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Quand le chien d'abord allié devient un poids

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« Alors, quand au sein d’un foyer, les deux habitants principaux sont en perte d’autonomie, tout tient à un fil, l’équilibre est difficile à tenir », selon Sarah Martin, auxiliaire de vie.

Crédit photo DR
[MEDIATION ANIMALE 20/23] Posséder un animal de compagnie implique d’être conscient des besoins et des devoirs envers cet être vivant. Comment faire alors si le propriétaire de l’animal n’a même plusconscience de ses propres besoins ?

Compagnon de vie et d’envie

Intervenante à domicile, j’ai rencontré un couple dont le mari souffrait de la maladie d’Alzheimer. Dès mon arrivée chez eux, j’ai été accueillie chaleureusement par leur compagnon de vie, Nabab. C’était un bouledogue Français, trapu et énergique. Attachant et très sociable, mais avec un caractère bien affirmé.

Bien plus qu’un animal de compagnie, ce chien était un membre de la famille à part entière.

La femme se dévouait depuis déjà plusieurs années pour prendre soin de son mari et de son foyer. La charge était lourde, tant mentale que physique. Elle avait par ailleurs de sévères problèmes de santé qui la handicapaient dans son quotidien. Mes collègues prenaient d’ailleurs en charge son mari pour des activités cognitives, des promenades, en compagnie de Nabab. Elle pouvait alors avoir un temps pour elle, un moment de détente.

Son mari était en opposition à toutes les activités proposées ou n’arrivait pas à rester concentré sur certaines. Heureusement, Nabab était là, toujours partant pour une promenade, un moment de jeu avec son maître ou bien pour se faire chouchouter.

Mes interventions ont démarré auprès de son épouse. Je m’occupais des tâches devenues trop importantes pour elle. J’ai alors cherché comment faire pour la soulager au mieux dans son quotidien, même si mon intervention se limitait à deux heures hebdomadaires. Très rapidement j’ai compris à quel point sa charge mentale était lourde, notamment à cause de la maladie de son mari. J’ai alors inclus de plus en plus souvent Monsieur dans mes activités, lors de mes interventions.

Face à la perte d’autonomie du couple

Vivant en appartement, il fallait régulièrement sortir le chien, ce à quoi Monsieur disait rarement non. Seuls ou accompagnés, ils faisaient le tour du parking ou du quartier, mais chacun y trouvait son compte. En assistant à leurssorties, mes collègues et moi, avions remarqué qu’il forçait beaucoup sur la laisse, ne laissant pas vraiment le chien en profiter. Pour rentrer, ils connaissaient le chemin et semblaient se faire confiance l’un l’autre pour ne pas se tromper deroute.

A l’intérieur, les jeux étaient toujours autant appréciés, les séances de caresse ou de flatterie aussi.

Peu à peu les promenades sont devenues fastidieuses, le chien ne voulant plus suivre son maître et inversement. Plusieurs fois, ils se sont perdus en se promenant, obligeant la famille à contacter les forces de l’ordre pour lancer un avis de recherche. Madame ne pouvait pas physiquement sortir le chien autant qu’il aurait fallu, bien qu’elle soit souvent descendue seule pour le faire, parfois à la nuit tombée. La situation devenait sensible, et s’est transformée en source d’angoissesupplémentaire pour elle. Comment faire pour continuer à s’occuper de son chien tout en gérant la maladie de son mari et sa propre santé fragile ? Ils ne pouvaient plus prendre le risque de se perdre ou qu’ils aient un accident.

Le choix difficile de se séparer de l’animal tant aimé

Nabab faisait du bien à tout le monde, toujours drôle et vivant. Il était aussi le dernier lien de conscience dans leur couple. L’être qui les faisait parler le même langage, et qui les rapprochait. Pour elle, c’était un compagnon de galère, celui à qui elle pouvait tout confier quand ça allait mal, devant qui elle pouvait être elle-même et ne pas craindre de jugement.

Malheureusement, la décision de se séparer de Nabab a été prise à contre cœur, mais de façon très censée. Madame était la seule personne consciente à pouvoir faire ce choix dans le couple, une fois encore, pour le bien de tous, sauf le sien.

Cet exemple montre bien toute la difficulté de prendre des décisions quand la situation devient intenable. L’enjeu est évidemment de prendre en compte le bien-être de la personne malade, de l’aidant mais il ne faut pas oublier l’animal, qui a besoin de promenades, d’attention et de soin. Alors, quand au sein d’un foyer, les deux habitants principaux sont en perte d’autonomie, tout tient à un fil, l’équilibre est difficile à tenir. Et là, la seule présence d’un animal de compagnie, malgré tout l’amour ressenti peut vite devenir un poids en plus. La dépendance rebat les cartes de la vie, du quotidien. Encore faut-il en avoir conscience.

 

Sarah Martin, auxiliaire de vie
 

Alzheimer

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