Si le niveau de vie des retraités s'est globalement amélioré depuis une vingtaine d'années (1), cette évolution masque en réalité de profondes disparités mises en lumière par l'étude sur la dépendance et l'isolement des personnes âgées publiée par l'Insee (2). En effet, le relatif bien-être des 60-75 ans contraste singulièrement avec la situation des plus de 75 ans. Il est vrai que jusqu'à cet âge, les personnes âgées vivent majoritairement en couple et disposent d'un revenu par unité de consommation souvent assez correct. Après 75 ans, elles se retrouvent généralement seules et leurs ressources diminuent. « La mort du conjoint déstabilise et fragilise la situation de la personne qui survit », constatent les enquêteurs de l'Insee. Une veuve sur quatre - puisque ce sont généralement les femmes qui restent seules - n'a en effet jamais exercé d'activité professionnelle et ne perçoit qu'une pension de réversion. Et pour celles qui ont travaillé, les droits à la retraite sont rarement élevés compte tenu des interruptions d'activité pour raisons familiales et de la faiblesse des salaires perçus. Conséquence : à l'âge de 80 ans, le revenu disponible d'une veuve est inférieur de 6 points à celui de l'ensemble des 80 ans et de 16 points à celui des plus de 60 ans.
Par ailleurs, on sait que passé 70 ans, les personnes âgées sont nombreuses à souffrir d'une perte d'autonomie physique. Ainsi, parmi les octogénaires vivant à domicile ou chez leurs enfants, plus de 30 % restent confinés en permanence et 8 % ne quittent pas leur fauteuil ou leur lit. Et cette dépendance commence parfois bien plus tôt :11 % des personnes de plus de 60 ans sont physiquement dépendantes et 1,7 % très dépendantes. D'où un besoin accru d'aide pour les tâches domestiques, assuré dans un cas sur trois par la famille.
Avec la fin de la vie active, ce sont donc non seulement les ressources mais aussi l'organisation du rythme de vie qui se trouvent progressivement modifiées. Et si certains retraités développent des activités culturelles ou sportives, ils sont nombreux à se retrouver isolés, socialement et familialement. Cette tendance ne faisant que s'accentuer avec l'âge. 11 % des octogénaires n'ont plus de contact avec leur famille, leurs amis ou leurs voisins. Un isolement très fréquent chez les célibataires qui n'ont pas d'enfants pour les entourer. Conclusion : à 80 ans, parmi les personnes vivant en logement ordinaire, 10 % ne sont pas autonomes et 31 % sont isolées, cumulant la dépendance et l'isolement.
(1) En 1995, le revenu disponible par unité de consommation, dans les ménages comportant au moins une personne de plus de 60 ans, était estimé, en moyenne, à 6 900 F par mois.
(2) Insee Première n° 447 - Avril 1996 - Marie-Gabrielle David et Christophe Starzec.