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Création d’une licence au Cnam : « Un préalable à la constitution d’une discipline »

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Emmanuel Jovelin, professeur au Cnam, travaille depuis plusieurs années à la constitution d'une discipline en travail social.  

Crédit photo DR
Le Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) ouvrira à l’automne 2025 une licence en travail social. Construite en étroite collaboration avec l’IRTS Parmentier de Paris et de Dijon, la formation constitue un modèle que d’autres établissements peuvent transposer, espère Emmanuel Jovelin, titulaire de la chaire de travail social et de l’intervention sociale.

ASH : Le Cnam crée enfin une filière universitaire complète en travail social…

Emmanuel Jovelin : La direction nationale des formations du Cnam l’a votée mardi 4 juin. A l’automne 2025, une licence « Sciences humaines et sociales, parcours travail social » sera dispensée au Cnam. En 2022, Brigitte Bouquet avait créé le master Travail social et société. Par la suite, Marcel Jaeger, mon prédécesseur, avait ouvert un doctorat. Nous n’avions pas de licence pour venir compléter la filière. C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité la créer.

Quel sera le contenu de la licence ?

Dans la même optique que les bachelors universitaires de technologie (BUT), cette formation est tournée vers l’universitarisation des formations sociales. C’est un mixte entre l’université et les établissements de formation classiques. Elle comprend deux premières années de tronc commun et une troisième de spécialisation « éducateur », « assistant de service social » ou « éducateur de jeunes enfants ». Les stages commenceront dès la première année et comprendront autant d’heures qu’en école.

Vous avez travaillé avec des IRTS. En quoi consiste le partenariat ?

La formation est construite en étroite collaboration avec l’IRTS Parmentier à Paris, et notamment sa directrice scientifique Claire Heijboer, et l’IRTS de Dijon. On a travaillé ensemble les unités d’enseignement, la pédagogie. Ces établissements dispenseront des enseignements pratiques à nos étudiants. Et la convention passée leur permettra d’obtenir le diplôme d’Etat. C’est un modèle amené à être transposé avec les établissements de formation au travail social (EFTS) qui le souhaitent. L’Institut méditerranéen de formation s’est par exemple montré intéressé.

Qu’apporte la licence par rapport à un diplôme d’Etat ?

La différence se situe d’abord en entrée à la formation. Durant les deux premières années, les étudiants peuvent prendre le temps de réfléchir à leur orientation future, alors que le parcours classique impose de choisir dès le concours d’entrée à l’école. Ensuite, la licence renforce les fondements théoriques de la formation, qui sont souvent saucissonnés et dispensés selon les choix pédagogiques des enseignants. Ensuite, les étudiants peuvent exercer en passant le diplôme d’Etat ou poursuivre en master, puis en doctorat.

En quoi est-elle importante ?

Cette licence s’inscrit dans une double visée : former des professionnels en capacité d’avoir une culture théorique et pratique, et constituer une discipline. Pour lancer ce chantier, il faut d’abord créer une filière complète, de la licence au doctorat, qui s’inscrive à terme dans une discipline « Sciences humaines et sociales, travail social ». Pour le moment, si la licence créée sera autonome, le master reste adossé à la filière sociologie, et le doctorat s’appuie à la fois sur la sociologie et les sciences de l’éducation. Or le travail social n’appartient ni à la sociologie, ni à la psychologie, ni aux sciences de l’éducation. Il est interdisciplinaire.

Quel est l’enjeu de cette discipline ?

Elle existe dans plusieurs pays en Europe et dans le monde. La France doit la construire. Parce qu’une discipline permet de discipliner ses membres. Elle permet la reconnaissance du travail social comme un nouvel espace académique et autonome. Avec elle, des chercheurs pourront participer à l’élaboration et au renouvellement des connaissances, des concepts, des modèles théoriques. Pour le moment, l’espace du travail social est constitué de professionnels. Depuis des années, nous essayons de construire un espace d’interconnaissance composé de chercheurs, d’enseignants, de formateurs, issus d’université et d’établissements du travail social. L’enjeu est aussi financier. Il est encore difficile pour des établissements de formation de répondre aux appels à projet de recherche, sans s’associer aux universités.

Diplôme d’Etat, DUT carrières sociales… Cette nouvelle licence ne brouille-t-elle pas encore un peu plus le paysage des formations ?

Le problème, en France, ne se situe pas dans la juxtaposition de ces modèles. Mais dans le brouillage des métiers qui nuit à l’attractivité. On en a créé une multitude, alors qu’ailleurs on parle simplement de « social worker ». Et comme chacun veut garder son pré carré, personne ne bouge. Pourtant, le monde, lui, a changé et le travail social doit changer avec lui.

L’universitarisation des formations en travail social fait peur. Encore aujourd’hui, même si, selon moi, c’est l’avenir. C’est pour cela qu’il sera très difficile d’avoir un seul modèle, universitaire, en France. Il en faudrait deux : celui tel qu’il existe dans les établissements de formation en travail social et celui que l’on met en place.

Métiers et formations

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