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La loi relative à l'adoption

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Justifiée par des difficultés d'application voire des inadaptations de la législation en vigueur, la loi du 5 juillet simplifie les conditions de l'adoption, aménage les dispositions relatives au secret des origines et renforce les droits sociaux des adoptants.

En prenant en compte plus particulièrement l'intérêt de l'enfant, la loi du 11 juillet 1966 a jeté les bases du dispositif de l'adoption en distinguant l'adoption simple et l'adoption plénière. Depuis cette loi, les dispositions relatives à la filiation adoptive n'ont été que peu modifiées. Ainsi, la loi du 22 décembre 1976 a assoupli les conditions de l'adoption, celle du 6 juin 1984 en a modifié les procédures tandis que la loi du 6 janvier 1986 a tiré les conséquences de la décentralisation en matière d'aide sociale à l'enfance. Enfin, la loi du 8 janvier 1993 relative à l'état civil, à la famille et aux droits de l'enfant et instituant le juge aux affaires familiales (1) a notamment consacré le droit pour la mère de demander, lors de son accouchement, que le secret de son admission et de son identité soit préservé.

Pourtant, comme l'a souligné le professeur Jean-François Mattei (député UDF des Bouches-du-Rhône), « les modalités et la perception de l'adoption ont beaucoup évolué au cours des 15 dernières années » (Rap. A. N. n° 2449, Mattei). Première évolution, la baisse continue du nombre des pupilles de l'Etat qui, de plus de 10 000 en 1985, s'élève à moins de 4 000 aujourd'hui. Autre tendance, l'accroissement de l'adoption dite internationale  sur les 4 000 adoptions réalisées, les deux tiers concernent en effet des enfants étrangers.

Face à ces évolutions, il devenait nécessaire de modifier la législation en vigueur. L'occasion également pour le gouvernement de pallier les difficultés et inadaptations du dispositif, et de tirer les conséquences en droit français des dispositions de la convention de La Haye du 29 mai 1993 qui devrait être prochainement ratifiée. C'est dans cet esprit qu'Edouard Balladur, alors Premier ministre, a confié, en juillet 1994, au professeur Mattei une mission de réflexion sur l'adoption. Celle-ci a donné lieu en janvier 1995 à un rapport intitulé Enfant d'ici, enfant d'ailleurs, l'enfant sans frontières  (2). Vingt-quatre propositions à l'origine de la loi du 5 juillet dernier. Un texte qui modifie le code civil, le code de la famille et de l'aide sociale  (CFAS), le code de la sécurité sociale et le code du travail afin« de rendre les conditions et les procédures d'adoption plus simples, plus sûres et plus justes », selon les termes de Jean-François Mattei. Mais qui a suscité bon nombre de réserves, notamment de la part de certaines associations d'anciens pupilles qui réclamaient l'accès à leurs origines (3).

La loi du 5 juillet assouplit les conditions de l'adoption (première partie) et facilite l'accès des pupilles de l'Etat à leurs origines (deuxième partie). Enfin, elle assimile les droits sociaux des parents adoptifs à ceux accordés aux familles lors de la naissance d'un enfant (troisième partie).

Plan du dossier

Dans le numéro 1987 du 6 septembre 1996, page 13 :
Première partie :L'adoption

• Les conditions de l'adoption

• La procédure d'agrément
Dans ce numéro :
L'adoption (suite)

• La procédure d'adoption
- Le placement en vue de l'adoption
- Le jugement d'adoption

• Les effets de l'adoption
- Les effets de l'adoption plénière - Les effets de l'adoption simple

• La révocabilité de l'adoption
- Dans le cas de l'adoption plénière - Dans le cas de l'adoption simple - Possibilité de prononcer une adoption simple après une adoption plénière
A paraître :
Deuxième partie : Le secret des origines
Troisième partie : Les droits sociaux de la famille adoptante
Quatrième partie : Mesures diverses

L'adoption

En droit français, l'adoption résulte nécessairement d'un jugement prononcé par le tribunal de grande instance à la demande des parents adoptifs (requérants). Il existe deux formes légales d'adoption : l'adoption plénière et l'adoption simple, toutes deux créatrices d'un lien de filiation mais dont les effets diffèrent :

• l'adoption plénière supprime tout lien de parenté entre l'adopté et sa famille par le sang. L'adopté a les mêmes droits et les mêmes obligations qu'un enfant légitime. C'est une filiation substitutive 

• l'adoption simple permet à l'adopté de conserver des liens avec sa famille d'origine. C'est une filiation additive. Elle est révocable (pour motifs graves).

