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Une sensation de vide

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Caroline Folliot, directrice d'établissement.

Crédit photo DR
[POST-COVID 12/21] Après avoir été ovationnés quotidiennement, à heure fixe, pendant la si longue période de confinement, les soignants se sentent désormais pour certains oubliés.  

Un quotidien compliqué 

La crise du Covid a été l’occasion de valoriser un travail trop longtemps négligé ou ignoré. Et en effet, travail intense, démultiplié, risque pour la santé personnelle, vie de famille désorganisée, initiatives individuelles et collectives pour pallier l’absence de moyens au début de la pandémie (masques, SHA,…), la reconnaissance publique était plus que justifiée. Depuis la fin de la crise, les invisibles, un temps sur le devant de la scène, sont retournés à l’anonymat ; la presse, en général, ne fait plus état que de l’absentéisme récurrent et des démissions en nombre de ces professionnels qui ont tellement donné. Finie la reconnaissance ? 

Les démissions sont une réalité. En effet, les soignants qui, comme une majorité de la population, ont pris de façon aiguë conscience de la valeur de la vie personnelle mettent en balance une rémunération indigente, une fatigue intense et un épanouissement qu’ils ne trouvent parfois plus dans leur profession. Et de façon mécanique, celles et ceux qui restent en poste sont de plus en plus épuisés par la surcharge de travail qu’implique le sous-effectif chronique, le mode dégradé devenu ordinaire ; les arrêts de travail qui se multiplient. Afin de remotiver les équipes, nous sommes attentifs au bien-être au travail (échanges réguliers, attention sur les plannings, qualité de l’accueil des nouveaux, séances de réflexologie plantaire ou massages sont proposés… inclus dans l’emploi du temps). L’écoute des besoins de chacun en termes d’ergonomie du poste de travail et en termes d’horaires se fait très attentive.

La dérive du cœur de métier 

De soignants attentifs, préoccupés avant tout par le confort matériel et surtout affectif des résidents, porteurs d’une éthique de la liberté de circuler des personnes âgées, les personnels se sont trouvés, pendant des mois, à jouer les contrôleurs sanitaires négligeants, vu l’urgence et l’ampleur de la tâche, le cœur du métier. Le retour aux bonnes pratiques professionnelles ne s’est pas opéré immédiatement. Un pli était pris. Avec la crise, travailler en Ehpad n’était plus accompagner une personne âgée, mais assurer sa survie. Or, la vocation de ces établissements repose sur une valeur essentielle : le véritable accompagnement. Rétablir chez les soignants l’estime de leur rôle est un travail de longue haleine auquel nous nous attelons à chaque instant. 

De la même manière, la demande d’identité adressée à tout visiteur désirant rencontrer un proche, pouvoir attribué par arrêté, a altéré fortement la relation famille/soignants. Des maladresses de quelques soignants dues à l’urgence de la situation inédite et compliquée ont pu susciter chez certaines familles des réactions d’inquiétude toujours palpables, d’autant que la situation actuelle de vigilance face au risque d’attentat fait perdurer des attitudes contraires à la volonté d’ouverture de nos établissements. Par des rencontres fréquentes avec les familles et des réunions régulières avec leurs représentants, nous œuvrons à recréer le lien de confiance. Les nombreux événements, intérieurs ou extérieurs, organisés pour les résidents et auxquels participent activement les soignants prouvent également aux proches l’implication empathique des personnels. 

 

Retenons les leçons

« Nous sommes en guerre », le ton avait été donné par le président de la République. Les résidents évoquant leur jeunesse utilisent un repère temporel historique : avant ou après-guerre. Pour les soignants, c’est avant ou après-Covid. Le traumatisme n’est pas évacué. Chacun se souvient des chambres transformées en hôpital d’urgence, des personnes décédées évacuées sans un au revoir, sans rite funéraire. 

Dans les décombres, on trouve des relations avec les familles à reconstruire, un désinvestissement des soignants plus assez reconnus, et dans une moindre mesure les partenariats, interrompus à cause de la conjoncture, très longs à remettre en place et pourtant indispensables pour un accompagnement de qualité sur le territoire. L’après-Covid doit tenir compte des constats et anticiper, car si l’on prend au pied de la lettre l’allégorie d’Albert Camus (dans La Peste) : un bacille, un virus peut ressurgir. Il faudra être prêt.

Caroline Folliot, directrice d'Ehpad

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