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Le rapport Fragonard plaide pour moduler les allocations familiales mais le HCF est réservé

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Le gouvernement présentera, dans les semaines qui viennent, "les options qui auront été retenues" pour une évolution des aides aux familles, à la suite de travaux menés par Marisol Touraine et Dominique Bertinotti sur la base des propositions formulées dans le rapport du président du Haut Conseil de la famille (HCF), Bertrand Fragonard, remis mardi 9 avril au Premier ministre, Jean-Marc-Ayrault, et qui envisage notamment la modulation des allocations familiales versées aux ménages les plus aisés.
Les propositions du rapport Fragonard "sont exhaustives s'agissant des différentes mesures envisageables, à la fois pour un meilleur ciblage de certaines prestations et le renforcement des aides au bénéfice des familles fragiles", a en effet jugé Matignon, mais "elles ne constituent pas un plan global et univoque, ouvrent à ce titre une grande latitude de choix", et renvoient, sur certains sujets, à "des travaux complémentaires".

Complément d'enquête

Le Premier ministre a donc chargé la ministre des Affaires sociales et de la Santé et sa ministre déléguée à la famille "d'étudier de façon approfondie les propositions du rapport, en prenant en compte l'avis exprimé par le Haut Conseil de la famille", adopté le 8 avril par consensus, à l'exception de FO et de la CFE-CGC qui y sont opposées.
Pour mémoire, Bertrand Fragonard avait été saisi en janvier dernier par le Premier ministre "d'une mission globale sur l'architecture, la pertinence du ciblage et l'efficience des dispositifs d'aides aux familles".

Des spécificités nationales

Le rapport fait d'abord le tour des spécificités françaises à prendre en compte, que ce soit le niveau de fécondité élevé des Françaises (deux enfants par femme en moyenne), le faible taux de femmes sans enfant (11,7 %), le nombre "particulièrement élevé" de familles de trois enfants et plus et, malgré tout, le taux d'activité également élevé des femmes à temps plein.
S'y ajoutent encore une majorité de naissances hors mariage (56 %) et "une proportion relativement importante et croissante de foyers monoparentaux et de familles recomposées", selon ce document, "même si les trois quarts des enfants mineurs vivent avec leurs deux parents".
Pourtant, "si les politiques familiales permettent de compenser en partie la charge d'enfant, deux types de familles se caractérisent par de faibles niveaux de vie : les familles avec trois enfants et plus et les familles monoparentales", souligne le rapport Fragonard.

Les enjeux de la politique familiale

Par ailleurs, la politique familiale française fait l'objet de nombreux points de débats - analysés dans une quinzaine de fiches -, à l'exception de deux objectifs qui bénéficient "d'un consensus relativement fort, même si leur expression a évolué au fil des années et si des débats portent sur leurs modalités" : le soutien à la natalité et le soutien au niveau de vie des familles.
Deux autres, apparus plus récemment, constituent aussi aujourd'hui des axes majeurs de la politique familiale, à savoir "l'aide à l'articulation entre vie familiale et vie professionnelle, d'une part, et l'accompagnement de la parentalité, d'autre part".
Pour améliorer le système actuel, le rapport détaille alors une série de pistes de réformes, en distinguant deux périodes : d'abord un exercice "sous forte contrainte", dans le contexte d'une branche famille déficitaire, puis "plus ouvert" à partir de 2016, dans le cadre d'une branche équilibrée voire excédentaire.
Mais "l'objectif de rééquilibrer les comptes de la branche famille à l'horizon 2016 est contesté par la plupart des membres du Haut Conseil", note celui-ci dans son avis du 8 avril, en considérant que "le déficit de la branche famille est 'artificiel'" puisqu'il résulte "notamment de la prise en charge des dépenses du Fonds de solidarité vieillesse (...) considérées comme une charge indue".

Majorer le complément familial

Sans se perdre dans le détail des multiples scénarios formulés dans ce document - qui n'empêchent pas le HCF d'émettre "des regrets sur le périmètre jugé trop restreint de l'exercice et des propositions complémentaires" -, Bertrand Fragonard et ses collaborateurs préconisent notamment "un effort financier important sur l'action sociale dont l'essentiel porte sur le développement des établissements d'accueil des jeunes enfants : le Fonds national d'action sociale de la caisse nationale des allocations familiales (CNAF) progresserait au rythme de 7,5 % par an sur la période 2014-2017, soit près de quatre points au-dessus de l'évolution du PIB".
Ils recommandent aussi "l'augmentation des prestations servies aux familles modestes : la majoration du complément familial dont bénéficient les familles nombreuses et de l'allocation de soutien familial dont bénéficient près de 30 % des familles monoparentales mobiliserait 785 millions d'euros à l'horizon 2018". Ces mesures positives font pour leur part consensus au HCF.
S'y ajouterait "un système de bonus" qui pourrait "améliorer les aides au logement des familles dont le taux d'effort pour se loger est abusivement élevé". Les crédits consacrés à la politique d'accompagnement de la parentalité pourraient enfin être doublés pour permettre "une politique plus active dans ce domaine".

Moduler les allocations familiales

Reste que pour financer ces actions et ramener la CNAF à l'équilibre financier en 2016, soit un besoin de financement de 2,1 milliards d'euros, le rapport mise sur "des économies substantielles", qui passeraient essentiellement par des redéploiements, pour se limiter au final à 3 % des prestations familiales et fiscales des familles avec enfants à charge.
Est ainsi évoquée une réforme de la prime de naissance ou d'adoption de la PAJE, à laquelle les membres du HCF se déclarent opposés, tandis que certains d'entre eux voient d'un oeil plus favorable le rapprochement de l'allocation de la base de la PAJE et du complément familial.
Il est aussi question de "demander un effort aux ménages les plus aisés, pour l'essentiel les familles des deux déciles de revenus supérieurs", qui pourrait comprendre "la modulation de leurs allocations familiales", une hypothèse qui a déjà fait couler beaucoup d'encre.
"Dans ce schéma, on conserverait le principe d'universalité des allocations familiales", défend Bertrand Fragonard. Il serait alors impératif de ne pas viser les classes moyennes supérieures et d'adopter "un seuil qui progresse avec le nombre d'enfants".

Le HCF très réservé sur le projet

Pour autant, une majorité des membres du HCF "est hostile à une telle modulation", qui porterait atteinte, selon eux, au principe d'universalité et ouvrirait la porte à la suppression totale des allocations pour les classes supérieures de la population. Pour les autres, elle est envisageable sous certaines conditions (revenus les plus élevés, lissage pour rendre la perte d'allocations progressive...).
"Tous", en revanche, "ont souligné l'impact sur la charge de travail des caisses d'allocations familiales et des caisses de mutualité sociale agricole d'un tel projet", du fait de la nécessaire adaptation du système d'information mais surtout du traitement régulier par les agents des caisses des dossiers de revenus de tous les bénéficiaires d'allocations familiales. Ils craignent aussi que ce système de nombreux indus, et demandent donc "à ce que les moyens nécessaires soient accordés aux caisses si ce projet était retenu".

Les aides aux familles, rapport établi par Bertrand Fragonard, président du HCF, avec la collaboration d'Elizabeth Le Hot, Frédérique Leprince et Pascale Bonnevide, en ligne sur le site de Matignon, de même que ses annexes et l'avis du HCF sur les aides aux familles.

A.S.

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