Défini comme une « mesure forte et simple » par le Premier ministre, lors de la présentation de son plan d'urgence pour l'emploi, le 22 juin, l'allégement de charges sociales sur les bas salaires est la principale mesure de la loi « relative à des mesures d'urgence pour l'emploi et la sécurité sociale ».
L'allégement consiste en une réduction de cotisations patronales sur les salaires inférieurs à 1, 2 fois le SMIC. La réduction atteint son niveau maximum pour un salaire égal au SMIC (soit 800 F mensuel), puis est ramenée à 400 F pour 1, 1 SMIC et à 0 F pour 1, 2 SMIC en métropole.
3, 5 millions de salariés concernés, 150 000 emplois sauvés ou créés, selon le gouvernement, cette nouvelle exonération de charges représentera un coût évalué à 20 milliards de francs en année pleine. Aussi, en contrepartie de cette mesure et dans la logique du « donnant-donnant », le Premier ministre a demandé aux branches professionnelles de s'engager en mettant en place des chartes de développement de l'emploi (voir encadré au verso).
A noter : nous présentons, ci-après, le dispositif d'allégement de charges concernant la métropole qui doit encore être commenté par une circulaire interministérielle. Il s'applique également dans les DOM (Guadeloupe, Guyane, Martinique, la Réunion) où le SMIC horaire est égal à 34, 64 F. Dans ces départements, pour un salaire égal au SMIC (5 854, 16 F arrondis à 5 854 F), la réduction est de 749 F. Pour un salaire équivalent à 1, 1 SMIC (6 439 F), la réduction est de 375 F. Elle est nulle pour 1, 2 SMIC, soit 7 025 F.
Peuvent bénéficier de la réduction des charges sur salaires les employeurs soumis à l'obligation d'assurance contre le risque de privation d'emploi, soit :
les établissements industriels et commerciaux ou agricoles
les offices publics et ministériels
les professions libérales
les sociétés civiles, les syndicats professionnels et les associations.
Peuvent également ouvrir droit à la réduction de charges certains employeurs du secteur public ou parapublic que sont :
les établissements publics industriels et commerciaux des collectivités territoriales
les sociétés d'économie mixte dans lesquelles ces collectivités ont une participation majoritaire
les entreprises nationales.
En revanche, ne peuvent bénéficier de ce dispositif :
les employeurs relevant des régimes spéciaux de sécurité sociale
France Télécom et La Poste
les particuliers employeurs.
Les rémunérations inférieures à un plafond fixé à 120 % du SMIC (soit actuellement 7 499, 54 F arrondis à 7 500 F) au cours d'un mois civil, peuvent faire l'objet d'une réduction de cotisations patronales d'assurances sociales, d'accidents du travail et de maladies professionnelles et d'allo- cations familiales.
Par rémunération, on entend toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire. Toutefois, l'indemnité compensatrice de congés payés versée aux salariés sous contrat à durée déterminée ou contrat de travail temporaire est exclue de la rémunération permettant de calculer la réduction de charges.
A noter : le plafond de 120 % du SMIC s'applique quel que soit le nombre d'heures de travail effectuées. La valeur du SMIC prise en considération est la valeur la plus élevée en vigueur au cours de la période d'emploi rémunérée.
Le montant de la réduction de cotisations sociales est déterminé à chaque versement de la rémunération compte tenu de la durée de travail du salarié.
La réduction est déterminée comme suit :
elle est égale à la différence entre le plafond (P) fixé à 169 fois le SMIC majoré de 20 %, soit 120 % du SMIC et le montant de la rémunération (R) versée au salarié au cours d'un mois civil multipliée par un coefficient égal à 0, 64
elle est plafonnée au montant du produit de 169 fois la valeur du SMIC (36, 98 F au 1er juillet 1995) applicable à la rémunération versée par 0, 128, soit 800 F actuellement.
La réduction est donc calculée selon la formule suivante : (P - R) x 0, 64.
