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L'expulsion pour impayés de loyers

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Avec la fin de la trêve hivernale, depuis le 15 mars, les expulsions ont repris. L'occasion de faire le point sur le déroulement de la procédure applicable en cas d'impayés de loyers, motif de loin le plus fréquemment invoqué.

La trêve hivernale, qui interdit toute expulsion entre le 1er novembre et le 15 mars, a pris fin. Toutefois, si l'expulsion, qui consiste dans la libération forcée d'un lieu habité ou d'un local servant à l'habitation principale, est autorisée pendant les 7 mois qui viennent, elle ne peut intervenir qu'après une décision du juge d'instance l'autorisant et uniquement sur intervention d'un huissier de justice.

Concrètement, l'expulsion peut être demandée pour non-paiement du loyer et des charges, du dépôt de garantie, ou pour non-souscription d'une assurance des risques locatifs. Autres cas : lorsque le locataire cause des troubles du voisinage, sous-loue son logement alors que le contrat de bail l'interdit, se maintient dans les lieux après le non-renouvellement du bail  (1), ou occupe un logement faisant l'objet d'un arrêté de péril.

Du règlement amiable à l'expulsion proprement dite, le bailleur peut faire valoir ses droits de propriété, tandis que le locataire peut avoir recours à différentes instances (Fonds de solidarité pour le logement, commission de surendettement, juge d'instance) pour défendre son « droit au logement ».

A noter  : sur plus de 132 000 demandes d'expulsion en 1993, environ 87 % ont été invoquées pour défaut de paiement du loyer ou des charges. Seul ce dernier cas d'expulsion est étudié ci-après.

Que faire avant l'expulsion ?

En tout état de cause, l'expulsion ne peut avoir lieu qu'en vertu d'une décision de justice ou d'un procès-verbal de conciliation exécutoire, et après commandement d'avoir à libérer les locaux. Toute expulsion sans titre exécutoire constitue une voie de fait et une violation de domicile entraînant la réintégration du locataire et le versement de dommages et intérêts.

Obtenir des délais de paiement...

En cas d'impayés, le bailleur adresse dans un premier temps au locataire un commandement de payer, notifié par l'huissier de justice, et indiquant le montant exact des loyers impayés. Le commandement doit reproduire, à peine de nullité, certaines mentions obligatoires telle la faculté pour le locataire de saisir le Fonds de solidarité pour le logement (FSL), dont l'adresse et les modalités de saisine devront être précisées par l'huissier.

A partir du commandement de payer, le locataire dispose de2 mois pour régulariser sa situation avant l'assignation devant le tribunal d'instance. Il peut mettre ce délai à profit pour :

négocier avec le propriétaire. A ce stade, un accord est encore possible entre le locataire et le propriétaire pour trouver une solution amiable. Pour être aidé, le locataire peut prendre contact avec sa mairie (CCAS ou BAS pour Paris), la CAF, la caisse de mutualité sociale agricole (CMSA), le service social départemental (assistante sociale), les services pré-contentieux des organismes HLM, les associations d'information sur le logement, de défense de locataires, de consommateurs... 

saisir le juge d'instance. Le locataire doit s'adresser au greffe du tribunal pour obtenir des délais de paiement et la suspension de la clause résolutoire du bail  (2), la saisine du juge devant se faire en référé. Le juge d'instance peut décider de reporter ou échelonner le paiement des sommes duesdans la limite de 2 ans, au regard de la situation du locataire et en considération des besoins du bailleur. Tout manquement au paiement entraînera la résiliation du bail 

