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L'avant-projet de loi « cohésion sociale » devant le CES

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Le gouvernement devait transmettre, cette fin de semaine, au Conseil économique et social  (CES), son avant-projet de loi « relatif au renforcement de la cohésion sociale ». Ce texte attendu de très longue date par les associations, et qui avait été promis par le candidat Chirac pour « réduire la fracture sociale », est assorti d'un programme d'action qui liste des mesures à caractère non législatif (décrets, circulaires...) et dont certaines ont été annoncées dans le projet de budget (voir ce numéro). Après l'avis du CES qui devrait se prononcer les 23 ou 30 octobre, le projet de loi devra être adopté en conseil des ministres, pour être ensuite examiné par le Parlement début 1997.

Fondé notamment sur l'activation des dépenses passives, l'avant-projet libère les départements de leur obligation d'affectation des 20 % à l'insertion des titulaires du RMI. Ce qui inquiète d'ores et déjà certains qui craignent que « l'on déshabille Pierre pour habiller Paul ». Les associations de solidarité (le collectif Alerte et l'Association contre la précarité et l'exclusion) attendent cependant le 2 octobre pour s'exprimer plus largement sur l'ensemble du texte.

L'avant-projet, qui se réclame du rapport de Geneviève de Gaulle-Anthonioz présenté l'an dernier devant le CES (1), devrait, selon nos dernières informations, comporter une cinquantaine d'articles articulés autour de quatre titres, étant précisé que l'universalisation de l'assurance maladie, la réforme de la loi de 1975 et le travail social feront l'objet de lois ultérieures.

L'accès aux droits

Parmi les mesures devant favoriser l'accès aux droits civiques et sociaux, le projet devrait organiser le droit de vote pour les personnes sans domicile fixe et affirmer le droit à l'accueil en famille dans les établissements d'hébergement. Une « veille permanente sur le dispositif d'accueil d'urgence » devrait être instituée via l'obligation, faite aux établissements, de déclarer leurs places vacantes. Il devrait également consacrer la représentation des associations de solidarité dans les organismes de protection sociale.

Dans le domaine de l'emploi et de l'insertion, le gouvernement affiche un objectif volontariste, puisqu'il entend créer 300 000 emplois d'utilité sociale en cinq ans. Les bénéficiaires de minima sociaux (revenu minimum d'insertion, allocation de solidarité spécifique, allocation de parent isolé), estime le gouvernement, sont aujourd'hui « très insuffisamment orientés vers une activité professionnelle durable ». Aussi, s'inscrivant dans une logique d'activation des dépenses passives, veut-il « transformer en salaire d'activité, une allocation d'assistance », via les contrats d'initiative locale   (CIL). Selon ses calculs, pour 300 000 CIL, 12,8 milliards de francs en année pleine seraient ainsi dégagés au profit des politiques d'insertion et de lutte contre l'exclusion. S'apparentant aux contrats emploi consolidé (2), les CIL, emplois d'intérêt général exercés dans le secteur non marchand (aide aux familles, aux personnes âgées, agents d'environnement...), devraient avoir une durée de 30 heures par semaine minimum, et être rémunérés sur la base du SMIC.

Le gouvernement entend par ailleurs mettre en place un « itinéraire personnalisé d'insertion professionnelle » pour les jeunes de moins de 26 ans les plus en difficulté, en faisant peser une obligation de résultat sur les organismes chargés de les recevoir. Objectif visé : toucher 10 000 jeunes par an. Il prévoit également d'augmenter de « 50 % en cinq ans les capacités du secteur de l'insertion par l'activité économique », mais dans le secteur marchand seulement.

Des dispositions viennent également renforcer l'accès aux soins et au logement - un secteur où les arbitrages ont été particulièrement difficiles - ainsi que le dispositif institutionnel de lutte contre l'illettrisme.

