La ministre du Logement, Emmanuelle Cosse, et le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, ont tenu, mardi 11 octobre, pour la troisième fois, une réunion avec les associations engagées à Calais (Pas-de-Calais) ou dans les centres d'accueil et d'orientation (CAO), en vue de préparer le démantèlement annoncé du campement de la lande. Confrontés à la grogne grandissante du côte de certaines associations investies à Calais, les deux ministres ont assuré, dans un communiqué commun, que cette rencontre s'inscrivait "pleinement dans la volonté de l'Etat de procéder à cette opération humanitaire en étroite concertation avec elles", et en respectant un impératif : tenir compte "de la situation de chacun – mineur non accompagné, personnes malades ou vulnérables notamment – pour lui proposer une solution de mise à l'abri adaptée et un chemin vers l'asile".
La veille de la réunion, Emmaüs et le Secours catholique s'étaient en effet vivement inquiétés des conditions du démantèlement et avaient demandé son report : "C'est une opération sécuritaire qui n'a d'humanitaire que le nom", a estimé Vincent de Coninck, chargé de mission du Secours catholique dans le Pas-de-Calais, tandis que pour Thierry Kuhn, président d'Emmaüs France, "tout porte à croire que le gouvernement va reproduire les erreurs de Sangatte". Par ailleurs, les associations avaient déjà réclamé, fin septembre, que soient conservées les structures d'accueil présentes, c'est-à-dire le centre d'accueil provisoire (CAP) et le centre d'accueil de jour Jules-Ferry.
Une "mission d'élaboration d'un diagnostic partagé"
Pour faciliter ce travail de concertation, les ministres ont confié une "mission d'élaboration d'un diagnostic partagé entre les différents acteurs" à deux hauts fonctionnaires qui ne sont pas des inconnus : le préfet honoraire Jean Aribaud, ancien préfet du Nord-Pas-de-Calais, et le président de l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale, Jérôme Vignon, déjà auteurs en 2015 d'un rapport sur la situation des migrants dans le Calaisis. "Cette mission aura également pour objet de travailler avec les associations sur les dispositifs qui seront mis en place pour l'après-démantèlement", ajoute le communiqué.
Quand l'évacuation du camp sera-t-elle lancée ? Emmanuelle Cosse et Bernard Cazeneuve ne donnent pas de date. "Le démantèlement interviendra lorsque les conditions fixées pour une prise en compte de chacun seront réunies", indique simplement le communiqué, en ajoutant que "ses modalités seront exposées en détail le moment venu".
Un appel aux Britanniques pour les mineurs isolés
La veille de cette réunion, le pensionnaire de la Place Beauvau a rencontré, à Londres, son homologue britannique pour évoquer le renforcement de la coopération entre leurs deux pays dans la perspective du démantèlement. A cette occasion, les Britanniques ont confirmé leur soutien aux autorités françaises pour la réussite de cette opération, ont indiqué Bernard Cazeneuve et Amber Rudd dans un communiqué commun, annonçant notamment une augmentation de l'investissement financier britannique afin de contribuer à la prise en charge des migrants déplacés hors de Calais.
S'agissant de l'épineux dossier des mineurs isolés, "les accords d'Amiens passés en mars dernier entre les deux pays" - qui prévoient l'accueil au Royaume-Uni des mineurs isolés présents à Calais et disposant d'attaches familiales outre-Manche - "seront appliqués et élargis", assure le communiqué, sans donner plus de précisions. Quelques heures auparavant, sur RTL, Bernard Cazeneuve demandait "solennellement" à Londres "d'assumer son devoir moral". "Il y a plusieurs centaines de mineurs isolés à Calais qui ont de la famille en Grande-Bretagne, et nous sommes en train d'établir la liste précise. Les Britanniques doivent prendre leurs responsabilités. Nous avons pris les nôtres".