Le concept de vacances
Les vacances (1) sont nées avec l’apparition des civilisations urbaines (2), en se répandant principalement au XIXe siècle dans la bourgeoisie de l’Europe occidentale ; ces personnes aisées quittaient leurs résidences principales, qu’elles laissaient vacantes, pour rejoindre leurs résidences secondaires, à la campagne, au bord de la mer, à la montagne. Le Front populaire de 1936, qui instaura les congés payés de deux semaines, ouvrit ce concept à toute la population.
Dans un premier temps, ceux-ci apportent un véritable repos et un changement dans le quotidien, ce que nous appelons aujourd’hui une déconnexion ; dans un second temps, ils ont permis de découvrir d’autres régions et le monde, de sortir d’un cadre de vie habituel, de rencontrer d’autres cultures, de bouger en quelque sorte : se promener en ville ou dans la nature, faire des escapades, partager un repas au restaurant, visiter un musée ou un monument, regarder les passants, écouter le calme à la place du bruit, etc.
Au fur et à mesure, ce congé est passé à trois, quatre puis cinq semaines en 1981, tout en n’étant pas toujours accessibles à certaines catégories socio-professionnelles. Au fil du temps, les pouvoirs publics ont développé l’aménagement du territoire et les hébergements de tourisme ; l’hôtellerie traditionnelle s’est modernisée, les gîtes ruraux, les villages vacances et d’autres modèles sont nés.
Mais, quid des personnes souffrant d’une maladie chronique ? Quid des personnes à mobilité réduite ? Quid des aidants ?
Une préparation et des méthodes
Pour les premiers concernés
Lorsque toutes ces personnes décident de « larguer les amarres », pour un besoin, pour une envie, pour un repos bien mérité, pour oublier pendant quelques instants un quotidien pouvant être parfois oppressant, ces vacances doivent être encore mieux préparées en amont, dans le simple et ultime objectif d’en profiter réellement, comme tout un chacun.
A cet effet, l’inventaire suivant peut les épauler, ainsi que l’aidant ou la famille, sans être exhaustif :
- amener les documents médicaux et les médicaments (dosages, allergies, histoire de la maladie), pour que le médecin et le pharmacien du lieu ne soient pas pris au dépourvu ;
- disposer d’un moyen de transport de secours, pour rentrer calmement à la maison ;
- emmener les activités ludiques habituelles, pour les jours de pluie ou les jours sans obligation ou envie spécifiques ;
- envisager des délais d’attente probables avant toute activité, pour écarter une pression quelconque ;
- faire choisir le lieu et non l’imposer, pour donner un sens à ce moment ;
- mesurer le temps du voyage, pour que le proche ne le subisse pas ;
- ne pas fuir sur un coup de tête, sans réflexion ou presque, pour ne pas être déstabilisé encore plus ;
- prévoir des durées supplémentaires, pour ne pas courir après un train ou un horaire de visite ;
- privilégier les trajets directs, pour supprimer les inconvénients de changement de moyens de transport ;
- repérer sur un plan les adresses des médecins et de l’hôpital, ainsi que les téléphones, pour une urgence toujours possible ;
- s’assurer que, sur place, la personne ne soit pas trop dépaysée, pour enlever un éventuel regret ou une angoisse.
Pour les accompagnateurs
Quant à l’aidant et la famille, eux aussi, ont un recensement facilitateur et jamais achevé à leur disposition :
- le repos est fait également pour eux ; les maladies chroniques les épuisent ; cette pause ne peut être que bénéfique ; ils doivent « durer » dans le temps pour s’occuper de l’autre ;
- partir seul en vacances (sans la personne accompagnée), n’est pas un geste égoïste ou un signe de ras-le-bol ; c’est une pensée pour soi, un instant assez long pour vivre et non survivre, une occasion de prendre la bonne distance vis-à-vis de la maladie et des petits et grands soucis du quotidien ;
- le stress, la fatigue, la culpabilité, l’usure doivent être oubliés pendant quelques jours, en sorte que le burn-out n’ajoute pas une maladie à la maladie ;
- l’aide mise à la disposition par l’autre n’est ni une aumône ni une récompense ; elle est une opération normale dans la vie, malgré cette foule individualiste et indifférente qui nous entoure ; celle-ci n’est qu’une relation d’aide qui recrée un équilibre avec la personne accompagnée.
Que prévoit la loi ?
Pour la personne vulnérable ou ses proches aidants
Au-delà de toutes ces préparations et méthodes, l’Etat a fixé des règles - la loi - qui apportent une garantie, une sécurité, des dispositions, des procédures, autant pour les personnes, les aidants, la famille et les organismes concernés :
- la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 a intégré des dispositions en matière de séjours de vacances pour adultes handicapés ;
- le décret n° 2015-267 du 10 mars 2015 et l’instruction DGCS/SD3B/2015/233 du 10 juillet 2015 stipulent que les organismes, développant une activité de séjour à destination de personnes majeures en situation de handicap, doivent disposer d’un agrément particulier ;
- la circulaire DGCS/3B/2023/153 du 6 octobre 2023 prescrit les règles de sécurité incendie sur les lieux de séjours de vacances adaptés organisés ;
- le Code du tourisme - articles L 412-2 et R 412-8 - a introduit des dispositions en matière de séjour V. A. O. (Vacances Adaptées Organisées) pour adultes handicapés.
Ces quatre éléments garantissent la qualité et la sécurité des prestations offertes lors de ces séjours, dans le cadre de l’article L 114 du Code de l’action sociale et des familles.
Quant à l’aidant
Ces vacances entrent dans les cas suivants :
- la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 sur l’adaptation de la société au vieillissement ;
- l’article L 3142-16 du Code du travail concernant le congé proche aidant.
Ces deux autres éléments reconnaissant cette situation d’aidant, d’une part, par le droit à un répit - le temps de prendre du temps pour lui lorsqu’il accompagne une personne fragilisée par la maladie, l’âge ou le handicap - et, d’autre part, par la possibilité de cesser temporairement son activité professionnelle dans le but de s’occuper d’une personne handicapée ou invalide ou en perte d’autonomie.
Philippe Giafferi, écrivain et conférencier
Notes de bas de page
(1) Ce nom a été formé à partir de l’adjectif vacant. Expression qui s’entend par inoccupé pour un poste de travail, par exemple.
(2) Les métiers liés à l’agriculture s’adaptaient avant tout au climat et aux saisons, ce qui leur imposait des contraintes incompressibles.