La loi modifie certaines conditions requises pour l'adoption plénière et,  par extension, pour l'adoption simple. En outre, pour accueillir des pupilles de l'Etat et des enfants étrangers, les adoptants doivent être agréés.

Les conditions de l'adoption

Conditions tenant aux adoptants

Les conditions relatives aux adoptants sont communes à l'adoption plénière et à l'adoption simple. Reprenant en ce sens les propositions du professeur Mattei, la loi assoUplit les conditions d'âge et de durée du mariage.

CONDITIONS D'ÂGE

Pour des époux adoptant conjointement

L'adoption peut être demandée par deux époux non séparés de corps (art. 343 modifié du code civil)  :

• mariés depuis plus de 2 ans(contre 5 ans précédemment)  

• ou lorsque chacun des époux est âgé de plus de 28 ans (contre 30 ans précédemment) alors même qu'ils sont mariés depuis moins de 2 ans.

Pour l'adoptant agissant seul

Une personne seule (célibataire ou mariée agissant individuellement) peut également demander à adopter un enfant. Dans ce cas, elle doit être âgée de plus de 28 ans, quelle que soit sa situation de famille. Toutefois, si l'adoptant est marié et non séparé de corps, le conjoint doit y consentir à moins qu'il soit dans l'impossibilité de manifester sa volonté (art. 343-1 al. 1ermodifié du code civil).
Rappelons qu'aucune condition d'âge n'est exigée de la personne qui adopte l'enfant de son conjoint (art. 343-2 non modifié du code civil).
A noter : un couple vivant en concubinage ne peut donc adopter conjointement un enfant. L'enfant adopté ne peut l'être que par l'un des concubins, sa filiation n'étant établie qu'au regard du seul adoptant.

DIFFÉRENCE D'ÂGE AVEC LES ENFANTS

Les adoptants doivent avoir 15 ans de plus que les enfants qu'ils se proposent d'adopter (10 ans si les enfants adoptés sont ceux de leur conjoint).

Toutefois le tribunal peut, s'il y a de justes motifs, prononcer l'adoption lorsque la différence d'âge est inférieure à 15 ans (ou 10 ans) (art. 344 non modifié du code civil).

Conditions tenant aux adoptés

Les conditions relatives aux adoptés en la forme simple ou plénière restent sensiblement différentes.

ÂGE DE L'ENFANT

Si l'adoption simple est permise quel que soit l'âge de l'adopté (art. 360 al. 1er non modifié du code civil), sans placement préalable, l'adoption plénière n'est en principe permise que pour des enfants âgés de moins de 15 ans accueillis au foyer du ou des adoptants depuis au moins 6 mois (art. 345 al. 1er non modifié du code civil). Elle est également possible pendant toute la minorité de l'enfant et désormais dans les 2 ans qui suivront sa majorité, si l'enfant de plus de 15 ans :

• a été accueilli avant d'avoir atteint l'âge de 15 ans par des personnes ne remplissant pas alors les conditions légales pour adopter 

• a fait l'objet d'une adoption simple avant d'avoir atteint l'âge de 15 ans (art. 345 al. 2 modifié du code civil).
Enfin, l'enfant de plus de 13 ans doit consentir personnellement à son adoption, qu'elle soit simple ou plénière (art. 345 al. 3 et art. 360 dernier alinéa non modifiés du code civil). Conformément à la jurisprudence, si le mineur n'est pas en mesure de donner son consentement, un administrateur « ad hoc » peut être nommé aux fins de consentir à l'adoption au nom de l'enfant.

