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Un rapport parlementaire plaide pour replacer l'intérêt de l'enfant au coeur du dispositif

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"De l'avis général", la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance "est globalement une bonne loi", mais "confrontée à l'épreuve du terrain", elle accuse "des retards et des inerties" dans sa mise en oeuvre et se révèle "insuffisamment armée pour répondre au problème de l'instabilité des parcours de prise en charge de certains enfants", constatent, dans un rapport d'information rendu public mercredi 25 mai, les deux sénatrices Michelle Meunier (PS, Loire-Atlantique) et Muguette Dini (UDI-UC, Rhône), qui avancent une cinquantaine de propositions pour améliorer le système actuel.
Il s'agit, pour les rapporteures de ce texte, rédigé pour le compte de la commission des affaires sociales du Sénat, de répondre aux trois principaux enjeux qu'elles ont identifiés au cours de leur mission, à savoir améliorer la gouvernance locale et nationale de la protection de l'enfance, rendre le dispositif plus efficace à tous les stades (au niveau de la prévention, du repérage et de la prise en charge) et, enfin, sécuriser le parcours de l'enfant protégé.
A noter que les deux parlementaires ont annoncé leur intention de déposer, "pendant l'été", une proposition de loi commune reprenant certaines de leurs préconisations.

Atténuer les disparités

L'impératif d'amélioration du pilotage du secteur émane, en premier lieu, du constat selon lequel "la connaissance de la population des enfants protégés est encore très parcellaire" - en raison notamment de l'insuffisance de travaux de recherche qu'il convient d'encourager -, oblitérant la réalisation d'un état des lieux qui constitue "pourtant un préalable indispensable à toute prise de décision tant nationale que locale".
Cet écueil appelle donc la mise en cohérence des données récoltées sous l'égide de l'Observatoire national de l'enfance en danger (ONED), que le rapport sénatorial préconise d'ailleurs de transformer en Observatoire national de la protection de l'enfance (ONPE), qui le poserait véritablement comme "tête de réseau" des observatoires départementaux (ODPE).
Le rapport plaide aussi pour atténuer les "importantes disparités territoriales" qui caractérisent la mise en oeuvre de la loi de 2007, avec une grande diversité des modes de recueil et d'évaluation des informations préoccupantes, une application aléatoire des mesures de protection, un recours fluctuant au "projet pour l'enfant", une prise en charge inégale des jeunes majeurs, une mise en place variable des ODPE, etc. "Si l'existence de pratiques disparates est un risque intrinsèque à toute politique décentralisée", soulignent en effet les auteures, "une coordination a minima s'avère indispensable", ne serait-ce qu'au regard du principe d'égalité de traitement entre les enfants protégés sur le territoire et leurs familles. Elles préconisent donc la création d'une instance partenariale nationale, placée auprès du Premier ministre, ce Conseil national de la protection de l'enfance (CNPE) ayant pour mission de proposer au gouvernement les grandes orientations nationales de cette politique.
Du côté de la coopération et de la complémentarité entre les acteurs du secteur, qui figurait aussi parmi les objectifs de la réforme de 2007, le bilan est également "contrasté", selon le rapport d'information du Sénat, et le cloisonnement "encore très marqué entre les différentes sphères professionnelles". D'où la proposition d'inclure systématiquement dans les signataires des protocoles relatifs au recueil, au traitement et à l'évaluation des informations préoccupantes l'ensemble des professionnels concernés.