Exemples Pour un salarié à temps plein rémunéré au SMIC (6 249, 62 F arrondis à 6 250 F), la réduction est de (7 500 F -6 250 F) x 0, 64 = 800 F soit un allégement de charges de 9, 6 % pour une entreprise de moins de 10 salariés et de 9, 2 %pour une de plus de 10. Pour un salarié rémunéré à 6 862 F, la réduction est de (7 500 F - 6 862 F) x 0, 64 = 408 F. Pour un salaire égal à 7 500 F (1, 2 SMIC), l'allégement de charges est nul.
Lorsque le nombre d'heures rémunérées est inférieur à la durée légale ou conventionnelle collective du travail, définie sur le mois civil, applicable dans l'établissement ou la partie d'établissement où est employé le salarié, le montant de la réduction est réduit en fonction du rapport entre ces deux nombres d'heures.
Pour le calcul du nombre d'heures travaillées, il est tenu compte des périodes de suspension du contrat de travail donnant lieu au maintien de tout ou partie de la rémunération. Ces périodes sont prises en compte pour un nombre d'heures égal au produit de la durée habituelle du travail par le pourcentage de la rémunération demeurant à la charge de l'employeur.
La réduction, limitée à 800 F, d'abord calculée selon la formule générale, est réduite au prorata des heures rémunérées par application de la formule suivante :
Réduction x nombre d'heures rémunérées durée légale ou conventionnelle du travail
Ce calcul sera notamment utilisé pour les salariés travaillant à temps partiel, pour les titulaires d'un contrat de travail temporaire ou à durée déterminée travaillant moins d'un mois complet.
Exemple
Pour un salarié travaillant 120 heures par mois rémunéré à 4 881 F, la réduction est de 800 F puisque son salaire est inférieur au SMIC (soit 6 250 F) proratisée comme suit :
800 F x 120 = 568, 04 F arrondis à 568 F 169 L'allégement de charges est donc de 568 F.
Pour les salariés dont la rémunération ne peut être déterminée, en application des dispositions réglementaires, conventionnelles ou du contrat de travail, en fonction du nombre d'heures effectuées (tels que les travailleurs à domicile), la réduction de charges est calculée en fonction d'un plafond et d'une limite maximale de réduction spécifiques.
La proratisation effectuée en cas d'activité à temps partiel est remplacée par une réduction proportionnelle.
L'allégement de charges sociales peut se cumuler, pour un même salarié, avec :
l'exonération des cotisations familiales (1)
l'abattement de 30 % des cotisations patronales applicables au travail à temps partiel (2).
Lorsque l'emploi d'un salarié ouvre droit, au titre du versement d'une même rémunération, à l'allégement des charges sociales, à l'exonération des cotisations familiales et à l'abattement « temps partiel » ou à deux de ces réductions de charges, sont d'abord appliquées ces exonérations, puis la réduction de cotisations sociales.
Par contre, le cumul n'est pas autorisé avec :
une autre exonération totale ou partielle de cotisations patronales (exonération pour l'embauche du ou des premiers salariés, exonération liée au contrat initiative-emploi...)
l'application de taux spécifiques, d'assiettes ou de montants forfaitaires de cotisations (apprentis...). A noter : en 1996, lors du passage du seuil d'exonération de 120 % à 130 % pour les cotisations d'allocations familiales, « il conviendra d'ajuster le nouveau dispositif d'allégement des charges », a indiqué le ministre du Travail, du Dialogue social et de la Participation qui souhaite la fusion des deux dispositifs (J.O.A.N. (C.R) nº 37 du 29-07-95).
L'employeur doit établir un document justificatif du montant des réductions qu'il a opérées indiquant :
par établissement et par mois civil, la durée du travail applicable, le nombre de salariés concernés et le montant total des réductions appliquées
ainsi que, pour chacun des salariés, son identité, le montant de la rémunération versée, le nombre d'heures rémunérées, le nombre d'heures pris en compte au titre des périodes de suspension du contrat de travail ayant donné lieu à rémunération et le montant de la réduction appliquée.
