Quand la peluche fédère
La présence d’animaux n’est plus à prouver pour le bien-être des résidents. Mais qu’en est-il des robots, tels que des chats, des chiens ou d’autres, moins conventionnels comme le Phoque Paro ? Si cette question peut légitimement se poser, force est de constater qu’ils apportent également du bonheur aux personnes âgées isolées. C’est notre constat. Notre Ehpad est constitué de six unités de vie réparties sur trois étages. Il est difficile d'intégrer un « vrai » chat parmi les usagers.
Afin de pallier le manque d’animaux, nous avons acquis un chat robot qui miaule, ronronne, vibre, se couche, respire, et émet même de la chaleur ! Il s’agit d’une peluche que nous appelons affectueusement Minou. Bien sûr, nous ne trompons pas les résidents, et lorsque nous le présentons, nous utilisons les termes « peluche » ou « robot ». Cependant, ils s’en moquent : ils le manipulent, le bercent et le câlinent sans aucun problème ni gêne. L’avantage, c’est que Minou est constamment disponible, ne présente aucun risque de blessure, et ne se lasse jamais d’être manipulé. Les interactions avec ces compagnons robotiques ont la capacité de susciter des émotions positives, de diminuer l’anxiété et d’atténuer le sentiment fréquent de solitude ressenti en Ehpad. De plus, ils agissent comme un vecteur de lien social, puisque les résidents en discutent entre eux de manière toujours cordiale. Il n’est pas rare que chacun évoque les animaux qui les ont accompagnés au fil des années, stimulant ainsi leur mémoire.
Trouver le juste équilibre entre utilisation du robot et interactions humaines
Bien sûr, contrairement aux animaux de compagnie bien réels, les animaux robotiques sont plus adaptables aux contraintes logistiques et aux exigences spécifiques que présentent les établissements médico-sociaux. Ainsi, les contraintes sont limitées : ils ne nécessitent ni nourriture, ni soins vétérinaires, et ne présentent aucun risque d’allergies ou de blessures. Ils sont par ailleurs facilement lavables ; un coup de produit désinfectant et ils peuvent retourner auprès des résidents. Ces arguments pèsent évidemment dans la balance, car même si un mouvement est en marche avec l’arrivée progressive d’animaux en Ehpad, force est de constater que nous restons fortement obnubilés par les risques sanitaires ou en tout cas les normes hygiénistes. Les habitudes héritées du sanitaire ont du mal à être perdues.
Au-delà de ces questions, l’introduction d’animaux robotiques soulève des débats éthiques et moraux. Il est impératif que leur utilisation soit strictement encadrée pour garantir le bien-être des résidents. Nous avons observé que cette activité peut parfois devenir addictive et surstimuler certains participants. Par conséquent, elle doit rester ponctuelle et être toujours supervisée par un membre de l’équipe. Il est fortement déconseillé de laisser le robot trop longtemps dans les bras d’une même personne. De plus, il est essentiel de maintenir un équilibre judicieux entre l’utilisation des animaux robotiques et l’interaction humaine afin de préserver la dimension humaine des soins aux personnes âgées dépendantes. Le robot est donc un outil, à prendre en considération mais bien encadré par la présence et le regard constants des équipes.
Marie Etienne, pilote plateforme d’accompagnement et de répit et ancienne responsable animation et vie sociale dans un groupe d’Ehpad