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Loi-cadre exclusion : le rapport Fragonard II

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Avec la divulgation du rapport Fragonard II (1), l'élaboration de la loi-cadre contre l'exclusion, repoussée au printemps après avoir été déjà maintes fois retardée, revient sur le devant de la scène (2).

Retour sur image : mi-juillet, Alain Juppé présentait les grandes lignes de cette loi, réclamée depuis longtemps par les associations et promise par Jacques Chirac lors de la campagne présidentielle. Le 20 octobre, Bertrand Fragonard, délégué interministériel au RMI, remettait au Premier ministre ce rapport, préparatoire à la loi-cadre. Sachant qu'il s'agissait d'une version remaniée, en raison de l'opposition manifestée par Bercy à certaines mesures retenues dans une première mouture. Depuis, avec le remaniement ministériel - le copilotage de la loi-cadre étant désormais confié à Jacques Barrot et Xavier Emmanuelli - et compte tenu de la crise sociale de décembre, le chantier est demeuré en l'état et ce document strictement confidentiel.

« Nous avons le sentiment que ces propositions permettraient d'améliorer sensiblement le dispositif de lutte contre l'exclusion et pour l'insertion, à la condition que les arbitrages budgétaires ne viennent pas remettre en cause les fondements », affirme d'emblée Bertrand Fragonard, dans l'introduction de son rapport que les ASH ont pu se procurer. Autrement dit : si l'Etat entend véritablement lutter contre l'exclusion, il faut qu'il s'en donne les moyens. Concrètement, le délégué interministériel détaille une série de mesures, articulées autour de huit axes et reprenant certaines des propositions du collectif associatif Alerte (3) ou encore du Conseil économique et social (4).

Premier point : l'amélioration du dispositif de lutte contre la pauvreté et l'exclusion. Dans ce domaine, un « objectif majeur » consiste à « transformer fortement le dispositif institutionnel de lutte contre l'exclusion », souligne le rapporteur. Lequel préconise une réforme des services déconcentrés de l'Etat, la clarification et la simplification des compétences et des financements, ainsi qu'un pilotage cohérent autour de la gestion d'un fonds départemental unique. De même, il recommande d'impliquer davantage les élus locaux et leurs collectivités et d'impulser un fort développement des associations. « Autant de réformes essentielles pour s'attaquer efficacement et en profondeur à l'exclusion », insiste-t-il. Autre urgence : « renforcer l'observation et la connaissance » et « créer des lieux de débat » , notamment avec la mise en place d'un observatoire national, la réforme du Conseil national de lutte contre l'exclusion et la pauvreté, et la représentation des populations défavorisées au sein de « multiples instances nationales, départementales et locales » . En outre, un droit à l'accompagnement pour les publics en difficulté pourrait être instauré.

Troisième thème évoqué : « l'activation des dépenses passives d'indemnisation et la mise en cohérence des minima sociaux » . Il s'agirait ainsi de corriger les «  incohérences et les inégalités de traitement » actuelles, ce qui supposerait d'abaisser le niveau des allocations de parent isolé et de solidarité spécifique afin de permettre, en contrepartie, le financement d'actions d'insertion nouvelles. Par ailleurs, dans le domaine évidemment crucial de l'emploi, outre la nécessité de garantir l'accès aux emplois du secteur marchand aux personnes en difficulté (au travers du CIE notamment) et le renforcement du secteur intermédiaire (entreprises d'insertion, associations intermédiaires...), le responsable de la DIRMI estime possible de créer 350 000 emplois d'utilité sociale, dans un délai de trois ans, « du fait de l'activation des dépenses pour les bénéficiaires du RMI, de l'API et de l'ASS ».

Il aborde également, quoique de façon plus succincte, le problème du logement, plaidant en faveur d'un mécanisme de taxation et d'incitations ponctuelles devant favoriser la remise des logements vacants sur le marché. De même, en matière d'accès aux soins, il prône la « simplification totale » des dispositifs et des procédures avec la suppression de l'aide médicale départementale. Laquelle serait financièrement redéployée. « Cette réforme majeure a cependant un coût non négligeable », prévient-il. Pour les jeunes en difficulté, il propose, entre autres, d'instaurer un véritable réseau insertion jeunes, d'assurer leur suivi social, de réformer et de doter de moyens importants les fonds d'aide aux jeunes, « notamment pour financer des parcours d'insertion adaptés ». Quant aux femmes en difficulté, elles pourraient bénéficier des crédits d'insertion et avoir accès, elles aussi, aux emplois d'utilité sociale. Par ailleurs, concernant l'accès à l'éducation et à la culture, Bertrand Fragonard propose, en particulier, de doubler en trois ans les crédits affectés aux zones d'éducation prioritaire et de consolider ceux alloués à la lutte contre l'illettrisme. Enfin, il rappelle la nécessité de « faire face aux urgences et garantir l'accès aux droits » . Deux pistes sont ainsi envisagées : prévenir les situations d'endettement, les retards de loyers et les expulsions, et « élargir les missions des CHRS ». Lesquels pourraient bénéficier d'un financement supplémentaire de 500 millions de francs afin de « pérenniser le dispositif » et de 125 millions sur trois ans pour financer un programme de modernisation.

Notes

(1)  Le Monde du 22 janvier1996.

(2)  Voir ASH n° 1952 du 8-12-95.

(3)  Voir ASH n° 1918 du 17-03-95.

(4)  Voir ASH n° 1935 du 14-07-95.

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