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Le dispositif d'accueil et d'hébergement d'urgence pour l'hiver 1995/1996

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Eric Raoult et Xavier Emmanuelli ont présenté, au conseil des ministres du 11 octobre, la campagne d'hiver d'accueil des personnes sans abri. Elle vise notamment à créer des « lits supplémentaires d'urgence » (500 lits seront dégagés en CHRS en 1996) et à réaliser une « montée en puissance de l'accueil de jour », comme le souhaite Xavier Emmanuelli. Au total, les ministres estiment que 48 500 places sont disponibles, auxquelles ils ajoutent 14 000 lits supplémentaires (10 000 logements d'extrême urgence Périssol, 1 000 places en CHRS et 3 000 places supplémentaires « en fonction des besoins climatiques » ).

Une circulaire du ministre de l'Intégration et de la Lutte contre l'exclusion et du secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence, actuellement diffusée aux préfets et aux DDASS, décrit les objectifs prioritaires de ce plan d'urgence. Et reprend les grands principes déjà affichés les années précédentes.

Les préfets sont invités à procéder à la mise en œuvre du dispositif d'hébergement d'urgence hivernal, dont le point de départ a été avancé au 15 octobre, dès réception de cette circulaire. Il leur est également demandé de ne plus considérer le « Plan hiver » comme un dispositif spécifique mais « comme le moment fort d'une action permanente ».

Une fois les disponibilités d'accueil recensées, les préfets devront « prendre toutes les dispositions utiles pour permettre l'information adéquate des intermédiaires sociaux et des publics concernés ». En effet, déplore l'administration, « l'expérience montre que des personnes dans l'impossibilité d'être accueillies, par manque de place, ne sont souvent pas correctement informées des possibilités existant ailleurs ». Ainsi, pour pallier ces carences, une permanence téléphonique (qui devra être portée à la connaissance du public et des professionnels), assurée par un personnel formé à l'entretien en situation de crise, devra fonctionner 24 heures sur 24 dans les grandes concentrations urbaines. Là où elle n'est pas nécessaire de façon ininterrompue, cette permanence devra être assurée au moins jusqu'à 23 heures à la préfecture, à la DDASS ou dans un établissement agréé. En outre, « il a été décidé la création d'un téléphone vert sans-abri véritablement opérationnel ». Très bientôt, précise la circulaire, toute personne composant un numéro unique nationalement et facilement mémorisable pourra être mise directement en contact avec le service centralisant les informations sur l'accueil et l'hébergement d'urgence dans son département.

Afin de connaître en permanence le nombre de places d'accueil disponibles, un système de «  veille administrative  » devra être instauré. L'accueil et l'information devant être adaptés aux besoins spécifiques des différentes catégories sollicitant un accueil d'urgence (jeunes, couples, femmes seules ou avec enfants...), ce qui nécessite une constante mise en réseau de l'ensemble des partenaires concernés. Les préfets devront identifier précisément l'instance chargée d'assurer la régulation de l'ensemble du dispositif au jour le jour et au besoin, installer une commission permanente pour l'accueil et l'hébergement d'urgence.

Autre volonté affichée par les ministres : adapter l'offre d'accueil aux besoins notamment des jeunes. Certaines personnes sans abri refusent de rejoindre les centres d'accueil pour des raisons liées parfois aux conditions d'accueil. Ainsi, explique la circulaire, « il arrive que soient imposées aux personnes sans abri des contraintes qui excèdent les impératifs de sécurité et du minimum de bon ordre qu'impose un hébergement collectif ». Un équilibre doit donc être recherché pour concilier ces contraintes et l'offre d'accueil destinée aux personnes dont on sait qu'elles ne pourront se plier aux règles en vigueur.

Quelle que soit la formule d'accueil retenue, « celle-ci doit répondre aux besoins élémentaires qu'éprouve tout être humain ». Ainsi, les préfets devront envisager les mesures nécessaires pour améliorer la situation dans les centres existants. Afin que le lieu d'accueil soit un lieu où il est possible de dormir, rappelle l'administration, dans les mêmes termes que l'an dernier. Indiquant, de la même façon, que « les plages d'ouverture seront les plus larges possibles ». Et qu'une bonne coordination entre l'action des professionnels et celle des bénévoles doit être recherchée.

Face à la forte progression des jeunes en situation d'errance, il faut « mobiliser l'ensemble des structures » (PAIO, missions locales, FJT, Sonacotra), ainsi que les dispositifs tels les fonds d'aide aux jeunes. « Des éducateurs de rue doivent aller à leur rencontre là où ils sont susceptibles de se rassembler (gares, squats...)  », est-il écrit. Il convient de généraliser les expériences d'accompagnement social et d'accueil déjà recensées sur le terrain, sachant qu'une circulaire relative aux « points écoute jeunes » sera adressée ultérieurement.

