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Tous concernés par le grand âge

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Alors que la France va devoir faire face à un vieillissement considérable de sa population dans les années à venir, le rapport de Dominique Libault préconise un effort massif dans le secteur des personnes âgées pour relever ce défi. Car entre structures insuffisantes, établissements saturés, personnels sous-payés et épuisés, les manques sont légion.

La boucle est (pratiquement) bouclée. Un peu plus d’un an après la seconde journée de mobilisation dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) qui avait permis la prise de conscience, par les politiques, de l’urgence de la situation, le rapport sur le grand âge et l’autonomie a été rendu public, le 28 mars. Un rapport qui préfigure une grande loi sur la dépendance, attendue pour l’automne. Dès lors, ce document, élaboré par Dominique Libault, président du Haut Conseil du financement de la protection sociale, se veut le plus complet possible. Il est le fruit de nombreux échanges entre les différents acteurs (associatifs, politiques, professionnels…) du secteur. Au total, après dix ateliers nationaux, cinq forums régionaux, une consultation citoyenne ayant recueilli plus de 1,7 million de votes pour 414 000 participants, 100 rencontres bilatérales et des groupes d’expression de personnes âgées, de professionnels et d’aidants, Dominique Libault a remis un rapport de 175 propositions, dont dix clés (voir encadré ci-contre), divisées en huit priorités.

Avant de juger la qualité ou non des propositions de ce rapport, de savoir s’il répond ou non à l’urgence de la situation, force est de constater qu’il met au moins en avant la gravité du problème lié à l’évolution démographique du pays. En 2030, pour la première fois, en France, les personnes âgées de 65 ans et plus seront plus nombreuses que celles de moins de 20 ans. De même, le nombre de personnes âgées de plus de 85 ans va exploser dans les prochaines années passant de 1,8 million actuellement à 2,6 millions en 2030 et 4,8 millions en 2050. Ce n’est pas tout, comme le souligne le rapport « Libault », les personnes âgées dépendantes le seront de plus en plus : il y aura 2,2 millions de personnes en perte d’autonomie en 2050, contre 1,3 million en 2017. Il faut encore ajouter à cela le fait que, aujourd’hui, 40 % des personnes qui décèdent en France ont connu la perte d’autonomie. Bref, on vieillit en France mais plus on vieillit, plus le risque de perte d’autonomie est grand. Il va donc y avoir du monde, beaucoup de monde à gérer. D’où l’urgence rappelée par le rapport.

Un rapport accueilli favorablement par le secteur

Concrètement, l’entrée dans le grand âge des générations du baby-boom nécessitera 35 % de dépenses publiques supplémentaires (1,6 % du PIB en 2030 contre 1,2 % en 2018), soit plus de 9 milliards d’euros à l’horizon 2030 en plus des 23,7 milliards de dépense publique actuellement affectés à la dépendance, selon le rapport. Un rapport qui met donc en avant 175 propositions, divisées en huit thématiques prioritaires : investir dans l’attractivité des métiers du grand âge, à domicile comme en établissement ; pouvoir choisir librement de rester à son domicile ; piloter par et pour la qualité ; parcours de la personne âgée : mettre fin aux silos pour simplifier la vie des personnes ; une nouvelle offre pour concrétiser le libre choix de la personne ; reste à charge en établissement : faire baisser la contribution des personnes modestes ; lutter contre l’isolement de la personne âgée et des aidants et augmenter l’espérance de vie en bonne santé en renforçant la prévention. « Ces différents axes supposent la reconnaissance d’un nouveau risque de protection sociale, estime Dominique Libault. Reconnaître la perte d’autonomie comme un risque de protection sociale à part entière, ce serait un symbole fort, signe d’une prise de conscience collective de la nation. Pour cela, nous proposons de l’inscrire dans la loi de financement de la sécurité sociale pour que chaque année un débat démocratique puisse avoir lieu sur ce sujet. »

Autant le dire tout de suite, le rapport a été salué par la quasi-unanimité des acteurs du secteur. Ainsi, l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopss) « accueille favorablement les propositions du rapport tant attendu ». Elle estime qu’elles traduisent « une réelle prise en compte des difficultés rencontrées par l’ensemble du secteur médico-social ». Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du Syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées (Synerpa), qui représente les 1 800 Ehpad privés, salue les propositions « courageuses », « pragmatiques et ambitieuses » de cette concertation et assure « qu’avec ce rapport, le gouvernement dispose désormais des pistes principales permettant d’élaborer une réforme ambitieuse du grand âge ». « L’ensemble de ces propositions sont en phase avec celles que la Mutualité française avait rendues publiques fin 2018, se réjouit enfin Thierry Beaudet, son président. En particulier, notre idée de moduler le prix des Ehpad en fonction des revenus des résidents qui a été reprise dans le rapport. »

Cependant, si tous les acteurs se montrent satisfaits par ce rapport, ils font aussi tous part de leur vigilance à ce que les propositions émises, les priorités affichées soient bien intégrées dans la future loi. Sur ce point, Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, a tenté de les rassurer en indiquant que les propositions du rapport « Libault » « sont le matériau qui va nous permettre de construire des réponses et le modèle de demain ». Et d’ajouter : « La concertation “grand âge et autonomie” s’arrête aujourd’hui. Mais le dialogue se poursuit avec celles et ceux qui voudront participer à l’étape décisive d’achèvement et de mise en œuvre de la réforme, et en particulier avec les parlementaires et les conseils départementaux. » Rendez-vous à l’automne donc.

Dix propositions clés

• Création d’un guichet unique pour les personnes âgées et les aidants dans chaque département, appelé « maison des aînés et des aidants ».

• Plan national pour les métiers du grand âge.

• Soutien financier de 550 millions d’euros pour les services d’aide et d’accompagnement à domicile.

• + 25 % du taux d’encadrement en Ehpad d’ici 2024 par rapport à 2015 (+ 80 000 postes et + 1,2 milliard d’euros).

• Plan de rénovation de 3 milliards d’euros sur dix ans pour les Ehpad et les résidences autonomie.

• Financements des projets de transformation et d’amélioration des établissements (300 millions d’euros par an).

• Baisse du reste à charge mensuel de 300 € en établissement pour les personnes modestes.

• Mobilisation pour la prévention de la perte d’autonomie.

• Indemnisation du congé de proche aidant et la négociation obligatoire dans les branches professionnelles pour mieux concilier sa vie professionnelle avec le rôle de proche aidant.

• Rompre l’isolement et favoriser les liens intergénérationnels (service civique, futur service national universel).

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