se répartissent en 18 groupes de représentation : les trois quarts étant désignés par les organisations syndicales et professionnelles, le gouvernement faisant en outre appel à des personnalités qualifiées.

Notes

(1)  Voir ASH n° 1991 du 4-10-96.

(2)  Voir ASH n° 1935 du 14-07-95.

(3)  Voir ASH n° 1979 du 14-06-96.

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