Ce document sera à la disposition des agents chargés du contrôle que sont les agents des Urssaf lors de toute vérification.
Considérées, selon Jacques Barrot, comme « une sorte de démarche concertée pour que l'abaissement des charges puisse avoir les plus grands effets possibles », les chartes de développement de l'emploi pourraient comprendre (Rap. A.N. nº 2176, Bachelot-Narquin) :
la définition d'un objectif emploi dans la branche ;
la mise en place d'un observatoire pour mesurer l'évolution de l'activité de la branche ;
l'identification des paramètres et des indicateurs pertinents pour pouvoir apprécier les effets emploi de la baisse des charges ;
les engagements d'embauche de jeunes et de chômeurs de longue durée ;
les engagements d'efforts supplémentaires en formation. Si l'élaboration des chartes n'est pas une obligation légale, la démarche des branches professionnelles est formalisée. Ainsi, après consultation du Comité supérieur de l'emploi, le gouvernement présentera au Parlement, avant la fin du premier trimestre 1996, un rapport dressant le bilan de l'élaboration de ces chartes par les branches professionnelles. Un second rapport dressant le bilan de leur mise en œuvre sera dressé avant le 30 juin 1997.
A compter du 1er septembre, le bulletin de salaire doit obligatoirement comporter le montant de la réduction prévue au titre de l'allégement de charges. Et à cette même date, du fait de la suppression de la remise forfaitaire de 42 F instituée en contrepartie de la CSG, la mention de ce montant ne figure plus sur le bulletin de salaire .
Chaque versement de cotisations est obligatoirement accompagné d'un bordereau récapitulatif de cotisations (BRC) indiquant notamment le nombre de salariés de l'établissement ou de l'entreprise, l'assiette et le montant des cotisations. Ce document sera complété, précise l'ACOSS, par une dernière ligne intitulée « réduction bas salaires » comportant le montant global des réductions obtenues ainsi que le nombre de salariés concernés.
Applicable à compter du 1er septembre 1995 pour les salariés à temps complet
Ce barème simplifié a été établi par le ministère du Travail, du Dialogue social et de la Participation et le ministère de la Solidarité entre les générations. Il indique les réductions applicables pour des salariés à temps complet. En cas de mois incomplet, le montant indiqué doit être proratisé au nombre d'heures. Selon les salaires, le barème et la formule de calcul peuvent donner des résultats différents de quelques francs en plus ou en moins. L'utilisation de ce barème est facultative. Si l'employeur opte pour celui-ci, cette option vaut pour l'ensemble des salariés.
La prorogation des aides forfaitaires pour les contrats d'apprentissage et de qualification La loi du 27 juillet 1993 relative au développement de l'emploi et de l'apprentissage (3) avait institué, pour l'ensemble des contrats d'insertion en alternance ainsi que pour les contrats d'apprentissage, le droit à une aide forfaitaire de l'Etat. Ce droit était ouvert pour une durée limitée du 1er juillet 1993 au 30 juin 1994. Le système a été prorogé une première fois par la loi du 8 août 1994 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier (2) mais pour les seuls contrats de qualification et d'apprentissage et ce, jusqu'au 31 décembre 1994. Puis la loi du 4 février 1995 relative à diverses mesures d'ordre social (3) a de nouveau prorogé le dispositif pour ces deux contrats, jusqu'au 30 juin 1995. Dans l'attente de la présentation par le gouvernement d'un nouveau projet de loi sur l'apprentissage et l'alternance à l'automne prochain, les aides au contrat d'apprentissage et de qualification sont reconduites jusqu'au 31 décembre 1995. Le ministre du Travail a annoncé que pour le contrat d'apprentissage, la prime sera portée de 7 000 F à 10 000 F par décret. En revanche, la prime pour le contrat de qualification restera fixée à 5 000 F ou à 7 000 F suivant que