LIEN AVEC L'ADOPTANT

Des atténuations aux restrictions à l'adoption plénière de l'enfant du conjoint sont apportées par la loi. Alors qu'en principe l'adoption plénière de l'enfant du conjoint n'est permise que lorsque cet enfant n'a de filiation légalement établie qu'à l'égard de ce conjoint, elle est désormais également autorisée (art. 345-1 modifié du code civil)   :

• lorsque l'autre parent que le conjoint s'est vu retirer totalement l'autorité parentale 

• lorsque l'autre parent que le conjoint est décédé, à condition qu'il n'ait pas laissé d'ascendants au premier degré (c'est-à-dire en l'absence de grands-parents, et ce afin de ne pas couper les liens les unissant à leurs petits-enfants) ou lorsque ces derniers se sont manifestement désintéressés de l'enfant.

ABSENCE D'ADOPTION ANTÉRIEURE

Nul ne peut avoir déjà été adopté par plusieurs personnes, si ce n'est par deux époux (art. 346 non modifié du code civil). Toutefois, une nouvelle adoption, plénière ou simple, peut être prononcée soit :

• après le décès du ou des deux adoptants 

• après le décès de l'un des deux adoptants, si la demande est présentée par le nouveau conjoint du survivant.

CATÉGORIES D'ENFANTS ADOPTABLES

1°)  Les enfants pour lesquels les père et mère ou le conseil de famille ont valablement consenti à l'adoption

Sont visés :

• les enfants légitimes ou naturels reconnus par leurs deux parents 

• les enfants dont la filiation n'est établie qu'à l'égard d'un de ses parents 

• les enfants dont les père et mère sont décédés ou dans l'impossibilité de manifester leur volonté ou ont perdu leurs droits d'autorité parentale, ainsi que les enfants dont la filiation est inconnue.

2°)  Les pupilles de l'Etat

Dans un souci d'harmonisation avec les dispositions du code civil relatives au délai de rétractation du consentement à l'adoption, les délais d'admission en qualité de pupille de l'Etat, prévus dans le code de la famille et de l'aide sociale, sont réduits.

Sont désormais admis en qualité de pupilles de l'Etat (art. 61 modifié du CFAS) :

• les enfants dont la filiation n'est pas établie ou est inconnue, qui ont été recueillis par le service de l'aide sociale à l'enfance  (ASE) depuis plus de 2 mois, contre 3 précédemment. Ce sont pour la plupart des enfants dont la mère a choisi d'accoucher dans l'anonymat ou des enfants trouvés sur la voie publique 

• les enfants dont la filiation est établie et connue, qui ont expressément été remis au service de l'ASE en vue de leur admission comme pupilles de l'Etat par les personnes qui ont qualité pour consentir à leur adoption, depuis plus de 2 mois (au lieu de 3 jusqu'ici)  

• les enfants dont la filiation est établie et connue, qui ont expressément été remis au service de l'ASE depuis plus de 6 mois (au lieu d'un an) par leur père ou leur mère en vue de leur admission comme pupilles de l'Etat et dont l'autre parent n'a pas fait connaître au service, pendant ce délai, son intention d'en assumer la charge 

• les enfants orphelins de père et de mère pour lesquels la tutelle n'est pas organisée et qui ont été recueillis par le service de l'ASE depuis plus de 2 mois (contre 3 mois précédemment)   ;

• les enfants dont les parents ont fait l'objet d'un retrait total de l'autorité parentale(ex-déchéance de l'autorité parentale, voir un prochain numéro) et qui ont été recueillis par le service de l'ASE 

• les enfants recueillis par l'ASE suite à une déclaration judiciaire d'abandon (voir ci-contre).
Rappel : les enfants admis en qualité de pupilles de l'Etat sont placés sous la tutelle du préfet, lequel est assisté par le conseil de famille (voir encadré). La garde des enfants est assurée sous le contrôle des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance, les enfants étant placés soit chez une assistante maternelle salariée, soit en établissement. Le fait d'être pupille de l'Etat ne modifie pas la filiation : l'enfant continue à « appartenir » à sa famille. Ses parents, dont il garde le nom et qui peuvent éventuellement le reprendre, restent tenus à l'obligation alimentaire (art. 83 non modifié du CFAS). Seules les modalités d'exercice de l'autorité parentale sont modifiées.