saisir la commission départementale du FSL. Le locataire de bonne foi, logé dans le parc public ou privé, en situation d'impayés (de loyers ou de charges) peut bénéficier d'une aide financière du FSL pour permettre son maintien dans le logement (prêt pour l'apurement de sa dette) ou lui donner accès à un nouveau logement (prêts ou subventions pour caution et divers frais d'installation, garantie en cas de nouvel impayé de loyer). A noter, toutefois, la saisine du FSL ne suspend pas la procédure d'expulsion. Concrètement, le Fonds est saisi par le bailleur (dans ce cas, l'aide lui est versée pour le compte du locataire), les travailleurs sociaux ou, si le locataire bénéficie d'aides personnelles au logement, par la section départementale des aides publiques au logement (SDAPL) pour l'APL ou par l'organisme payeur de l'allocation de logement (CAF ou CMSA). Le juge d'instance doit être averti de la saisine de la commission (et inversement) afin de pouvoir fixer des modalités de paiement qui intégreront l'éventuel accord de la commission du FSL. Le montant de l'aide, la durée des prêts et l'importance relative du prêt et de la subvention, ou le choix entre les deux types d'aide, sont à déterminer après examen de chaque situation individuelle. La décision étant laissée à l'appréciation de la commission, différentes pratiques peuvent exister, telle l'instauration d'un seuil « maximum » d'impayés, au-delà duquel le dossier sera rejeté (20 000 F ou 30 000 F généralement). Parallèlement, le FSL prend en charge les mesures d'accompagnement social destinées à inciter le propriétaire à maintenir dans le logement le locataire en impayés de loyers. Principale mission, aider les ménages à gérer convenablement la part de leur budget consacrée au logement 

saisir la commission départementale de surendettement. Les impayés de loyers peuvent être pris en compte parmi les dettes visées par la loi relative au surendettement des particuliers et des familles. Le locataire s'adresse à la Banque de France locale, qui assure le secrétariat de la commission. Il y remplit une déclaration type de surendettement où sont indiquées ses ressources et ses dettes. La commission élabore alors un plan conventionnel de redressement. Si aucun accord n'intervient ou que le propriétaire le conteste, la commission peut recommander des mesures d'apurement du passif tel le report ou le rééchelonnement du paiement des dettes, sans que le délai ne puisse excéder 5 ans. Enfin, la commission peut demander au juge de l'exécution  (1) la suspension de l'expulsion, laquelle ne peut excéder un an.

... avant l'assignation en justice

Lorsque le commandement de payer est demeuré infructueux - le locataire ne s'est pas exécuté ou seulement partiellement - le propriétaire peut assigner le locataire devant le juge d'instance pour demander la mise en œuvre de la clause résolutoire pour non-paiement des loyers et donc obtenir l'expulsion de l'intéressé. La résiliation du bail est prononcée par le juge, qui prend une ordonnance d'expulsion.

Le locataire reçoit alors un commandement d'avoir à libérer les lieux. Ce dernier prend la forme d'un acte d'huissier qui contient, à peine de nullité :

• l'indication des titres exécutoires en vertu desquels l'expulsion est poursuivie 

• la désignation de la juridiction devant laquelle peuvent être portées les demandes de délai et toute contestation relative à l'exécution des opérations d'expulsion 

• l'indication de la date à partir de laquelle les locaux devront être libérés 

• l'avertissement qu'à compter de cette date il pourra être procédé à l'expulsion forcée.

A noter  : rappelons que le locataire qui a des ressources inférieures à certains plafonds, et ce sera souvent le cas ici, peut avoir recours à l'aide juridictionnelle  (2). Laquelle lui permet de se faire assister ou représenter par un avocat, bien que sa présence ne soit pas obligatoire  (3). La demande d'aide juridictionnelle suspend la procédure tant qu'un avocat n'est pas nommé.

Que faire entre le jugement et l'expulsion ?

Faire appel

Lorsque le juge a ordonné l'expulsion, le locataire peut faire appel. Il dispose de 15 jours, à compter de la signification du jugement, s'il s'agit d'une ordonnance de référé et d'un mois s'il s'agit d'un jugement. Dans ce dernier cas seulement, l'appel est suspensif (et si la décision n'est pas assortie d'une exécution provisoire).