la durée du contrat est inférieure ou supérieure à 18 mois. Le reversement d'une fraction des fonds collectés au titre de la formation professionnelle Le texte de l'accord du 26 juillet 1995, signé entre les partenaires sociaux (CNPF, CGT-FO, CFE-CGC et CFTC) et relatif aux modalités d'articulation entre les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) nationaux professionnels et les OPCA interprofessionnels, a été repris en l'aménageant par la loi relative aux mesures d'urgence pour l'emploi et la sécurité sociale. L'accord prévoyait que « les OPCA nationaux professionnels (c'est-à-dire les OPCA de branche), à l'exception de ceux correspondant à des secteurs professionnels pour lesquels il existe une taxe parafiscale affectée au développement de la formation professionnelle des jeunes, contribuent à hauteur de 35 % du montant de leurs ressources collectées au titre des contrats d'insertion en alternance, au financement des contrats conclus à l'initiative des OPCA interprofessionnels ». La loi exempte les organismes collecteurs paritaires à compétence nationale et professionnelle, pour lesquels il existe une taxe parafiscale affectée au développement de la formation professionnelle des jeunes ou un accord de branche conclu avant le 5 juillet 1994 (4), de reverser 35 % du montant des contributions aux OPCA à compétence nationale ou régionale et interprofessionnelle. Pour le reste, elle reprend les termes de l'accord qui prévoit que le reversement des « non-exemptés » est opéré dans le respect de la décision d'attribution des employeurs. Les modalités de ce reversement seront définies par décret. La suppression de la remise forfaitaire sur la CSG Créée par la loi du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales (5) instituant la CSG, la remise forfaitaire de 42 F sur les cotisations d'assurance vieillesse à un régime obligatoire de base est supprimée pour les rémunérations et gains versés à compter du 1er septembre, pour :
les salariés et assimilés relevant du régime général de la sécurité sociale et du régime agricole ;
pour les personnes relevant des régimes spéciaux de sécurité sociale autres que celui des fonctionnaires civils et militaires. C'est la loi de finances rectificative pour 1995 qui l'a supprimée pour les fonctionnaires de l'Etat (6). La suppression de la remise forfaitaire devrait procurer 9 milliards de recettes supplémentaires à l'Etat, a indiqué le rapporteur au Sénat, Louis Souvet (Rap. A.N. nº 370, Souvet). Une base législative pour les conventions de coopération Le principe des conventions de coopération entre l'Etat, les collectivités locales et l'ANPE (7), qui ont pour objet la mise en place de dispositifs locaux d'insertion pour les chômeurs indemnisés, est inscrit dans la loi afin « d'inspirer d'autres expériences », a indiqué Jacques Barrot (J.O.A.N. (C.R) nº 37 du 29-07-95). La revalorisation anticipée des retraites La loi du 22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale (8) comportait une « clause de revoyure » au 1er janvier 1996 prévoyant un ajustement des pensions de vieillesse et d'invalidité, en fonction de la situation économique générale et des perspectives financières des régimes d'assurance vieillesse concernés. Or les mesures de revalorisation des pensions ayant été prises au 1er juillet à titre d'avance, cette clause n'a plus lieu d'être et est donc supprimée. Il en est de même du rapport sur la situation économique et les perspectives financières qui devait servir de base à cet ajustement. Le report de l'âge limite pour bénéficier d'un allégement de cotisations d'assurance volontaire Une exonération de cotisations d'assurance volontaire peut être accordée pour des emplois nouvellement créés à l'étranger. La limite d'âge des salariés expatriés ouvrant droit à cette exonération est portée de 26 à 30 ans.
(1) Voir ASH n° 1867 du 17-02-94.
(2) Voir ASH n° 1874 du 7-04-94.
(3) Voir ASH n° 1841 du 16-07-93.