Encadrer ne s’improvise pas
La phase de sensibilisation semble derrière nous puisque le grand public comme les professionnels sont plutôt convaincus de l’intérêt de bouger pour la santé. Toutefois, il reste indispensable d’avancer sur le sujet et notamment en formant les professionnels au sport santé et à l’activité physique adaptée. Premièrement car l’activité physique, si bénéfique à la santé puisse-t-elle être, peut aussi être source de blessures, d’échecs, de souffrances... et nécessite d’être adaptée à chacun afin de pouvoir espérer en tirer des bénéfices. Cet aspect est souvent oublié. En effet, il s’agit d’une part de rendre l’activité accessible aux capacités des personnes, et d’autre part de l’adapter à la santé, la pathologie, le passé sportif, la forme du jour... Aussi, la formation des équipes au sport santé me semble primordiale, car le retour vers l’activité physique des personnes les plus fragiles et les plus éloignées du sport reste un réel défi où chacun des acteurs des parcours de santé a une place, importante et complémentaire. Il est donc essentiel pour les professionnels de parler un langage commun et d’identifier leur rôle... et leur limite d’intervention.
D’une manière générale, qu’il s’agisse de sport, de sport santé ou d’activité physique adaptée, les seuls professionnels habilités à encadrer l’activité physique doivent être titulaires d’une carte professionnelle délivrée par le ministère des Sports.
Il est essentiel de rappeler que tous les professionnels (éducateurs, animateurs, infirmiers...) amenés à superviser des sorties marches, séances de gym douce ou toutes autres activités physiques ou sportives sont hors cadre légal, qu’ils soient salariés ou libéraux.
Selon les diplômes, les prérogatives sont différentes
Au regard de nos secteurs d’intervention dans le champ de la santé, la formation la plus appropriée pour encadrer de l’activité physique est sans nul doute la formation universitaire en STAPS : Activité Physique Adaptée et Santé. Il s’agit à minima d’un Bac +3 qui permet de former des EAPA (Enseignants en Activité Physique Adaptée). Ces spécialistes utilisent ainsi les diverses activités sportives à des fins de santé physique mais aussi psychologique ou sociale. La pratique n’est pas une fin en soi, mais un outil au service de la santé.
Cette formation sportive à la base permet aux EAPA d’acquérir des compétences dans de nombreuses disciplines sportives, ainsi qu’en pédagogie. Elle explore aussi largement les différents publics (enfants, adultes, seniors, personnes en situation de handicap, malades...) ainsi que leurs particularités physiques, physiologiques, anatomiques, biomécaniques, psychologiques, sociales... Ces connaissances permettent ainsi aux EAPA de rendre accessibles les activités sportives en les adaptant, mais aussi de construire et de programmer les séances pour atteindre des objectifs prédéfinis en lien avec la santé comme : améliorer son équilibre, reprendre confiance en soi, éprouver du plaisir avec son corps, développer sa capacité respiratoire...
Cette formation minimale de licence APA, peut être poursuivie par un master APA. Et comme tout professionnel, les EAPA peuvent au fil de leur carrière réaliser d’autres formations pour perfectionner certaines disciplines sportives (aquatiques, Pilates...), renforcer leurs connaissances sur un public en particulier, faire évoluer leur posture professionnelle...
Toutefois, si l’encadrement d’activité physique est réservé aux seuls professionnels du sport, il n’en reste pas moins que chaque acteur du parcours de santé des personnes joue un rôle dans le sport santé, et qu’en ce sens, il est indispensable de leur apporter une formation ou information à ce sujet.
Sensibiliser les professionnels à l’APA et savoir orienter
Au niveau local, les Maisons Sport Santé (1) ont assurément des interlocuteurs à privilégier, en matière d’information et ou formation « sport santé, puisqu’elles en organisent ou recensent l’existant. L’interconnaissance favorise sans aucun doute la collaboration entre les professionnels, ainsi que des accompagnements globaux bien plus riches et bénéfiques pour les personnes accompagnées. » Il apparaît donc essentiel de pouvoir sensibiliser chacun des acteurs du social et du médico-social (idéalement dès leur formation initiale) à ce qu’est l’APA. Même si ce terme générique est de plus en plus connu, combien savent-ils vraiment ce qui se cache derrière l’étiquette ? Quelle différence avec le sport santé, avec un professeur de sport ou un kiné ? En quoi cet accompagnement est-il complémentaire avec ce que peut proposer un médecin, diététicien ou assistant social ? Les formations à ce sujet sont encore trop rares et en attendant qu’elles se développent, des temps informels ou des temps dédiés aux échanges de pratiques au sein des équipes est une excellente alternative.
Chacun des acteurs du parcours de santé joue un rôle de repérage des personnes qui peuvent être concernées par le sport santé ; c’est-à-dire une très large part de la population. Ainsi, dans les établissements sociaux ou médico-sociaux, quand les équipes repèrent une personne vulnérable ou en perte d’autonomie qui pourrait bénéficier d’une activité sportive, la meilleure réponse à apporter est d’identifier un professionnel compétent qui aura un temps dédié et saura la guider dans cette pratique sport santé. En l’absence d’un EAPA au sein de l’équipe, il existe des structures spécialisées en APA ou des EAPA libéraux qui peuvent venir renforcer les équipes sur un projet ponctuel par exemple. Et encore une fois, si vous ne trouvez pas d’EAPA, les Maisons Sport Santé peuvent être un excellent relais pour vous mettre en lien avec un professionnel compétent, ou encore organiser des tests, séances, entretiens...
Cette étape, du repérage à l’orientation, est essentielle puisque c’est la porte d’entrée principale vers l’activité physique adaptée pour bon nombre de personnes qui sans incitation extérieure ne feront jamais le pas vers l’activité physique. Évidemment, tous les professionnels ne sont pas à l’aise avec le sport. Et ce n’est pas du tout l’enjeu. L’idée est d’apporter un premier niveau de réponse, essentiel, pour ne pas laisser la personne âgée ou en situation de handicap avec la classique injonction culpabilisante : « Vous devriez faire du sport ! » ; mais de pouvoir leur apporter une solution concrète vers un spécialiste de l’activité physique.
Michael Ranson, co-fondateur et co-gérant Acti’Forme et Domi’Forme
Notes de bas de page
(1) https://www.sports.gouv.fr/decouvrez-les-maisons-sport-sante-les-plus-proches-de-chez-vous-389