Les dispositifs mobiles de type « SAMU social » devront être renforcés (1). « Ces actions mobiles constituent souvent le seul moyen de permettre à certaines personnes désocialisées de rejoindre un abri et permettent aussi d'apporter une aide immédiate », indique la circulaire. Cependant, ces structures ne « sauraient se limiter à une action de nuit dans les plus grandes villes ». Aussi, la constitution progressive d'un réseau fonctionnant de jour comme de nuit, est-elle envisagée. Il se réaliserait sous des formes adaptées (équipes de rue, éducateurs...) pour aller, là encore, au devant des personnes dont « on sait qu'elles ne s'adresseront pas spontanément aux structures d'accueil qui leur sont destinées ».

Autre invite, la promotion de l'accueil de jour. Chaque chef lieu de département doit être doté d'au moins une structure d'accueil de type « boutique de solidarité »   (2), annonce la circulaire. Celle-ci doit être ouverte en continu, dans toute la mesure du possible 7 jours sur 7.

Dans le cadre de l'accès aux soins des plus démunis, tel que défini par la circulaire du 21  mars 1995 (3), il est précisé que l'activité médicale dans un CHRS ou un centre d'hébergement d'urgence doit être l'équivalent d'une visite à domicile. Aussi, elle ne peut et ne doit pas se substituer à une hospitalisation, ni en urgence, ni en court ou moyen séjour. Dans le respect de ce principe, la personne malade reçoit « à domicile » les prestations d'un médecin, d'une infirmière ou d'une assistance sociale. La prise en charge peut durer plusieurs jours ou plusieurs semaines, les travailleurs sociaux s'efforçant de trouver une solution à long terme de logement ou d'hébergement. Toutefois, il convient, précise l'administration, de limiter le nombre de places d'hébergement pour personnes malades dans chaque centre, afin de ne pas courir le risque de transformer la structure en « maison médicale pour pauvres ». Il est également rappelé qu'une convention a été passée cette année avec la FNARS pour développer l'accès aux soins dans les CHRS et les centres d'hébergement d'urgence à travers des permanences médico-sociales, l'ouverture de lits pour soins non hospitaliers et des actions plus globales de promotion de la santé.

Enfin, compte tenu de l'importance croissante des problèmes de santé, les préfets sont invités à prévoir des réponses adaptées aux spécificités de l'urgence psychiatrique, des instructions complémentaires leur ayant par ailleurs été données suite au rapport d'Antoine Lazarus sur la souffrance psychique des populations en situation de précarité et d'exclusion (4).

Le dispositif prévu en hiver n'est « que le moment fort d'une action permanente », il doit donc se prolonger au-delà du 15 mars. Dans toute la mesure du possible, ses éléments essentiels (structures d'accueil-information-orientation, structures d'hébergement, lieux d'accueil de jour, SAMU social, actions de santé) devraient être maintenus, le cas échéant, sous une forme adaptée, notamment en matière de plages horaires et de personnels. A cette fin, les préfets devront donc réunir, avant la fin de l'hiver, l'ensemble des partenaires concernés par la mise en œuvre du dispositif hivernal d'accueil et d'hébergement d'urgence. Dans certaines régions attirant durant l'été ou à l'occasion de rassemblements divers (festivals...) une population importante, il conviendra, indique l'administration, de réfléchir dès à présent à la mise en place de réponses adaptées, en particulier pour accueillir des jeunes de passage.

« Nécessaires et indispensables, les actions d'accueil d'urgence en hiver ne sont pas une fin en soi. » Les préfets sont donc appelés à inclure dans le dispositif d'accueil d'urgence départemental, les conditions d'accès à un processus de réinsertion durable suivant les modalités qu'ils jugeront « les plus appropriées ». Parmi celles-ci figure, prioritairement, la mobilisation des organismes chargés de l'instruction des dossiers du RMI pour que les personnes accueillies en urgence, susceptibles de bénéficier de cette allocation et des services qui l'accompagnent, puissent être rétablies dans leurs droits. L'association à la campagne hivernale d'accueil d'urgence de l'ensemble des organismes ayant vocation à mettre en œuvre des actions d'insertion en faveur des publics les plus défavorisés est également souhaitée. Ceux des organismes qui s'occupent des jeunes devront être particulièrement sensibilisés à cette nécessité, est-il encore indiqué.

Enfin, un bilan et une évaluation sont prévus. Dès décembre, un bilan intermédiaire sur le fonctionnement du dispositif d'accueil et les actions d'urgence menées devra être tiré. Et une première réunion, à laquelle seront notamment associés les CHRS, les services sociaux départementaux et les bailleurs sociaux, devra faire le point sur l'offre d'insertion mobilisable en direction des personnes accueillies. Le bilan de l'ensemble des actions menées et leur coût devra être fourni au plus tard le 15 avril.

(Circulaire DAS du 11 octobre 1995, non publiée)
Notes

(1)  Voir ASH n° 1941 du 22-09-95.

(2)  Voir ASH n° 1914 du 16-02-95.

(3)  Voir ASH n° 1919 du 24-03-95.

(4)  Voir ASH n° 1916 du 2-03-95.

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