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Bénévolat et indemnisation chômage

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L'exercice d'une activité bénévole par un demandeur d'emploi est compatible avec l'indemnisation du chômage sous certaines conditions.Présentation d'un dispositif très encadré.

L'exercice d'une activité bénévole par un demandeur d'emploi n'est ni prévu ni interdit expressément par le code du travail. Il s'insère donc dans les conditions habituelles requises pour être inscrit à l'ANPE et bénéficier de l'assurance chômage. Ainsi, l'intéressé doit remplir trois conditions pour être indemnisé : la disponibilité immédiate, la recherche active d'emploi, l'absence d'une autre activité professionnelle.

La compatibilité de ces conditions avec l'exercice d'une activité bénévole est cependant complexe. En effet, le statut du demandeur d'emploi est régi par deux organismes, au régime différent (administratif pour l'ANPE, privé pour l'Assedic), d'où la compétence de deux types de juridictions (administratives pour le premier sous le contrôle du Conseil d'Etat,judiciaires pour le second sous le contrôle de la Cour de cassation).

Compatibilité de l'activité bénévole avec l'indemnisation chômage

Si le Conseil d'Etat considère que la condition de disponibilité immédiate n'empêche pas une activité bénévole, les notions proches de recherche active d'emploi et d'absence d'activité professionnelle sont, quant à elles, toujours vérifiées par l'ANPE, l'Unedic et les tribunaux.

Textes applicables

Article L. 351-16 et suivants, R. 351-26 et suivants du code du travail.

Règlement annexé à la convention d'assurance chômage du 1er janvier 1994 et directive Unedic n° 13-96 du 1er mars 1996.

Instruction ANPE n° 3090 du 26 avril 1994.

LE BÉNÉVOLAT N'A PAS D'INFLUENCE SUR LA CONDITION DE DISPONIBILITÉ

Une personne est réputée disponible pour occuper un emploi (art. R. 311-3-3 du code du travail)quand :

elle n'exerce aucune activité professionnelle, sauf des activités occasionnelles ou réduites (78 heures par mois au maximum) 

elle ne suit aucune action de formation professionnelle, sauf de manière limitée (40 heures au maximum ou par correspondance) 

sa situation personnelle lui permet d'occuper sans délai un emploi 

l'absence du domicile est signalée à l'ANPE et ne dépasse pas un certain quota(35 jours par an au maximum) 

le congé maladie ou l'incarcération est de courte durée (15 jours au maximum).

Le Conseil d'Etat a estimé dans un arrêt du 13 mai 1994 (1) que la condition de disponibilité immédiate vise uniquement « des activités rémunérées, à l'exclusion des activités exercées à titre bénévole ». En l'état actuel de la réglementation, les personnes qui exercent une activité non rémunérée ne peuvent donc être radiées de la liste des demandeurs d'emploi.

Une instruction de l'ANPE du 26 avril 1994 (2) prévoit d'ailleurs expressément que l'activité bénévole « n'est pas un obstacle à la condition de disponibilité immédiatetant pour occuper un emploi que pour répondre à toute convocation de l'agence ».

LE BÉNÉVOLAT NE DOIT PAS NUIRE À LA RECHERCHE ACTIVE D'EMPLOI

L'ANPE comme l'Unedic considèrent que l'activité bénévole est compatible avec l'inscription et l'indemnisation du chômage si cette activité ne gêne pas le chômeur dans sa recherche active d'emploi.

La Cour de cassation a ainsi reconnu qu'une activité d'enseignement bénévole 24 heures par semaine durant près de 2 années justifiait la récupération d'allocations indûment payées  (3).

La condition de recherche active d'emploi est satisfaite(art. R. 351-27 et 28 du code du travail) dès lors que deux conditions sont réunies :

cette recherche est effectuée de manière permanente 

elle se traduit en actes positifs,c'est-à-dire par « toutes démarches [...]en vue de se reclasser ou de s'insérer professionnellement,tant sur proposition des services de l'ANPE que de sa propre initiative ».

Le « caractère réel et sérieux de ces actes est apprécié différemment suivant la situation du demandeur d'emploi et la situation locale de l'emploi ». A ainsi été reconnu justifié le fait pour une personne d'effectuer peu d'actes positifs du fait de son état de santé et du faible nombre d'offres d'emploi correspondant à ses capacités (4).

Rappelons toutefois que les bénéficiaires de l'allocation unique dégressive (AUD) âgés d'au moins 57 ans et demi (55 ans pour les bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique), qui en ont fait la demande, sont dispensés de toute recherche active d'emploi, à charge pour eux d'informer l'Assedic de toute reprise d'activité, même non rémunérée.

LE BÉNÉVOLAT NE DOIT PAS CACHER UNE ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE

L'exercice d'une activité bénévole est possible s'il ne cache pas une activité professionnelle,c'est-à-dire, précise l'Unedic, si l'activité répond à deux conditions : l'absence de rémunération et la faible importance du temps qui lui est consacré.

En revanche, sont considérées commeprofessionnelles :

systématiquement, « touteactivité reprise chez l'ancien employeur, même si l'entreprise est constituée sous forme associative, et si les fonctions exercées ne sont pas rémunérées » ;

plus généralement, « toute activité exercée, dans le cadre d'un mouvement associatif, ayant pour effet de se substituer à une activité exercée par du personnel normalement destiné à se consacrer à l'activité administrative de l'association ou d'éviter le recrutement d'un tel personnel ».

