« Nous voyons augmenter de façon alarmante des demandes d'intervention médicale pour les enfants d'âge scolaire et les jeunes de plus de 16 ans », témoigne Noëlle Lasne, médecin coordinateur de la mission France de Médecins sans frontières. Ces sollicitations, qui se situent à la fois dans le domaine préventif, éducatif ou curatif émanent notamment des institutions et des professionnels, dont les enseignants et les assistantes sociales scolaires, en particulier dans les cas de maltraitance ou de rachitisme. Conclusion pour MSF : il y a une carence manifeste, exacerbée par la précarité, dans le domaine de l'accès gratuit à la prévention et aux soins (qui sont assurés jusqu'à 6 ans par les centres de PMI). »
Réponse : ouvrir, à titre expérimental à Paris, un lieu d'accueil et de soins pour les 6-25 ans. « Officiellement, après 6 ans, le relais doit être pris en partie par les médecins généralistes. Mais les familles en difficulté réservent ces consultations à des situations d'urgence. Par ailleurs, le service de santé scolaire, faute de moyens, réalise rarement les visites obligatoires dans de bonnes conditions. » Après 16 ans, même constat de carence : les jeunes en situation de chômage ou d'errance échappent à toute médecine préventive et ont rarement la possibilité de se faire soigner.
D'accès gratuit, calqué sur le modèle de la PMI, l'espace qui doit ouvrir d'ici à fin janvier à Paris (1) poursuivra les mêmes objectifs. Sur place : bilans de santé, vaccinations, information contraception/sida, etc. A domicile : suivi de grossesses, de traitements médicaux complexes (comme la gale)... « Toute famille consultant dans ce centre se verra proposer une rencontre avec l'une des deux assistantes sociales, qui pourront travailler sur l'accès aux droits des familles, mais aussi sur les questions de logement ou d'emploi », précise Philippe Biberson, président de MSF.
Mêmes possibilités pour les 16-25 ans qui viendront dans le lieu d'accueil adjacent à l'espace de soins, et qui fonctionnera sur le modèle des clubs de prévention. En amont de ce « bistrot » : des équipes de rue. « Nous souhaitons étendre une forme d'intervention, que nous réalisons déjà auprès des toxicomanes prostitués, aux jeunes en errance, tels que nous les rencontrons en particulier dans les gares, explique Noëlle Lasne. Nous voulons leur offrir un lieu convivial qui serve d'interface entre la rue, et les travailleurs sociaux, les médecins, les enseignants. »
Budget de ce projet : 1,8 million de francs par an, entièrement couvert par les fonds propres de MSF. L'association espère, entre autres, que soient revus le système de santé scolaire, la loi de 1945 sur la PMI et inventé le tiers payant en médecine de ville. « Nous ne voulons pas basculer dans le ghetto de soins. »
(1) 21-23, passage Dubail - 75010 Paris.