Des marges de progression

Pour renforcer l'efficacité du dispositif, par ailleurs, les sénatrices Michelle Meunier et Muguette Dini rappellent que la prévention, qui constituait l'un des axes majeurs de la loi, "n'a pu être pleinement suivie d'effets en raison tant de l'insuffisance de moyens attribués à la protection maternelle et infantile et à la santé scolaire que d'un manque de portage politique". Le rôle central de la PMI doit donc être réaffirmé et l'attractivité de ses services renforcée avec "un plan d'adaptation de la démographie des professionnels de la PMI".
Au niveau du repérage, et malgré la nouvelle organisation autour des cellules de recueil des informations préoccupantes (CRIP) - "plus rationnelle" et qui "a permis d'améliorer le repérage des enfants en danger ou en risque de l'être" -, le rapport met en évidence "des marges de progression", en matière de coopération avec le secteur sanitaire notamment, libéral ou hospitalier ; à cet effet, il recommande la désignation d'un médecin référent chargé d'organiser un travail régulier entre les services départementaux (ASE, PMI), les praticiens libéraux et hospitaliers (généralistes, pédiatres, urgentistes) et les médecins scolaires.
Au troisième étage du dispositif, la loi de mars 2007 a permis d'améliorer la prise en charge des mineurs en danger, notamment du point de vue de la prise en compte de l'intérêt de l'enfant, en rupture avec le "familialisme" qui prévalait depuis les années 80. Mais, malgré le rééquilibrage qui s'est opéré, le rapport constate "la persistance d'une idéologie familialiste très forte", qui entrave toute possibilité d'aménagement voire de rupture du lien familial biologique, alors que "certaines situations nécessitent assurément de libérer les enfants de la tutelle de leurs parents".
Or "cette conception, que certains professionnels n'hésitent pas à qualifier de dogme", rapportent les parlementaires, "imprègne les pratiques sociales", et les travailleurs sociaux, de par leur formation, "attachent beaucoup d'importance à l'adhésion des parents, à leur accompagnement et à leurs facultés de progression". Une démarche "parfaitement louable" dans la majorité des situations, prennent soin de nuancer Michelle Meunier et Muguette Dini, mais qui peut aussi, parfois, "être préjudiciable à l'enfant en retardant la prise de décisions". Elles estiment donc "fondamental que l'intérêt supérieur de l'enfant soit replacé au coeur du dispositif de protection de l'enfance". A cet effet, elles plaident pour faire du projet pour l'enfant "un document de prise en charge globale", et pour désigner un référent chargé de son suivi au sein de l'aide sociale à l'enfance (ASE).

Sécuriser le placement familial

La mission s'est également penchée sur le sort des enfants faisant l'objet d'une mesure de placement de long terme, qui se heurte, d'une part, à une trop grande instabilité de leur parcours, marqué par de fréquents changements de lieux d'accueil, et, d'autre part, à l'absence de perspective quant à l'évolution de leur statut juridique, "qui leur permettrait de bénéficier d'une 'seconde chance familiale'". Pour sécuriser le parcours de l'enfant placé, et en améliorer le suivi prévu par la loi de 2007 - qui ne contient souvent qu'une description partielle de la situation de l'enfant -, les sénatrices proposent d'enrichir le rapport annuel ainsi élaboré par l'ASE d'une analyse de sa santé, de sa scolarité, de ses relations sociales et familiales...
Sur la question du placement familial, qui constitue le premier mode d'hébergement des mineurs et majeurs confiés à l'ASE - selon les chiffres du dernier rapport annuel de l'ONED, 53,3 % étaient placés en 2011 en familles d'accueil contre 38,6 % en établissements -, cette prédominance ne doit "pas masquer les difficultés auxquelles sont aujourd'hui confrontés les assistants familiaux", en termes de statut et d'exercice quotidien de leur activité, au vu du bilan "en demi-teinte" de la loi du 27 juin 2005 relative aux assistants maternels et assistants familiaux, bilan qui réclame donc d'engager une concertation pour sécuriser cette profession. Par ailleurs, un administrateur ad hoc devrait être désigné systématiquement par le juge des enfants, pour représenter le mineur dans la procédure d'assistance éducative.
Le rapport préconise enfin de développer les modes de prise en charge alternatifs au placement de longue durée, voire l'adoption qui, "en tant que modalité de protection de l'enfance n'est pas encore entrée dans les mentalités, encore moins dans la pratique" alors qu'elle permet, "pour certains enfants, de construire des projets de vie adaptés à leur situation". C'est le cas par exemple pour le délaissement, qui reste cependant difficile à établir, et pour lequel les parlementaires recommandent "d'élaborer un référent national d'aide à l'évaluation des situations de délaissement parental", tandis qu'elles préconisent de réformer la procédure de la déclaration judiciaire d'abandon.
Un dernier chapitre concerne les jeunes majeurs, "confrontés à une exigence d'autonomisation précoce" à la fin de leur prise en charge, et dont l'accompagnement, fondamental, se révèle, là aussi, "à géométrie variable". D'où la mission sénatoriale en conclut que la sortie du dispositif doit être préparée dès l'âge de 16 ans, dans le cadre d'un projet d'insertion. A peine évoquée, la question des mineurs isolés étrangers (MIE) ouvre enfin, cependant, la voie à la possibilité "de mettre en place des mode de prise en charge propres aux MIE".

Protection de l'enfance

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