Alors que Pierre Pascal vient d'être chargé de présider le groupe de travail interministériel mis en place à la suite du rapport réalisé par Henri Cuq (1), l'Union nationale des associations gestionnaires de foyers de travailleurs migrants (UNAFO) met en garde contre les risques « d'amalgame entre population accueillie, clandestinité et non-droit ». En outre, elle publie une étude sur le vieillissement des résidents (2). Premier constat :s'il y a 20 ans, la population hébergée était masculine, jeune (30 ans en moyenne), active et étrangère, aujourd'hui elle est mixte, âgée (45 ans), inactive en majorité (1/3 occupe un emploi) et ses origines nationales sont variées (présence croissante de Français). L'analyse mettant en évidence les « multiples ruptures » de « ces nouveaux publics » et évoquant la question « extrêmement préoccupante » du chômage dans les foyers. Conséquence, le fossé grandissant entre « les insérés » et « les désinsérés ».
Autre constat : les migrants vieillissants en foyer (un tiers de la population a plus de 60 ans) sont bien souvent des résidents de longue date. Et qui, au cours des années passées dans ce type de structure, se sont bâtis « un mode de vie particulier, empreint de travail et d'économies et reposant pour une large part sur une vie communautaire ». La santé étant souvent la première raison avancée pour expliquer le fait qu'ils restent en France. L'étude d'évoquer aussitôt « le réel problème d'accessibilité aux soins » mais également les difficultés pour pouvoir bénéficier d'un hébergement adapté, comme les maisons de retraite. « Aussi les cas lourds sont-ils dirigés en dernier recours vers les structures hospitalières » , remarquent les auteurs. Ceux-ci évoquant, par ailleurs, la solidarité existant entre les résidents et les appréciations très positives des responsables de foyers envers les personnes vieillissantes, qui exercent une influence, selon eux, bénéfique pour l'équilibre du foyer.
Comment répondre aux problèmes complexes des migrants vieillissants dans les foyers ? « L'accès aux maisons de retraite est le premier point à résoudre » , souligne l'étude, qui ajoute que certains dispositifs tels que des services d'aide à domicile ou des petites unités de vie pourraient également répondre à leurs besoins. Tandis qu'elle fait état d'initiatives mises en place par les associations visant à « conforter les capacités physiques et mentales » des résidents, en matière notamment d'accompagnement social, de « suppléance à la perte d'autonomie », de modifications du bâti... « Sur les dix associations visitées, cinq sont prêtes à améliorer voire à renforcer l'accueil fourni », précisent les enquêteurs, citant certains de leurs projets.
Les gestionnaires de foyers, « malgré un contexte peu favorable », continuent à chercher à s'adapter aux situations, est-il indiqué en conclusion. Les auteurs soulignant que « l'accès au dispositif médical et médico-social est un problème qu'il convient de résoudre à l'aide de la réglementation en vigueur » mais non pas en créant « un droit parallèle ». « Ce n'est pas tant la transformation des foyers en établissements pour personnes âgées que les formules d'aide à domicile qui semblent répondre le mieux aux divers besoins », estiment-ils, ajoutant que les efforts menés par les associations doivent aujourd'hui recevoir un soutien des pouvoirs publics. Et surtout que « leur mission exacte » doit aujourd'hui être analysée avec précision. Enfin, réclament-ils un débat national autour de la situation des migrants vieillissants.
(1) Voir ASH n° 1972 du 26-04-96.
(2) Le vieillissement des résidents dans les foyers de travailleurs migrants : constats et propositions - UNAFO : 13, rue Brochant - 75017 Paris -Tél. (1) 46.27.23.99 - 80 F (port compris).