Les pupilles de l'Etat ne doivent pas être confondus avec les pupilles de la nation. Peuvent être déclarés pupilles de la nation par un jugement du tribunal d'instance, les enfants dont le père, la mère ou le soutien de famille a disparu ou a subi une diminution de la capacité de travail du fait de la guerre. Ces enfants bénéficient d'un soutien matériel de l'office départemental des anciens combattants et victimes de guerre.

3°)  Les enfants déclarés judiciairement abandonnés

L'enfant recueilli par un particulier, un établissement ou un service d'aide sociale à l'enfance, dont les parents se sont manifestement désintéressés pendant l'année qui précède l'introduction de la demande en déclaration d'abandon, est déclaré abandonné par le tribunal de grande instance  (TGI). Le tribunal a donc l'obligation (et non plus seulement la faculté) de déclarer l'enfant abandonné, sauf en cas de grande détresse des parents (art. 350 al. 1er modifié du code civil). Une notion utilisée « pour désigner des raisons économiques », selon Lucien Neuwirth, rapporteur au Sénat.
Toutefois, l'enfant n'est pas déclaré abandonné lorsqu'un membre de la famille a demandé, au cours du délai d'un an, à assumer la charge de l'enfant et que cette demande est jugée conforme à l'intérêt de ce dernier (art. 350 al. 4 non modifié du code civil).
A noter : sont considérés comme s'étant manifestement désintéressés de leur enfant les parents qui n'ont pas entretenu avec lui les relations nécessaires au maintien de liens affectifs. La simple rétractation du consentement à l'adoption, la demande de nouvelles ou l'intention exprimée mais non suivie d'effets de prendre l'enfant n'est pas une marque d'intérêt suffisante pour motiver de plein droit le rejet d'une demande en déclaration d'abandon. Ces démarches n'interrompent pas le délai d'un an(art. 350 al. 2 et 3 non modifiés du code civil).

CONSENTEMENT À L'ADOPTION ET À L'ABANDON

1°)  Pour les enfants pour lesquels les père et mère ou le conseil de famille ont valablement consenti à l'adoption

Qui donne le consentement ?

•  Lorsque la filiation d'un enfant (légitime ou naturel) est établie à l'égard de son père et de sa mère, l'un et l'autre doivent consentir à l'adoption. Si l'un des deux époux est mort ou dans l'impossibilité de manifester sa volonté ou s'il a perdu ses droits d'autorité parentale, le consentement de l'autre suffit (art. 348 non modifié du code civil).

•  Lorsque la filiation d'un enfant n'est établie qu'à l'égard d'un de ses parents, celui-ci donne le consentement à l'adoption(art. 348-1 non modifié du code civil).

•  Le consentement est donné par le conseil de famille, après avis de la personne qui en fait prend soin de l'enfant, lorsque les père et mère de l'enfant sont décédés, dans l'impossibilité de manifester leur volonté ou ont perdu leurs droits d'autorité parentale. Le consentement est également donné par le conseil de famille lorsque la filiation de l'enfant n'est pas établie(art. 348-2 non modifié du code civil).

Comment est donné le consentement ?

Le consentement à l'adoption est donné devant :

• le greffier en chef du tribunal d'instance du domicile ou de la résidence de la personne qui consent 

• un notaire français ou étranger 

• l'agent diplomatique ou consulaire français.
Le consentement peut également être reçu par le service de l'aide sociale à l'enfance lorsque l'enfant lui a été remis (art. 348-3 al. 1er non modifié du code civil).

Le consentement à l'adoption des enfants de moins de 2 ans n'est valable que si l'enfant a été effectivement remis au service de l'ASE ou à un organisme autorisé pour l'adoption (précédemment intitulé « œuvre d'adoption », voir un prochain numéro). Cette obligation ne joue pas dans le cas où il existe, entre l'adoptant et l'adopté, un lien de parenté ou d'alliance jusqu'au 6e degré inclus (art. 348-5 modifié du code civil).

Qui choisit l'adoptant ?

