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Les bienfaits des groupes de parole pour les aidants de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer

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« Apprendre à s’adapter, c’est accepter cette nouvelle réalité tout en maintenant un lien différent, basé non plus sur ce qui a été, mais sur ce qui est. Cela nécessite une grande « résilience émotionnelle », mais permet de continuer à accompagner le proche avec bienveillance et sérénité », souligne Marie Etienne, pilote plateforme accompagnement et répit.

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[ALZHEIMER FRIENDLY 12/16] La maladie d’Alzheimer est un défi qui bouleverse, non seulement la vie de la personne atteinte, mais aussi celle de ses proches. Les aidants se retrouvent face à une charge émotionnelle et physique importante. Le soutien dont ils disposent est souvent insuffisant, d’où l’importance de mettre en place des groupes de parole permettant de sortir de l’isolement, d'échanger sur leurs expériences avec d’autres aidants, de recevoir des conseils pratiques et de mieux comprendre cette pathologie neurodégénérative.

Entre théorie et pratique

Les groupes de parole que j’anime suivent un format bien précis, qui répond aux besoins variés des aidants. Chaque séance est divisée en deux temps distincts. La première heure est dédiée à un thème défini par les participants à la fin de chaque rencontre précédente. Cette approche collaborative permet de s’assurer que les sujets abordés répondent à leurs préoccupations. Les thèmes peuvent varier : gestion des comportements agressifs, communication avec un proche désorienté, ou encore « le vernis social ». Ces moments d’apprentissage théorique permettent de transmettre des connaissances sur la maladie et d’offrir des outils concrets pour mieux appréhender les situations du quotidien.

Le second temps est consacré à ce que j’appelle un « tour de table ». Ce moment est crucial, car il donne l’opportunité à tous les participants de s’exprimer librement sur leurs ressentis, leurs frustrations, leurs peurs, mais aussi leurs réussites. Cette heure d’échange favorise la libération de la parole et l’entraide entre les membres du groupe. Chacun est encouragé à partager, à poser des questions, à offrir son soutien ou simplement à écouter. Ainsi les aidants se rendent compte qu’ils ne sont pas seuls et qu’ils vivent des situations similaires.

Apprendre à s’adapter à la nouvelle réalité

L’un des points centraux des groupes de parole est d’aider les aidants à comprendre qu’ils doivent s’adapter à la personne qu’ils ont désormais en face d’eux, et non à celle qu’ils ont connue avant la maladie. Ce n’est plus tout à fait le parent, le conjoint ou l’ami d’autrefois, ce qui crée souvent une douleur profonde, appelée aussi « deuil blanc ». En effet, la maladie d’Alzheimer altère progressivement la mémoire, la capacité de raisonnement et modifie la personnalité du malade. Il est donc inutile, voire douloureux, d’essayer de maintenir le proche dans un cadre de références qu’il n’est plus capable de suivre. Par exemple, si Mme X, atteinte de la maladie d’Alzheimer, exprime le besoin de parler à sa mère, il est préférable d’éviter de lui dire et répéter qu’elle est décédée depuis longtemps. Plutôt que de corriger les erreurs ou de rappeler constamment ce qui est « réel », les aidants apprennent à valider les émotions de la personne. Par exemple, si un proche affirme vouloir « aller au travail » alors qu’il est à la retraite, il ne sert à rien de lui expliquer la situation. Il est plus apaisant de répondre à ce besoin de sécurité par un dialogue, Exemple : « Le travail te manque ? Parle-moi de ce qui te faisait sentir bien là-bas. » Cette technique, appelée « validation émotionnelle », aide à créer un lien sans générer de stress ou de frustration et à changer de sujet en douceur. Mais c’est une technique qui s’apprend. Je mets un point d’honneur à rappeler que ce n’est pas à la personne malade de faire l’effort de s’adapter, mais bien aux aidants de se repositionner par rapport à cette nouvelle réalité.
Il est aussi essentiel de revoir ses attentes. La personne malade n’a plus la capacité de répondre aux attentes d’avant. Ce n’est pas un manque de volonté, mais une réalité neurologique. Par conséquent, il est nécessaire de vivre le moment présent sans attendre une reconnaissance ou un retour identique à celui d’avant. L’objectif devient alors de trouver d’autres manières d’entrer en relation : des gestes doux, un sourire ou le partage d’un souvenir, même s’il n’est plus reconnu. Il faut profiter de l’instant présent.

L’inclusion, c’est aussi accepter l’autre

Apprendre à s’adapter, c’est accepter cette nouvelle réalité tout en maintenant un lien différent, basé non plus sur ce qui a été, mais sur ce qui est. Cela nécessite une grande « résilience émotionnelle », mais permet de continuer à accompagner le proche avec bienveillance et sérénité. Par exemple, si Mme X, malade d’Alzheimer, met la table à 15 heures de l’après-midi, j’explique aux aidants qu’ils doivent lâcher prise et laisser cette table mise. Rien ne sert de s’énerver, car il y a des choses beaucoup plus importantes à gérer. Il faut souvent dédramatiser les situations. Difficile à concevoir chez les aidants, surtout s’ils sont âgés.

Ces échanges renforcent la cohésion du groupe et créent un sentiment de solidarité. Ils favorisent aussi le lâcher-prise, car les aidants prennent conscience que perfectionner chaque geste ou chaque parole n’est pas possible, et qu’il est primordial de ne pas se juger trop sévèrement. Cette reconnaissance mutuelle de la difficulté de la tâche, sans jugement, est souvent libératrice.

Les groupes de parole ne sont pas simplement des espaces de partage. C’est une approche humaine et bienveillante pour accompagner des aidants qui apprennent à comprendre, accompagner et aider leur proche. Ainsi mieux informés, sensibilisés, ils peuvent alors se sentir plus apaisés et mieux appréhendés les sorties avec leur proche. L’enjeu est aussi de les sortir de leur isolement.

Marie Etienne, pilote plateforme accompagnement et répit

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