Les institutions de l'insertion et de la lutte contre l'exclusion

A côté de la création d'un observatoire permanent de la pauvreté et de l'exclusion sociale, les dispositions inscrites dans l'avant-projet de loi visent à coordonner les politiques locales de l'insertion et de la lutte contre l'exclusion. Ainsi, le nouveau conseil départemental de l'insertion et de la lutte contre l'exclusion (Codile) devrait se substituer à l'actuel CDI et au comité départemental de l'insertion par l'économique. Il devrait être chargé d'élaborer le plan départemental d'insertion et de lutte contre l'exclusion (PDILE) qui, lui-même, se substituera à quatre plans : le PDI, le plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées, le schéma départemental des gens du voyage et celui des CHRS. Une conférence des programmes regroupant l'ensemble des financeurs, y compris les communes, devrait être instituée pour mettre en œuvre le PDILE et en suivre l'exécution. Au niveau local, des commissions locales de l'insertion et de la lutte contre l'exclusion (CLILE) verraient leurs missions élargies par rapport aux CLI actuelles. Une conférence des présidents des CLILE serait instituée en vue d'harmoniser la jurisprudence notamment en matière de contrats d'insertion.

S'agissant du financement de l'insertion, le raisonnement tenu par le gouvernement est le suivant : les économies ou les plus-values réalisées par les collectivités territoriales et les organismes de protection sociale, grâce à l'activation de minima sociaux, seront mobilisées au profit de l'ensemble des politiques locales d'insertion et de lutte contre l'exclusion. Ainsi est-il prévu de libérer les départements de l'obligation d'affecter 20 % des crédits RMI à l'insertion des allocataires. Ceux-ci pouvant alors déployer ces sommes en faveur des actions d'insertion inscrites au plan départemental, c'est-à-dire en direction de tous les publics démunis. De son côté, le préfet serait doté de crédits libres d'emploi lui permettant d'adapter et d'animer les politiques locales.

La formation des travailleurs sociaux

Ainsi que nous l'annoncions (3), l'avant-projet de loi vise à conforter l'assise juridique et financière des centres de formation. Objectif affiché : augmenter la capacité de ces derniers.

La loi réaffirmera ainsi un certain nombre de principes : compétence du ministère chargé des affaires sociales, coordination des formations initiales, continues et supérieures, participation des centres de formation au développement de la recherche en travail social et à l'évolution des pratiques sociales, renforcement du partenariat avec les employeurs. Elle devrait préciser également les principes de financement des centres : contractualisation, proportionnalité des moyens aux missions et projets...

Des institutions sociales et médico-sociales

L'avant-projet de loi de cohésion sociale devrait prévoir « une refonte du cadre juridique et financier » des CHRS afin de l'adapter « aux nouvelles formes d'interventions sociales dans la lutte contre l'exclusion ». Le gouvernement entend ainsi « élargir la mission des CHRS à l'insertion professionnelle et à l'urgence ». C'est-à-dire que les centres d'adaptation à la vie active  (CAVA) ainsi que certains lieux d'accueil de jour et d'hébergement d'urgence -qui fonctionnent actuellement en dehors de tout cadre législatif et réglementaire - pourraient être reconnus au titre de la loi du 30 juin 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales.

Les dispositions envisagées visent ainsi un triple objectif : étendre la définition et les missions des institutions sociales et médico-sociales « en reconnaissant la qualification d'institution sociale aux nouvelles formes d'action utilisées dans la lutte contre l'exclusion »   assujettir ces institutions aux procédures de la loi sociale de 1975  redéfinir les conditions techniques d'autorisation et de fonctionnement des CHRS « au regard de leurs missions élargies, clientèles accueillies, objectifs poursuivis et moyens à mettre en œuvre pour les atteindre, modalités financières ».

Cette réforme des textes devrait être accompagnée de l'attribution de moyens supplémentaires inscrits dans le projet de loi de finances 1997.

Notes

(1)  Voir ASH n° 1935 du 14-07-95.

(2)  Voir ASH n° 1978 du 7-06-96.

(3)  Voir ASH n° 1989 du 20-09-96.

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