Lorsque les père et mère ou le conseil de famille consentent à l'adoption de l'enfant en le remettant au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un organisme autorisé pour l'adoption, le choix des adoptants éventuels est désormais assuré (dans un souci d'harmonisation avec les dispositions de l'article 63-1 nouveau du CFAS, voir) par le seul tuteur de l'enfant. Toutefois, la décision du tuteur est soumise à l'accord du conseil de famille des pupilles de l'Etat ou du conseil de famille de la tutelle organisée à l'initiative de l'organisme autorisé pour l'adoption (art. 348-4 modifié du code civil). Un dispositif qui« revient en fait à écarter la faculté pour le ou les parents de faire connaître leur choix de l'adoptant », afin notamment d'éviter « le risque de fraude en cas de demande émanant d'une mère porteuse avec laquelle un contrat illicite aurait été passé » (Rap. Sén. n° 295, Dejoie). Ce tuteur auquel est confié le choix de l'adoptant serait, selon le rapport parlementaire, le préfet de département lorsque l'enfant a été abandonné, est né de parents inconnus ou est orphelin.

Comment revenir sur le consentement ?

Afin de permettre aux parents de revenir sur leur décision, le consentement à l'adoption peut être rétracté pendant une certaine période. Toutefois, pour assurer le placement plus rapide de l'enfant en vue de son adoption, la rétractation est désormais possible :

• pendant 2 mois (contre 3 mois précédemment) par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée à la personne ou au service qui a reçu le consentement à l'adoption. La remise de l'enfant à ses parents sur demande même verbale vaut également preuve de la rétractation 

• après l'expiration du délai de 2 mois, si le consentement n'a pas été rétracté, les parents peuvent encore demander la restitution de l'enfant à condition que celui-ci n'ait pas été placé en vue de l'adoption. Si la personne qui l'a recueilli refuse de le rendre, les parents peuvent saisir le tribunal qui apprécie, compte tenu de l'intérêt de l'enfant, s'il y a lieu d'en ordonner la restitution. La restitution rend caduc le consentement à l'adoption (art. 348-3 al. 2 et 3 modifiés du code civil).
A noter : le tribunal peut prononcer l'adoption s'il estime abusif le refus de consentement opposé par les parents légitimes et naturels, ou par l'un d'entre eux seulement, lorsqu'ils se sont désintéressés de l'enfant au risque d'en compromettre la santé ou la moralité. Il en est de même en cas de refus abusif de consentement du conseil de famille (art. 348-6 non modifié du code civil).

La tutelle des pupilles de l'Etat

L'article 60 du CFAS qui détermine les organes chargés de la tutelle des pupilles de l'Etat et leurs attributions est modifié sous trois aspects.

Consultation des pupilles de l'Etat sur le lieu et le mode de placement envisagé

Avant toute décision du président du conseil général relative au lieu et au mode de placement des pupilles de l'Etat, outre l'accord du tuteur - le préfet de département ou son représentant - et celui du conseil de famille, l'avis du mineur doit être recueilli « dans les conditions prévues à l'article 58 du CFAS »  ; ce dernier article spécifiant que le service de l'aide sociale à l'enfance examine avec le mineur toute décision le concernant et recueille son avis.
La loi introduit la notion de « mineur capable de discernement », déjà reconnue par le code civil (art. 388-1 non modifié), en permettant désormais à ce dernier non pas de donner simplement son avis mais d'être, en outre, entendu par le tuteur ou son représentant, et par le conseil de famille ou l'un de ses membres désignés par lui à cet effet. La loi tire ainsi toutes les conséquences de la Convention internationale des droits de l'Enfant ratifiée par la France le 27 juin 1990, dont l'article 12 dispose : « Les Etats parties garantissent à l'enfant qui est capable de discernement le droit d'exprimer librement son opinion sur toute question l'intéressant, les opinions de l'enfant étant dûment prises en considération eu égard àson âge et à son degré de maturité. »

Rôle du tuteur en cas de danger manifeste pour l'enfant

La possibilité offerte au préfet de prendre toutes les mesures d'urgence que l'intérêt de l'enfant exige lorsque le mineur se trouve dans une situation de danger manifeste (4) est désormais inscrite dans la loi .

