"Emmanuel Macron aurait-il déjà oublié les mal-logés ?", s'interroge la Fondation Abbé-Pierre après l'annonce, mercredi 17 mai, de la composition du nouveau gouvernement, entre autres réactions très mitigées du secteur. Ces nominations font "apparaître un grand absent : le logement. Cette perspective est extrêmement inquiétante pour tous ceux qui sont confrontés, de près ou de loin, à la crise du logement et de l'hébergement", s'inquiète la fondation. "Les décrets d'attribution des ministères ne sont pas encore connus et il est probable que le ministère de la Cohésion des territoires intègre une dimension logement. Mais ce scénario laisse craindre un éclatement de l'action politique dans les domaines pourtant étroitement liés de l'hébergement, du logement, de la politique de la ville et de la rénovation thermique. Et au final la marginalisation de ces questions". Comme la Fondation Abbé-Pierre, la Fédération des acteurs de la solidarité demande au gouvernement "de réaffirmer rapidement la priorité gouvernementale donnée à l'accès au logement des personnes en difficulté", tandis que Droit au logement appelle, en signe de protestation, à une "marche vers le ministère de la Cohésion des territoires", mercredi 24 mai.
L'arrivée de Sophie Cluzel saluée
L'Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA), "interloquée", souligne qu'aucun ministre, "et pas même un secrétaire d'Etat, ne représente les retraités et les personnes âgées". Elle demande que cette "erreur majeure" soit corrigée avant les élections législatives. Pour la Fnaqpa (Fédération nationale avenir et qualité de vie des personnes âgées), cette absence "n'est pas forcément dérangeante sur le principe", mais "l'inquiétude réside plutôt dans la création d'un grand ministère sanitaire, au lieu d'un grand ministère social". A la place d'un secrétariat d'Etat dédié au handicap, la fédération aurait préféré "un secrétariat d'Etat dédié à l'autonomie au sens large". De leur côté, Adessadomicile et l'Union nationale de l'aide, des soins et des services aux domiciles (UNA) appellent, dans la perspective des élections législatives, à une politique soutenue en faveur d'un "secteur fortement sinistré qui a résolument besoin d'un engagement fort de l'Etat, permettant une véritable prise en charge financière de la dépendance".
La Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (FEHAP) se réjouit pour sa part de "l'existence d'un secrétariat d'Etat en charge des personnes handicapées rattaché directement au Premier ministre, avec à sa tête une personnalité se situant au plus près des préoccupations des personnes handicapées et de leurs proches, soulignant l'importance du secteur social et médico-social pour le gouvernement". Elle souhaite "rencontrer les nouveaux ministres dans les plus brefs délais, afin d'amorcer dès maintenant une dynamique de travail pour donner toute sa place au secteur privé non lucratif de la santé et des solidarités".
L'Association des paralysés de France (APF) se félicite également de l'arrivée de Sophie Cluzel au gouvernement, en proposant "une feuille de route dès le début de ce quinquennat : prise en compte des situations de handicap dans les réformes à venir dès cet été sur l'emploi, l'éducation et la santé ; mais aussi augmentation de l'AAH [allocation aux adultes handicapés] et réflexion sur le revenu d'existence ; élargissement du périmètre de la prestation de compensation du handicap et présentation d'une stratégie pour une accessibilité universelle". L'APF demande également la tenue d'"états généraux du handicap, pour dresser un état des lieux et proposer des mesures coconstruites" et la réunion d'une conférence nationale du handicap d'ici la fin de l'année.
Pas de portefeuille spécifique pour l'enfance
La Fédération des aveugles et amblyopes de France salue par ailleurs la nomination d'Agnès Buzyn : "Son intérêt porté aux politiques de prévention, son attachement fort à l'hôpital public, dont on sait toute l'importance pour les publics fragilisés, constituent autant d'atouts pour cette haute figure de la médecine française". La tonalité est également positive du côté de la nouvelle Union nationale des associations agréées des usagers du système de santé, selon laquelle la nouvelle ministre "a déjà montré la sensibilité particulière qu'elle sait apporter à la voix des usagers, ainsi qu'aux constats et propositions portées par leurs associations". L'Unaass appelle "à une politique de santé publique audacieuse et courageuse", au cœur de laquelle la prévention doit privilégier "des actions sur les déterminants de santé, c'est-à-dire les facteurs qui impactent l'état de santé de la population… y compris ceux, nombreux, n'étant pas forcément en lien avec le système de soins ou d'assurance maladie. Il s'agit en particulier de l'alimentation, du logement, de l'éducation, du travail, du transport…" L'Union souhaite aussi que soient dépassés "les blocages identifiés par tous les acteurs depuis près de 15 ans, s'agissant de l'accès aux soins (restes à charge, déserts médicaux, prix des médicaments innovants…)" et de la qualité et de la pertinence de ces derniers.
Alors que l'enfance et la famille ne font pas l'objet d'un portefeuille spécifique au sein de l'équipe du Premier ministre Edouard Philippe, comme le regrette notamment l'Union nationale des associations familiales, l'Unicef France réitère son vœu d'une politique globale et interministérielle de l'enfance et de la jeunesse, placée sous l'autorité du Premier ministre. Autres manques pointés par les organisations du champ social : l'absence de ministères consacrés à la jeunesse et à la vie associative.
Au final, estime l'Uniopss, "la société civile et son expertise sont fortement représentées" dans le gouvernement d'Edouard Philippe, "la parité et la diversité politique sont respectées". Mais l'union exprime "ses plus vives inquiétudes devant l'absence de ministres ou secrétaires d'Etat sur [des] champs de la solidarité de grande importance". Elle demande que "ces absences soient comblées très prochainement".