Présenté le 26 juin dernier par Cécile Duflot, ministre de l'Egalité des territoires et du Logement, le projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) a été définitivement adopté par le Parlement jeudi 20 février.
Cette loi est "structurée selon trois axes complémentaires, qui marquent la volonté de garantir l’intérêt général : elle est porteuse d’une démarche de régulation, d’une logique de protection et d’une dynamique d’innovation", précise le dossier de présentation de ce texte.
En termes de régulation d'abord, la loi ALUR instaure un mécanisme d'encadrement des loyers. Alors qu'un décret d’urgence avait été pris dès l’été 2012 afin d'encadrer la hausse des loyers dans les agglomérations connaissant une forte tension du marché locatif, le dispositif instauré par la loi ALUR "se veut suffisamment contraignant pour être efficace et suffisamment souple pour ne pas rentrer dans une logique de prix administrés qui gèlerait le secteur de la location".
Contenir la progression des loyers
La finalité recherchée : éliminer les loyers excessifs, limiter le niveau des loyers et "contenir fermement leur progression", préserver le pouvoir d’achat des Français et faciliter l’accès au logement.
L’entrée en vigueur du dispositif, qui va concerner les zones dites "tendues" correspondant aux 28 agglomérations de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements (un décret fixera la liste des communes comprises dans ces zones), se fera progressivement, au fur et à mesure que les agglomérations concernées seront dotées d’un observatoire des loyers. "L’encadrement des loyers pourrait être effectif dans l’agglomération parisienne ainsi que dans quelques autres agglomérations dès l’automne 2014", annoncent les services de Cécile Duflot.
Concrètement, le préfet de département prendra chaque année un arrêté qui fixe, pour chaque catégorie de logement et par quartier, trois indicateurs : un loyer au m2 de référence, un loyer au m2 de référence majoré et un loyer au m2 de référence minoré, sachant que le loyer hors charges au mètre carré ne pourra excéder le niveau du loyer de référence majoré, correspondant aux caractéristiques du logement. Dans l'agglomération parisienne, plus d’un quart des loyers devraient baisser.
Sécuriser la location
La loi ALUR entend également simplifier et sécuriser la location : "Bon nombre de tensions entre locataire et bailleur sont liées à l’absence d’un cadre juridique simple et clair", rappelle le ministère. "Pour éviter les abus", une liste des justificatifs exigibles d’un locataire va être déterminée, un formulaire type pour le bail est créé et des modalités types d'élaboration de l’état des lieux sont définies.
Toujours dans le champ de la régulation, le texte doit également permettre d'engager la transition écologique des territoires et de moderniser les règles d’urbanisme en instaurant le transfert automatique de la compétence des plans locaux d’urbanisme (PLU) aux intercommunalités dans un délai de trois ans.
Autre mesure phare : l'instauration d'un dispositif de garantie universelle des loyers (GUL) dans le parc privé. Celui-ci, qui va entrer en vigueur le 1er janvier 2016, a un triple objectif : protéger les bailleurs contre le risque d’impayés, favoriser la mise en location et faciliter l’accès au logement tout en prévenant les expulsions.
"Ce dispositif de garantie-socle gratuite assurée par l’Etat responsabilise les propriétaires et les incitent à faire preuve de solidarité puisque seront intégralement indemnisés les bailleurs qui pratiquent des loyers raisonnables". Ainsi, en cas d’impayé, la GUL indemnise le bailleur et se substitue à lui pour recouvrer l’impayé de façon amiable auprès du locataire, ce dernier étant "pris en charge de façon précoce et se [voyant] proposer un accompagnement si nécessaire". En revanche, si l’impayé est lié au comportement abusif d’un locataire indélicat, "la GUL a les moyens de lancer des procédures de recouvrement forcé en mobilisant les moyens du Trésor public".
Mieux lutter contre l’habitat indigne
Le gouvernement entend également mieux lutter contre l’habitat indigne, "la panoplie des outils jusqu’à présent à la disposition de l’Etat pour lutter contre ce phénomène croissant [s'étant] avérée trop peu efficace".
La loi ALUR instaure donc des dispositions visant à "empêcher les personnes condamnées pour hébergement contraire à la dignité humaine de pouvoir acquérir des biens immobiliers et de les mettre en location" et comporte des dispositions spécifiques qui visent à empêcher l’expansion des marchands de sommeil dans les copropriétés ainsi que des mesures pour "contraindre les propriétaires indélicats à faire des travaux".
Le texte porté par Cécile Duflot affiche également l'ambition de faciliter les parcours de l’hébergement vers le logement par différents moyens : une meilleure articulation entre la puissance publique et les associations et le renforcement des services intégrés d’accueil et d’orientation (SIAO) en les consacrant juridiquement, en fusionnant les plans départementaux, en accentuant l’accompagnement et en créant des logements en intermédiation locative dans les communes SRU.
Les dispositifs relatifs au droit au logement opposable (DALO) vont quant à eux être améliorés : la loi ALUR donne par exemple la possibilité aux commissions de médiation de requalifier un recours hébergement en recours logement lorsque la situation du ménage le justifie, ou encore, "afin de prolonger l’instruction du 26 octobre 2012 qui permet d’éviter que l’expulsion des ménages DALO soit effective avant leur relogement", que la commission de médiation puisse saisir le juge afin de demander des délais lorsqu’un demandeur menacé d’expulsion est reconnu prioritaire au titre du DALO.
Habitat mobile
La prévention des expulsions doit elle être améliorée "par le signalement des impayés très en amont et le renforcement du rôle des commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (Ccapex)", tandis que la trêve hivernale des expulsions locatives est prolongée de deux semaines, du 15 au 31 mars.
Enfin, afin de favoriser une "dynamique d'innovation", le gouvernement souhaite "accompagner le développement d’alternatives au logement classique, comme l’habitat participatif, qui se voit doté de deux statuts juridiques possibles [la coopérative d’habitants et la société d’autopromotion], et faire entrer dans le droit commun les diverses formes d’habitat léger, mobile et démontable".
Par ailleurs, le dispositif d’attribution des logements sociaux est réformé pour gagner en transparence, en simplicité et en efficacité, sachant que "les deux mesures les plus importantes permettant de simplifier les démarches des demandeurs sont désormais inscrites dans la loi" : il s'agit de la possibilité de déposer sa demande sur Internet et du dossier unique de la demande de logement social.
"Les rapports avec les partenaires sociaux d’Action logement font également l’objet d’une profonde réforme, renouant avec un mode de rapport contractuel, s’écartant de la gestion unilatérale par l'Etat retenue dans la période précédente", précise encore le ministère.
Projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, adopté le 20 février 2014 (petite loi).