Modalités de renouvellement du conseil de famille

Outre le préfet, le conseil de famille est chargé de la tutelle des pupilles de l'Etat. Les règles de fonctionnement du conseil de famille sont fixées par le décret du 23 août 1985.
Le conseil de famille, qui doit examiner au moins une fois par an la situation de chaque pupille, est composé de deux représentants du conseil général, deux membres d'associations familiales notamment issues de l'union départementale des associations familiales (UDAF) dont une association de familles adoptives, un membre d'une association d'assistantes maternelles et de l'association départementale d'entraide des pupilles et anciens pupilles de l'Etat, ainsi que deux personnalités qualifiées en raison de l'intérêt qu'elles portent à la protection de l'enfance et de la famille.
Estimant que la durée du mandat des membres des conseils de famille, jusqu'ici fixée à 3 ans, renouvelable une fois, était trop courte pour avoir une continuité dans le suivi des pupilles concernés et de leur avenir, les parlementaires l'ont portée à 6 ans, renouvelable une fois par moitié, et non plus en totalité. A titre transitoire, le mandat des membres du conseil de famille, nommés en totalité pour la première fois après le 8 juillet 1996 (date d'entrée en vigueur de la loi), est pour la moitié de ceux-ci de 3 ans et pour l'autre moitié de 6 ans. Les conditions d'application de cette disposition seront fixées par décret.

2°) Pour les pupilles de l'Etat

Quelle procédure d'admission ?

Comme précédemment, les enfants admis en qualité de pupilles de l'Etat doivent faire l'objet d'unprojet d'adoption dans les meilleurs délais. Le projet d'adoption consiste, d'une part à décider si l'adoption est la solution la mieux adaptée à la situation de l'enfant et, d'autre part, à choisir entre l'adoption plénière et l'adoption simple. Lorsque le tuteur considère que l'adoption n'est pas adaptée à la situation de l'enfant, il doit indiquer ses motifs au conseil de famille. Ce dernier, sur le rapport de l'ASE, s'assure de leur validité qui doit être confirmée à l'occasion de l'examen annuel de la situation de l'enfant. La définition du projet d'adoption, simple ou plénière suivant les circonstances particulières à la situation de l'enfant, ainsi que le choix des adoptants éventuels sont assurés par le tuteur, avec l'accord du conseil de famille (art. 63-1 nouveau du CFAS).

Par coordination avec la mesure relative à la consultation du pupille sur le lieu et le mode de placement (voir encadré), il est désormais prévu que le mineur« capable de discernement » est préalablement entendu par le tuteur, ou son représentant, et par le conseil de famille ou l'un de ses membres désigné par lui à cet effet.

Les dossiers des enfants pour lesquels aucun projet d'adoption n'est formé plus de 6 mois après leur admission en qualité de pupilles de l'Etat sont, sous forme non nominative, communiqués obligatoirement au ministre chargé de la famille par le tuteur qui indique les raisons de cette situation.

L'admission en qualité de pupille de l'Etat peut faire l'objet d'un recours formé par les personnes intéressées (parents, alliés de l'enfant...) devant le TGI, dans le délai de 30 jours suivant la date de l'arrêté du président du conseil général (art. 61 al. 8 modifié du CFAS).

Qui donne le consentement ?

Lorsque l'enfant est remis au service de l'ASE par ses père ou mère, ceux-ci doivent consentir à son adoption (art. 62 al. 8 non modifié du CFAS).
Pour les pupilles de l'Etat dont les parents n'ont pas consenti à l'adoption, le consentement est donné par le conseil de famille de ces pupilles (art. 349 non modifié du code civil)

3°)  Pour les enfants déclarés judiciairement abandonnés

Quand est introduite la demande en déclaration d'abandon ?

La demande en déclaration d'abandon est obligatoirement transmise par le particulier, l'établissement ou le service de l'ASE qui a recueilli l'enfant, à l'expiration du délai d'un an dès lors que les parents se sont manifestement désintéressés de l'enfant (art. 350 al. 1er modifié du code civil).

Qui prononce la décision d'abandon ?

La déclaration d'abandon est prononcée par le TGI qui, en même temps, délègue les droits d'autorité parentale sur l'enfant à l'ASE, à l'établissement ou au particulier qui a recueilli l'enfant ou à qui ce dernier a été confié. La tierce opposition n'est recevable qu'en cas de dol, fraude ou erreur sur l'identité de l'enfant (art. 350 al. 5 et 6 non modifiés du code civil).
A noter : l'article 69 (non modifié) du CFAS fait obligation au service de l'ASE de demander une déclaration judiciaire d'abandon à l'issue du délai d'un an qui suit la remise de l'enfant.