L'activité bénévole ne doit donc être déclarée, selon l'Unedic, que si elle s'apparente à une activité professionnelle.

A noter : l'article L. 351-23 du code du travail prévoit expressément que le demandeur d'emploi indemnisé puisse exercer des tâches d'intérêt général,rémunérées ou non, pendant une durée limitée : 6 mois, à raison de 50 heures rémunérées par mois ou 80 heures non rémunérées. Ces tâches doivent être exercées au profit de collectivités publiques ou d'organismes privés à but non lucratif. Elles sont agréées et encadrées par le préfet du département.

Les sanctions

Les sanctions applicables, le cas échéant, peuvent être administratives ou civiles (radiation, suspension des allocations de chômage, récupération des trop-versés) ou pénales (en cas d'abus manifeste) (5).

INTERRUPTION DU VERSEMENT DES ALLOCATIONS

Plusieurs procédures sont possibles à l'initiative de l'ANPE, de l'administration du travail (art. R. 351-28 du code du travail) ou de l'Assedic, aboutissant au même résultat, l'arrêt du versement des allocations.

Concrètement, le service des allocations peut être interrompu :

directement par la commission paritaire de l'Assedic, « le jour où l'intéressé retrouve une activité professionnelle salariée ou non » (art. 79 du règlement d'assurance chômage). « En cas de doute sur le caractère professionnel ou bénévole d'une activité », la commission paritaire de l'Assedic a toute latitude de décision. « Si les circonstances dans lesquelles s'exerce l'activité permettent de considérer que l'activité bénévole est caractérisée, l'Assedic poursuit le service des prestations. En revanche, s'il s'avère que l'activité exercée revêt toutes les caractéristiques d'une activité professionnelle, la commission paritaire statue sur l'opportunité de maintenir ou non le versement des allocations » ;

sur décision du préfet,de façon définitive ou temporaire, si les services de contrôle - direction départementale du travail,de l'emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP) -constatent l'absence de recherche active d'emploi (art.R. 351-33 du code du travail). Le service de contrôle peut être saisi par l'ANPE, suite à une radiation de la liste des demandeurs d'emploi, ou par l'Assedic, ou procéder de sa propre initiative à une vérification.

A retenir

Le bénévolat est compatible avec l'indemnisation du chômeur quand deux conditions sont réunies :

l'activité bénévole ne gêne pas la recherche active d'emploi (activité réduite et non à temps complet) ;

elle ne cache pas une activité professionnelle (emploi dans un organisme à but lucratif ou chez l'ancien employeur même s'il s'agit d'une association).

RESTITUTION DES SOMMES INDÛMENT VERSÉES

L'Assedic peut également demander à l'intéressé de lui reverser les sommes indûment versées. Cette action peut être exercée durant un délai de 5 ans à compter du jour du versement de ces sommes. L'Assedic étant « en droit, sans être tenue à aucune autre preuve, d'en obtenir la restitution », même si, informée de l'exercice de l'activité bénévole, elle a continué à verser les allocations (6).

SANCTIONS PÉNALES

Le demandeur d'emploi peut se voir appliquer une peine d'amende de 25 000 F et d'emprisonnement de 2 mois, en cas de « fraude ou fausse déclaration pour obtenir des allocations d'aide aux travailleurs privés d'emploi » (art. L. 365-1 du code du travail). Cependant, à notre connaissance, la jurisprudence réserve cette sanction à dessituations particulièrement significatives d'abuscomme l'exercice à temps plein :

« dans un but intéressé, d'une activité professionnelle,même non salariée, qui met le bénéficiaire des prestations dans l'impossibilité de rechercher un autre emploi, [peu importe qu'il] ait ou non perçu des revenus provenant de son activité de gérant de société » (7) 

d'une activité empêchant d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi, tel le fait de s'occuper « d'une discothèque et du service de restauration exploités par une association de modélisme dont [l'intéressé] était le président de fait » (8).

Le contrôle des tribunaux

Pour statuer sur le cas du demandeur d'emploi, trois types de tribunaux peuvent être saisis.

La juridiction civile (tribunal d'instance ou de grande instance) peut être saisie pour estimer le bien-fondé de la décision de la commission paritaire de l'Assedic.

La juridiction pénale (tribunal correctionnel) est compétente en cas de fraude caractérisée.

Enfin, la juridiction administrative (tribunal administratif) peut également être compétente si la décision de la DDTEFP est attaquée.

Notes

(1) Conseil d'Etat, 13 mai 1994, CFDT PSTE - CFDT Rhône - CGT (Recueil Lebon, n° 137 753,137 754 et 141 522).

(2) Instruction ANPE n° 3090 du 26 avril 1994, voir ASH n° 1944 du 13-10-95.

(3) Cour de cassation, chambre sociale, 9 février 1994, Thanh Bau Ly (n° 675, RJS 3/94).

(4) Conseil d'Etat, 18 janvier 1991, ministère du Travail (RJS 3/91).

(5) Sur les procédures de radiation des listes de demandeurs d'emploi, de suspension ou d'exclusion de l'indemnisation et les voies de recours, voir ASH n° 1944 et 1945 des 13-10-95 et 20-10-95.

(6) Cour de cassation, 1re chambre civile, 11 avril 1995, Beigner (Bull. Civ. 1995 I n° 173).

(7) Cour de cassation, chambre criminelle, 7 avril 1994 (Bull. Crim. 1994 n° 145).

(8) Cour de cassation, chambre criminelle, 27 février 1996 (à paraître au Bull. Crim. 1996 n° 1047)

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