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L'envers du décor

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« Soyons réalistes, le sous-financement limite la capacité des entreprises et associations du service à la personne à offrir des services de qualité et à soutenir pleinement les aides à domicile », alerte Sabrina Cavène, accompagnante éducative et sociale à domicile en CESU, gérante et formatrice de l’organisme de formation FCS, autrice et jury d’examen ADVF.

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[FINANCEMENT DES SAD 1/11] Derrière les interventions à domicile se cache une réalité difficile pour les professionnels de terrain, les associations ou entreprises mais aussi les usagers. Une souffrance pas assez médiatisée ni expliquée où la question financière n’est jamais loin.

Les salariés en colère

Lorsque nous intervenons à domicile auprès de personnes fragilisées, nous sommes amenés à effectuer beaucoup de déplacements avec notre véhicule. Malheureusement les salariés ne sont pas assez rémunérés pour couvrir les frais engagés dans l’exercice de leurs fonctions. Une réalité qui limite l’attractivité de nos métiers et joue sur nos fins de mois difficiles.

Les durées inter-vacations posent aussi un problème. Et pour cause, les emplois du temps des professionnels sont chargés avec peu de temps de repos entre chaque mission entraînant de la fatigue et du stress. Il serait important d’organiser de manière équilibrée nos plannings en y intégrant nos besoins. Des pauses adéquates pourraient contribuer à notre bien-être, à une meilleure efficacité au travail et à la qualité des services rendus aux bénéficiaires.

Notre quotidien est aussi fait de nombreux rappels pour remplacer les absents entraînant une charge de travail supplémentaire et une perturbation de l’organisation de notre vie personnelle. Sans parler des intervenantes qui sont amenées à travailler plusieurs week-ends de suite affectant ainsi leur qualité de vie et leur bien-être. Elles ont besoin de repos et de temps libre pour éviter l’épuisement.

Et quand nous sommes enfin sur le terrain, nous ne sommes pas reconnues pour notre savoir-être et savoir-faire mais confondues avec de simples « femmes de ménage ». Et pourtant nous fournissons des services essentiels... sans compter le dépassement des limites professionnelles qui est une préoccupation sérieuse. Nous sommes amenés à effectuer certains actes médicaux (distribution des médicaments, changement de pansement...) car les infirmières ne sont pas toujours disponibles pour le faire... sans formation et sans reconnaissance financière.

Les associations et des entreprises en mauvaise posture

Les employeurs de service à la personne se retrouvent eux aussi en mauvaise posture, compte tenu notamment des arrêts maladie imprévus qui perturbent l’organisation du service et entraînent des difficultés pour assurer la continuité des prestations chez les bénéficiaires... mais aussi des pertes financières non négligeables. Le temps perdu pour rappeler les autres salariés, trouver une solution n’est évidemment pas facturé.

Les directions sont également souvent noyées sous les appels des bénéficiaires ou des familles qui les contactent fréquemment pour diverses raisons. Il faut savoir que ces appels répétés peuvent être dus à un sentiment d’isolement ou à une crainte des proches aidants, n’habitant pas toujours sur place. Les employeurs sont certes là pour soutenir les bénéficiaires et leurs entourages, mais ces sollicitations nombreuses parasitent aussi nos quotidiens.

La hiérarchie doit gérer les remontées et griefs nombreux avec des bénéficiaires rarement satisfaits. La responsable écoute patiemment et tente de résoudre les problèmes de communication pour trouver des solutions et améliorer la situation avec l’aide à domicile concernée. Une perte de temps conséquente non facturée.

Les bénéficiaires mécontents

Le mécontentement des bénéficiaires n’a pas qu’une seule explication. Les raisons sont nombreuses : horaires d’interventions inappropriés et inadaptés à leur rythme de vie et à leurs habitudes, les retards ou absences des intervenantes non avertis par la responsable peuvent être d’ailleurs une source de stress et d’incompréhension. Des intervenantes non qualifiées, par manque de personnel, car l’association ou entreprise n’est pas en mesure d’assurer des formations appropriées à leurs salariés. Une salariée en formation ne peut pas être remplacée.

Le taux élevé de rotation du personnel affecte la continuité du service et la relation de confiance entre les professionnels et les bénéficiaires. Certains choisissent de jeter l’éponge et de ne plus faire appel au service à domicile alors que leur fragilité ne fait que se développer. Au contraire, d’autres souhaitent une augmentation des heures d’interventions, mais dans le contexte actuel, des demandes ne sont pas pourvues, faute de salariés.

Derrière tous ces problèmes et ces réalités plurielles, on peut se poser une question : le travail engagé à domicile financé à hauteur de 23 euros de l’heure... est-ce réaliste et tenable ? Est-ce que l’augmentation du tarif horaire réglerait tout ? Elle ne réglerait pas tous les problèmes d’un coup de baguette magique mais la rémunération des aides à domicile devrait davantage interroger.

Soyons réalistes, le sous-financement limite la capacité des entreprises et associations du service à la personne à offrir des services de qualité et à soutenir pleinement les aides à domicile. Il est donc important à ce jour qu’elles reçoivent un soutien financier adéquat pour pouvoir continuer à fournir des services essentiels à notre société. Tout cela répondrait aux préoccupations et aux revendications de chaque partie impliquée. La situation actuelle devient préoccupante alors que les besoins d’accompagnement augmentent. Et dans ce contexte, aucune réforme n’est annoncée.

Sabrina Cavène, accompagnante éducative et sociale à domicile en CESU, gérante et formatrice de l’organisme de formation FCS, autrice et jury d’examen ADVF

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