La procédure d'agrément

L'agrément est indispensable pour adopter un pupille de l'Etat. Il est également requis des candidats à l'adoption internationale lorsque leur demande n'est pas instruite par un organisme autorisé pour l'adoption. Seules les personnes à qui le service de l'aide sociale à l'enfance a confié les pupilles en sont dispensées, lorsque les liens affectifs qui se sont établis entre eux justifient cette mesure (assistantes maternelles principalement). Jean-François Mattei a rappelé lors des débats parlementaires que l'agrément « n'est pas une procédure de sélection entre les postulants, mais une vérification de l'absence de contre-indications à une démarche d'adoption du point de vue des conditions d'accueil en recherchant à écarter des situations susceptibles de présenter des dangers pour l'enfant » (Rap. A. N. n° 2449, Mattei).

Pour l'adoption des pupilles

L'agrément est accordé aux futurs adoptants par le président du conseil général (responsable du service de l'ASE) pour 5 ans, dans un délai de 9 mois à compter du jour de la demande.

Pour l'instruction de la demande, le président du conseil général fait procéder à toutes les investigations permettant « d'apprécier les conditions d'accueil que le demandeur est susceptible d'offrir à des enfants sur les plans familial, éducatif et psychologique » (art. 4 du décret n° 85-938 du 23 août 1985, J. O. du 5-09-85).

La loi apporte d'importantes modifications au régime de l'agrément des candidats à l'adoption, la principale innovation étant la reconnaissance à l'échelle nationale des décisions prises par les autorités départementales.

RECONNAISSANCE NATIONALE DE L'AGRÉMENT

En vertu de l'article 12 du décret n° 85-938 du 23 août 1985, toute personne bénéficiant d'un agrément dans son département de résidence peut formuler une demande d'agrément dans d'autres départements. Le président du conseil général fixe les conditions dans lesquelles il examine les demandes d'agrément de personnes agréées dans d'autres départements. En pratique, il apparaît que les postulants qui déménagent d'un département à un autre alors que leur demande est en cours d'instruction ou même acceptée sont, le plus souvent, conduits à recommencer l'intégralité de la procédure. En outre, « il apparaissait paradoxal que l'agrément puisse être reconnu sur un plan international, pour adopter des enfants étrangers, et ne soit pas considéré comme valable d'un département à l'autre » (Rap. Sén. n° 298, Neuwirth).

Pour mettre fin au véritable « parcours du combattant » des candidats à l'adoption et pallier les effets pervers de la décentralisation en cette matière, l'agrément, dont la délivrance continue de relever du département, acquiert une validité nationale.

Ainsi, lorsque les personnes agréées changent de département, leur agrément demeure valablesous réserve d'une déclaration préalable adressée au président du conseil général de leur nouveau département de résidence. Lorsque des personnes à qui un refus ou un retrait d'agrément a été notifié changent de département de résidence, ce retrait ou refus leur demeure opposable (art. 63 al. 7 nouveau du CFAS).
Les décisions relatives à l'agrément sont transmises sans délai par le président du conseil général au ministre chargé de la famille (art. 63 al. 8 nouveau du CFAS).

NOUVELLE DEMANDE D'AGRÉMENT

Tout refus ou retrait d'agrément doit être motivé.La loi précise désormais qu'après un refus ou un retrait d'agrément, le délai à partir duquel une nouvelle demande peut être déposée est de 30 mois (art. 63 al. 6 nouveau du CFAS). En l'absence de texte, nombre de départements considéraient que le délai applicable était le même que celui concernant la validité de l'agrément, soit 5 ans.

