L’accompagnement nécessaire à chaque étape du projet
C’est bien à l’initiative des habitants de la colocation d’Illkirch-Graffenstaden que le voyage a été l’expression d’un projet commun. L’animateur-coordinateur a démarré l’organisation du séjour en janvier, soit cinq mois avant le départ, soit une période nécessaire pour identifier un gîte en prenant en compte de nombreux critères : l’éloignement kilométrique, les conditions de transport, la sécurité, les équipements disponibles au regard du handicap, ou encore le tarif. Des propositions ont ensuite été soumises aux habitants qui ont finalement choisi leur lieu de séjour ensemble. Les échanges avec les familles/tuteurs ont eu lieu simultanément pour favoriser l’autodétermination des premiers concernés.
Les colocataires sont atteints de handicap mental, d’autisme et de troubles psychiques. Le besoin en aide humaine est limité à quelques heures d’intervention par jour à domicile, avec une mise en commun auprès d’un service à domicile extérieur. Le SAD n’a d’ailleurs pas eu besoin d’être sollicité au cours du séjour de vacances, sachant que l’animateur coordinateur dispose des diplômes et compétences requises pour aider les vacanciers dans les actes essentiels si c’est nécessaire et pour une courte durée. Le service d’accompagnement médico-social pour adultes handicapés (SAMSAH) a été informé au titre de l’accompagnement des habitants dans leur projet personnel. Les infirmières ont, comme à l’accoutumée, préparé les médicaments par anticipation.
Des bienfaits et des freins à prendre en considération
Ce séjour représente une vraie opportunité de laisser aux habitants la possibilité de s’autodéterminer, là où les routines quotidiennes au sein de la colocation (comme le passage des professionnels) ont parfois tendance à les mettre en mode « pilotage automatique », à se laisser guider sans forcément exprimer leur ressenti ou leurs envies du moment.
Les freins résident principalement dans les préjugés des professionnels et des familles et leur conviction de l’incapacité des habitants à réaliser ce projet collectif et à décider par eux-mêmes. Une fois ce frein franchi, l’accompagnement en douceur, la stimulation à leur rythme par l’animateur, les a aidés à gagner davantage de confiance en eux. Un autre frein est le modèle économique. Certes, ils ont contribué eux-mêmes au financement de leur séjour, mais l’organisation préalable, l’accompagnement du professionnel et le montage du projet, sont autant de coûts directs et indirects qui ne bénéficient d’aucune prise en charge pour un porteur de projet associatif non gestionnaire, et qui ne profitent d’aucune dotation ni de financement, contrairement aux établissements médico-sociaux. Pour le coup, l’habitat inclusif et le milieu ordinaire de droit commun amènent à plus de simplicité et de liberté que la bureaucratie médico-sociale plutôt « enfermante » qui impose une forte réglementation aux établissements – réglementation qui, on l’a vu l’été dernier, n’empêche pas les drames.
La réussite de cette première expérience de voyage a donné des envies et des idées au sein des autres habitats inclusifs de Familles Solidaires en Alsace. Si c’est leur choix, les habitants pourront envisager des nouveaux séjours. En attendant l’année prochaine, la prochaine sortie marquante sera commune aux quatre maisons soit une quinzaine de coloc’ tous réunis le temps d’une journée pour une escapade au Mont Sainte-Odile début août. Un bel été en perspective !
Bernadette Paul-Cornu, codirigeante du groupe associatif Familles Solidaires