Demander des délais

Suivant le commandement d'avoir à libérer les lieux, l'expulsion n'est, en tout état de cause, effective qu'à l'expiration d'un délai de 2 mois. L'intéressé peut demander des délais supplémentaires que le juge accordera en fonction de sa situation.

Un délai supplémentaire de 3 mois peut être accordé au locataire (soit un délai total de 5 mois) lorsque l'expulsion a des conséquences d'uneexceptionnelle dureté, notamment du fait de la période de l'année considérée ou des circonstances atmosphériques.

Des délais supplémentaires, qui ne peuvent être ni inférieurs à 3 mois ni supérieurs à 3 ans, peuvent être accordés au locataire de bonne foi, dont le relogement ne peut avoir lieu dans des conditions normales. Pour ce faire, le juge tient compte de la bonne ou de la mauvaise volonté de l'occupant, de sa situation familiale... A ce stade, le locataire a tout intérêt à déposer une demande de logement auprès des services HLM et à produire, si possible, la preuve des démarches infructueuses pour se reloger.

La décision du juge d'accorder des délais est notifiée au préfet du département, en vue dela prise en compte de la demande de relogement de l'occupant dans le cadre du plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées.

Comment se déroule l'expulsion ?

Le moment de l'expulsion

L'expulsion ne peut avoir lieu ni entre 21 heures et 6 heures du matin ni les jours fériés et les dimanches, sauf permission du juge en cas de nécessité.

De même, aucune expulsion ne peut être réalisée pendant la trêve hivernale, soit entre le 1er  novembre et le 15 mars de l'année suivante. Trois exceptions toutefois à ce principe : si le relogement des intéressés est assuré « dans des conditions suffisantes respectant l'unité et les besoins de la famille », si les occupants sont sans droit ni titre ou entrés dans les locaux par voie de fait (squatters, voir encadré), ou si l'immeuble fait l'objet d'un arrêté de péril.

Les différentes situations d'expulsion

Lorsque le locataire est présent, l'expulsion ne peut intervenir que s'il est consentant. S'il refuse de partir, l'huissier dresse un procès-verbal de tentative d'expulsion. Puis s'adresse au préfet pour requérir le concours de la force publique (le défaut de réponse du préfet dans un délai de 2 mois vaut refus d'intervenir).

En l'absence de l'occupant du logement ou si ce dernier en refuse l'accès, l'huissier de justice ne peut y pénétrer qu'en présence du maire de la commune, d'un conseiller municipal ou d'un fonctionnaire municipal délégué par le maire, d'une autorité de police ou de gendarmerie ou, à défaut, de deux témoins majeurs qui ne sont au service ni du bailleur ni de l'huissier. Lorsque la saisie est dressée, l'huissier de justice assure la fermeture de la porte. L'expulsion est effective.

Le sort des meubles

Les meubles se trouvant sur place sont remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu qu'elle désigne. A défaut, les meubles sont laissés sur place ou déposés par l'huissier dans un lieu approprié, avec sommation à la personne expulsée d'avoir à les retirer dans le délai d'un mois non renouvelable à compter de la signification de l'acte, faute de quoi les biens qui n'auront pas été retirés seront, sur décision du juge :

• soit vendus aux enchères publiques. Dans ce cas, le produit de la vente est remis à la personne expulsée après déduction des frais et, s'il y a lieu, de la créance du propriétaire 

• soit déclarés abandonnés, à l'exception toutefois des papiers et documents de nature personnelle (livrets de famille, titres de séjour, bulletins de paie, carnets de chèques, livrets d'épargne...) qui sont placés sous enveloppe scellée et conservés pendant 2 ans par l'huissier de justice. A l'expiration de ce délai, l'huissier les détruit et dresse un procès-verbal qui fait mention des documents officiels et bancaires qui ont été détruits.
V. B. - E. C.

LES POLITIQUES SOCIALES

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