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Le rapport Rufin sur la PJJ et la délinquance juvénile

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Michel Rufin, sénateur  (RPR) de la Meuse et rapporteur du budget de la PJJ au sein de la commission des lois du Sénat, a remis, en septembre, à Alain Juppé, son étude sur la protection judiciaire de la jeunesse  (PJJ) et la délinquance juvénile (1). Commandé en janvier dernier par le Premier ministre, ce rapport tente de dresser l'état des lieux de la délinquance juvénile et de la PJJ et cherche des solutions afin « d'améliorer le rendement » de celle-ci. Et s'il se révèle souvent assez juste sur les constats, il comporte certaines propositions dont on peut penser qu'elles provoqueront l'irritation de certains.

Première observation : « Pour lui permettre d'assumer le plus favorablement ses missions, la protection judiciaire de la jeunesse a besoin d'être mieux reconnue et confortée. » En effet, estime Michel Rufin, la PJJ est une administration « originale, fragile et méconnue » , caractérisée par « des mutations nombreuses » (liées notamment aux effets de la décentralisation), « des personnels motivés et anxieux » (en particulier avec la montée de la violence dans les établissements et services PJJ) et des moyens humains « insuffisants ». « La récente régulation budgétaire est douloureusement ressentie par cette administration de taille modeste où les économies d'échelle demeurent difficiles », souligne-t-il ainsi. Reste que, s'il reconnaît la qualité du travail effectué par les personnels de la PJJ - en dépit de ce manque de moyens et de reconnaissance -, le sénateur s'interroge sur les concepts éducatifs en vigueur au sein des services et, surtout, sur « l'opposition entre sanction et mesure éducative » et « l'incompatibilité entre contrainte et travail éducatif ». « J'ai le sentiment qu'une espèce de laxisme s'est installé, depuis la guerre, à l'égard des jeunes. On en est arrivés à les prendre pour des adultes. Le résultat c'est qu'on leur a laissé faire un peu ce qu'ils veulent, que ce soit dans la famille, à l'école ou ailleurs. Je suis plus pour l'éducation que pour la punition mais l'une ne va pas sans l'autre  » , a expliqué le sénateur lors de l'entretien qu'il a accordé aux ASH . Or, précise-t-il dans son rapport, si la primauté donnée à l'action éducative est une conception « tout à fait respectable » , « il apparaît qu'une grande partie de l'opinion publique attend, dans le suivi des délinquants, une contrainte accrue, même s'il ne s'agit pas d'enfermement » . De même s'alarme-t-il de la « fragilité structurelle » de la PJJ en matière de formation professionnelle et, surtout, d'hébergement. « Il apparaît que les fonctions d'hébergement entraînent une usure parfois rapide chez les professionnels, dont beaucoup fuient ce secteur dès qu'ils en ont la possibilité » , constate-t-il, affirmant que « l'identité de la PJJ s'est opérée sur l'hébergement » et que « l'abandon de cette spécificité [...] risquerait de susciter des interrogations sur la place de cette administration au sein du ministère de la Justice » . Autres difficultés évoquées au fil du rapport : le difficile partenariat entre la PJJ et le secteur psychiatrique, la faiblesse du nombre des juges des enfants, l'absence d'un statut des directeurs PJJ « correspondant à leurs responsabilités » et le risque de cloisonnement entre les dispositifs de protection administratif et judiciaire.

Au final, Michel Rufin présente près d'une trentaine de propositions articulées autour de trois axes. Sur le rôle de l'Etat et les missions de la PJJ, il préconise, notamment, de développer la protection administrative de l'enfance et la prévention spécialisée afin de limiter « les tendances à judiciariser trop rapidement les situations à risques ». Plus généralement, il recommande de développer les instances de concertation et le partenariat entre les différentes institutions engagées dans la protection de l'enfance : conseils généraux, Etat (Education nationale, Affaires sociales, PJJ), juridictions... Dans le domaine des modes d'intervention judiciaire et de la prise en charge des mineurs, le rapporteur plaide en faveur d'une amélioration « sensible » de la situation des mineurs détenus, tant au niveau des conditions de détention que concernant la préparation à la sortie. Il juge également nécessaire d'instaurer « un traitement systématique et rapide de la primo-délinquance par le parquet », proposant notamment, à cet effet, la création de «  délégués du procureur de la République » chargés d'intervenir rapidement auprès des jeunes délinquants et de leur famille. De même, il souhaite une saisine plus précoce des juges des enfants. Par ailleurs, à propos des jeunes d'origine étrangère présents dans les foyers PJJ, le sénateur de la Meuse recommande de faciliter leur intégration en «  favorisant une meilleure formation des professionnels » à leur culture. Et pour ceux dont la situation ne peut être régularisée, il conseille «  de créer des services éducatifs chargés de préparer, dans une optique de valorisation, le retour dans le pays d'origine ». Enfin, concernant le fonctionnement de la PJJ, Michel Rufin, qui note «  la quasi-absence de culture administrative à la DPJJ », fixe deux objectifs prioritaires :l'achèvement de la territorialisation (avec, en particulier, la reconnaissance et la légitimation du corps des directeurs et la création d'un équipement départemental minimum) et l'amélioration de la gestion (mise en place d'éducateurs «  volants », fusion de certains corps professionnels...). Enfin, s'inquiétant de la féminisation du corps des éducateurs, il suggère de fixer, au niveau des foyers d'hébergement, à 50 % la proportion minimale d'hommes parmi les personnels éducatifs.

Notes

(1)  Actuellement non diffusé, ce rapport devrait être publié par La Documentation française.

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