Accompagnement de l'enfant étranger adopté

Actuellement, l'enfant placé en vue d'adoption bénéficie d'un suivi des services de l'ASE s'il s'agit d'un pupille de l'Etat, ou de l'organisme concerné si le placement est intervenu par son intermédiaire. Pour les enfants qui sont adoptés directement dans leur pays d'origine, sans passer par l'intermédiaire d'un organisme, aucun suivi n'est expressément prévu. Or, la proportion d'adoptions internationales est prédominante (environ 2 500 contre 1 500 adoptions internes) et, parmi elles, celle des adoptions directes (environ 1 700 contre 800 adoptions par l'intermédiaire d'un organisme). Afin de combler cette lacune, la loi instaure un accompagnement à destination des enfants étrangers adoptés afin de leur permettre de « mieux s'intégrer » (art. 100-4 nouveau du CFAS). Ainsi, le mineur adopté ou placé en vue d'adoption bénéficie d'un accompagnement par le service de l'ASE ou par l'organisme autorisé ou habilité pour l'adoption pendant une durée de6 mois minimum à compter de son arrivée au foyer, et dans tous les cas jusqu'au prononcé de l'adoption plénière en France ou jusqu'à la transcription du jugement étranger. Cet accompagnement ne peut toutefois intervenir qu'à la demande ou avec l'accord de l'adoptant. Il en est de même de sa prolongation.

ADOPTANTS ÉTRANGERS

L'article 1er du décret n° 85-938 du 23 août 1985 précise que toute personne qui souhaite obtenir l'agrément doit s'adresser au responsable du service de l'aide sociale à l'enfance de son département de résidence. Les personnes qui ne résident pas en France doivent s'adresser au département où elles résidaient auparavant, ou dans un département dans lequel elles ont conservé des attaches. Jusqu'ici, aucune procédure n'était prévue concernant les étrangers sans attache en France.

Dans la perspective de la ratification par la France de la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, l'article 63 du CFAS introduit la possibilité d'adoption des pupilles de l'Etat, si tel est leur intérêt, par des personnes dont l'aptitude à les accueillir a été régulièrement constatée dans un Etat autre que la France, en cas d'accord international engageant à cette fin celle-ci et ledit Etat. L'accord implicitement visé par le législateur étant la convention de La Haye.

INSTITUTION D'UNE COMMISSION D'AGRÉMENT

En application du décret du 23 août 1985 (art. 6), l'agrément est donné par le président du conseil général après qu'aient été consultés de manière concomitante :

• l'agent responsable du service de l'aide sociale à l'enfance ou son représentant 

• deux personnes appartenant à ce service et ayant une compétence particulière dans le domaine de l'adoption 

• un membre d'un conseil de famille des pupilles de l'Etat du département.
Partant du onstat que, dans la plupart des départements, les quatre personnes concernées étaient consultées collégialement, la loi entérine cette pratique en créant, auprès des présidents des conseils généraux, une commission d'agrément (art. 63 al. 2 modifié du CFAS).

Celle-ci comprendra, notamment, deux membres d'un conseil de famille des pupilles de l'Etat du département, l'un assurant la représentation de l'union départementale des associations familiales  (UDAF), et l'autre celle de l'association départementale d'entraide entre les pupilles et anciens pupilles de l'Etat. Les membres de cette commission assurant la représentation de ces associations pourront se faire remplacer par leur suppléant.

Pour l'adoption des enfants étrangers

Auparavant, les personnes qui souhaitaient accueillir en vue de son adoption un enfant étranger devaient demander l'agrément.

Désormais, les personnes qui « accueillent » un enfant étranger en vue de son adoption devront « avoir obtenu » l'agrément du président du conseil général dans les mêmes conditions que pour les pupilles de l'Etat. Elles ne pourront donc plus se prévaloir d'une demande en cours d'instruction(art. 100-3 modifié du CFAS).

À SUIVRE...
Notes

(1)  Voir ASH n° 1831 du 7-05-93.

(2)  Voir ASH n° 1914 du 16-02-95.

(3)  Voir notamment ASH n° 1961 du 9-02-96, n° 1964 du 1-03-96 et n° 1975 du 17-05-96.

(4)  A noter : le décret n° 85-937 du 23 août 1985 relatif au conseil de famille des pupilles de l'Etat prévoit déjà « qu'en cas d'urgence, le tuteur peut prendre lui-même toutes dispositions utiles, sous réserve de les soumettre au conseil de famille et de s'enquérir de l'avis du mineur dans un délai de deux mois »

LES POLITIQUES SOCIALES

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