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...Jean-Pierre Rosenczveig sur le dispositif français de protection de l'enfance

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Dans un ouvrage récent (1), le président du tribunal pour enfants de Bobigny (2) trace les cadres légaux de l'intervention sociale dans l'ordre familial. Et donne, pour les ASH, quelques repères aux travailleurs sociaux.

ASH  : Comment évolue le dispositif français de protection de l'enfance ? J-P.R. : Je crois qu'il est de plus en plus complexe. C'est une des raisons pour lesquelles j'ai publié cet ouvrage. Je me suis aperçu qu'il y avait autant de dispositifs qu'il y avait de départements. Et qu'il y avait une seule loi mais mille et une manières d'organiser les choses. Déjà, avant la décentralisation, il y avait des politiques locales mais plus que jamais je crois que l'on va vers un dispositif diversifié et multiforme. La question qui va se poser, c'est de savoir si cela va déboucher sur des injustices sociales accentuées. Comme dans l'utopie de la décentralisation de 1984, y aura-t-il diversification mais à partir d'un seuil minimal de prestations dans tous les départements ? ASH  : Et la place de l'enfant dans ce contexte ? J-P.R. : L'enfant est souvent le prétexte à la prise en charge de groupes sociaux, que ce soit la famille ou des groupes plus larges. L'aide à l'enfance devrait d'ailleurs s'appeler l'aide sociale à la famille. Désormais, il n'est plus possible de penser aider un enfant en faisant abstraction de son milieu familial, culturel, ethnopsychiatrique... On est entré à pieds joints dans l'approche systémique. Ce qui est plutôt une bonne chose. ASH  : Face à cette évolution, quel doit être le rôle des travailleurs sociaux ? J-P.R. : Ils ont plusieurs rôles à jouer. D'abord, ils ont une démarche d'aide individuelle qu'il ne faut pas oublier : contribuer à rompre la solitude de celui qui est en souffrance. Ensuite, ils doivent être capables, en eux-mêmes ou avec d'autres, de mobiliser des compétences techniques pour venir en aide aux personnes en difficulté. Leur troisième mission, c'est quelque part d'être des révélateurs des dysfonctionnements sociaux, des miroirs, des témoins, des scribes sociaux. Ils doivent être capables de renvoyer à la société les difficultés que rencontrent les gens. Et de passer de l'individuel au collectif, donc au politique. ASH  : Face à la crise actuelle du travail social, peuvent-ils exercer ces missions ? Le débat éthique et déontologique est-il la seule façon de redonner sens à leur action ? J-P. R : Je ne dis pas que c'est la seule façon. Je fais simplement le constat objectif que dans le domaine du champ social, comme dans tous les grands domaines où se jouent les grandes questions sociales du moment, les professionnels sont à la recherche de points de repère. Ils les trouvent partiellement dans la loi - il y a un hymne à la loi en permanence - tout en sachant qu'elle ne peut pas répondre à tout. Il y a obligatoirement une part de responsabilité personnelle. D'où le débat sur l'éthique et la déontologie. Comment vais-je me mouvoir dans un domaine où j'y vois peut-être plus clair mais qui, de toute façon, ne fait pas abstraction du fait que je vais devoir dire des choses et prendre des responsabilités ? Le nouveau code pénal donne ainsi plus que jamais aux travailleurs sociaux une liberté de parler ou de ne pas parler, par exemple en matière de mauvais traitements à enfants. Il les renvoie néanmoins à une question : puisque je suis libre, dans quels cas vais-je faire usage de ma liberté ?

Notes

(1)  Le dispositif français de protection de l'enfance - Jean-Pierre Rosenczveig - Ed. Jeunesse et droit : 16,  passage Gatbois - 75012 Paris - 285 F - Voir ASH n° 1955 du 29-12-95.

(2)  Ancien directeur de l'IDEF, Jean-Pierre Rosenczveig est aussi membre du CSTS et du Haut Conseil de la population et de la famille. Il est également président de l'ANCE (Association nationale des communautés éducatives).

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